Dans le cours des événements politiques récents, le docteur Belkacem Sahli président de l'ANR revient, dans cet entretien sur le contenu final de la révision de la Constitution, notamment les dispositions retenues et celles qui ont fait au sein de son parti l'objet de réserves. L'Expression: Quelle lecture faites-vous et votre position par rapport à la dernière mouture de la révision de la Constitution? Belkacem Sahli: Globalement, nous avons soutenu le projet, lors de notre conférence nationale des bureaux de wilayas, mercredi dernier, où nous avons instruit le groupe parlementaire de voter oui, et nous avons instruit la base militante du parti et les élus au niveau des APW et des APC, de s'inscrire dans la campagne électorale, pour préparer le prochain référendum. Cela dit, il faut rappeler la position de l' ANR. Dans la mesure où lorsque nous avons reçu l'avant-projet, nous avons exprimé une position de principe, à travers laquelle nous avons accueilli favorablement le processus de la révision, du fait que depuis le 22 février, il y avait deux options différentes; soit reformer le système politique en Algérie à travers les institutions, soit le réformer à travers une assemblée constituante, ou une période de transition. Nous position est connue, d'une part, nous sommes contre une période de transition et une Assemblée constituante, quoi qu'on respecte les autres positions. Dans la mesure où la révision de la Constitution était un engagement du président élu qui tend à concrétiser ses promesses électorales, ce qui va se refléter sur le retour de la confiance entre les citoyens et les institutions élues. D'autre part, on a jugé que le processus de révision constitutionnelle colle avec l'idée réformiste de l'ANR, en l'occurrence l'appel au renouveau républicain. Sur quelles bases avez-vous étudié le projet de révision de la Constitution? Nous avons abordé l'étude du projet en essayant de répondre à quatre questions. En premier lieu, est-ce que le projet de révision répond aux aspirations légitimes consensuelles et graduelles de la société? Dans ce cas, on considère que la société algérienne à exprimé, depuis le 22 février 2019 un certain nombre de revendications, entre autres, celles consensuelles, graduelles et raisonnables. Donc, nous parlons d'Etat de droit, de lutte contre la corruption, de l'indépendance de la justice, d'alternance démocratique, que nous considérons comme des revendications prises en considération par la révision constitutionnelle. Secundo, est-ce que la révision de la Constitution, a réalisé l'équilibre stratégique entre les aspirations des citoyens vers plus de droits et libertés, et les exigences du maintien de la stabilité de la cohésion de l'Etat? Dans la mesure où il s'agit d'un équilibre non statique qui évolue selon les situations, mais l'intelligence politique voudrait que cet équilibre ne débouche ni sur une anarchie dans les libertés et les droits ni sur un Etat dictature. Là également, nous considérons que la révision de la Constitution a pris en charge cette question. La troisième question est de savoir si la révision de la Constitution prendra en considération le renouveau républicain, et les mutations qui doivent suivre, qui s'articulent autour d'une nouvelle Constitutions, et de nouvelles institutions. Dans ce sens, nous considérons, qu'il ne faut pas se précipiter pour l'organisation des élections législatives, au risque de reproduire la même configuration politique actuelle. Il faut donner le temps à toutes les formations politiques pour faire la bonne lecture du 22 février, et donner le temps au Hirak pour faire émerger une nouvelle classe politique. Enfin, la dernière question à laquelle doit répondre la révision constitutionnelle, est la capacité de ce projet à élargir la base politique et populaire qui doit contenir cette révision, par rapport à celle du 12/12. Pour nous, si les réformes politiques, économiques ou sociales, engagées par le président, n'aboutissent pas à l'élargissement de sa bases politique, c'est qu'il fait fausse route. Quelles sont les dispositions de la révisions de la Constitution, que vous retenez et celles qui font, pour vous, l'objet de réserves? Nous avons été satisfaits, notamment par le fait que plusieurs propositions de partis politiques, dont l'ANR ont été prises en considération dans la mouture finale, ce qui prouve que le président et les rédacteurs de la révision, vont dans le sens de la quête d'un consensus. À notre niveau sur 57 propositions, il a en été retenu 42 qui ont trait à la société, civile, les droits et les libertés, les missions de l'Armée nationale, le statut particulier des APC, la constitutionnalisation du Hirak. Par contre nous avons constaté un certain nombre de régressions, sur la portée moderniste et progressiste du projet initial par rapport au projet final. À titre d'exemple, on parle plus de collectivités locales que de collectivités territoriales, il y a également les restrictions faites au niveau des libertés, où la notion d'atteinte aux valeurs est ajoutée, ce qui restreint les libertés. Pour nous, l'explication est claire, les rédacteurs de cette copie finale ont subi des pressions de la part des courants islamistes. D'autre part, il y a l'équilibre des pouvoirs au niveau de la Cour constitutionnelle, qui passe d'un équilibre où les partis étaient représentés, par quatre personnes pour chaque pouvoir, à une représentation du pouvoir exécutif par quatre personnes, auxquelles s'ajoutent six représentants du pouvoir judiciaire, alors que les représentants du pouvoir législatif, ne figurent plus dans la mouture finale. Et finalement, nous considérons que le choix de la date du référendum au 1er novembre n'est pas judicieux. Cela dit, il est positif de fixer des délais pour ce rendez-vous électoral. Nous comprenons l'intention du président de la République, qui tend à regrouper les Algériens autour d'une date historique. Mais on estime que c'est la seule date qui est resté sacrée et intouchable, d'autant plus que par définition le référendum est un acte démocratique qui va engendrer, comme cela a été le cas pour l'élection présidentielle, des boycotts dans certaines régions du pays, et qui plus est, celles qui étaient au premier front durant la guerre de libération, ce qui va entacher la symbolique du 1er novembre, qui doit rester pure.