Il a marqué plusieurs générations de fans, non seulement par sa voix belle, douce et unique, mais aussi par des musiques et des textes poétiques que ses fans ont adorés et adorent toujours. Sa maitrise de la musique l'a poussé à faire une sorte de jonction réussie entre le style oriental et le style chaâbi avec, en toile de fond bien sûr, une âme kabyle qu'on retrouve dans l'ensemble de son oeuvre. Même les fans qui ne connaissent pas parfaitement toute l'oeuvre de Youcef Abdjaoui, pour une raison ou une autre, ont écouté et apprécié au moins deux ou trois de ses chansons mythiques. Qui n'a pas écouté et n'a pas été bercé inlassablement par la chanson «Yegouma youl» ou encore par «Tit d woul»? Ce sont deux hymnes à l'amour qui sont inoubliables. C'est le cas aussi de «Inid ayghar», mais aussi «Refdaghd lkas», «Houria», «Ahlil m ntebâit», «Nnif, nnif», etc. La liste des chansons suaves de Youcef Abdjaoui est interminable. De l'anonymat à la reconnaissance C'est le 16 décembre 1932 qu'est né Mohand-Arezki Aliouche (le vrai nom de Youcef Abdjaoui) au village Ait Allouane (Akfadou) dans la wilaya de Béjaia. Dès son très jeune âge, son penchant pour la chanson s'est fait sentir et c'est le célèbre Sadek Abdjaoui qui découvre son talent et sa voix exquise. Sadek Abdjaoui lui ouvrit alors les portes de la radio pour y exprimer ses talents de future star de la chanson kabyle. C'était en 1948 et Youcef Abdjaoui n'avait que 16 ans, mais il était pétri déjà de talent. En 1958, Youcef Abdjaoui finalisa son premier album et l'édita. Il lui a fallu un seul disque pour qu'il sorte de l'anonymat et pour que son talent soit reconnu dans le milieu artistique d'Alger très exigeant à l'époque, faut-il le rappeler. Il se retrouva dans les rangs du célèbre orchestre de Amraoui Missoum. Une consécration inespérée, mais très méritée compte tenu de ses talents de joueur de mandole et de guitare, mais aussi d'interprète chantant juste et doté d'une voix sublime. Tout comme plusieurs autres grands artistes, lors de la guerre d'indépendance, Youcef Abdjaoui se retrouva naturellement dans la troupe de Farid Ali qui a interprété la célèbre chanson «Ayemma sebr our tsrou». Youcef Abdjaoui a aussi dirigé un orchestre à la radio kabyle d'Alger (chaîne 2) jusqu'à 1967, année pendant laquelle il émigra en France. En France, il a continué à produire de très belles chansons qui ne laissaient jamais les mélomanes indifférents ou insensibles. Même après son décès le 28 octobre 1996, il a laissé deux albums édités à titre posthume. La nostalgie au coeur de l'oeuvre Dans ses chansons, Youcef Abdjaoui aborde la thématique amoureuse, les déceptions sentimentales, la souffrance, la trahison des amis, l'exil, le retour à la terre natale. Avec des mots simples, mais extrêmement forts et prégnants, avec des métaphores rappelant le cadre de vie dans les villages de Kabylie, Youcef Abdjaoui restitue des pans entiers de la vie de l'époque. La nostalgie est au coeur de son oeuvre. Youcef Abdjaoui a côtoyé de nombreux artistes kabyles avec lesquels il a même travaillé et sur lesquels il a chanté. Youcef Abdjaoui a été le seul chanteur à avoir rendu hommage à Matoub Lounès du vivant de ce dernier, suite aux événements d'octobre 1988 dans la chanson «kim kan kim» éditée en 1989. Youcef Abdjaoui a aussi participé dans l'enregistrement de l'album «Izriw» de Matoub Lounès, édité en 1991. On entend, notamment sa voix dans la chorale ayant participé à l'enregistrement de la chanson «Izriw». Comme beaucoup d'artistes, Youcef Abdjaoui est décédé loin de sa terre natale qu'il chérissait pourtant tant. Dans l'une des chansons figurant dans son album posthume, Youcef Abdjaoui conjure le chauffeur de taxi qui le conduit de l'aéroport vers son village d'appuyer encore sur l'accélérateur car il a hâte d'arriver chez lui. Malheureusement, ce voeu, ce rêve et ce souhait n'ont pas été réalisés. Youcef Abdjaoui est mort loin de son pays.