Les journées théâtrales de l'Association Arc-en-ciel ont bel et bien été enclenchées lundi au TNA avec, comme promis, une prestation, en première partie, de l'orchestre « Esperanto » dirigé par Mme Marguarita Doulache. Les onze instrumentistes ont égrené des pièces du répertoire national, revues et arrangées par le chef d'orchestre, ainsi qu'une sélection d'oeuvres universelles. Mme Doulache, à l'accordéon, s'est laissé aller à une interprétation très libre des classiques andalous algériens comme Koum Tara et l'instrumental d'un Inklab Zidane. Ce qui avait des allures de fugues polyphoniques sur un tempo de valse, ne pouvait que réchauffer un public intimidé par les gouttes de pluie qui sont tombées à quelques minutes de l'ouverture. Une nouba de J.A Weber, offerte au défunt Mahieddine Bachtarzi, dont le théâtre porte le nom, a été exécutée à l'occasion et pour la première fois devant le public du théâtre. L'orchestre de chambre « Esperanto » dans cette première apparition a dévoilé, outre les talents d'arrangement de Mme Doulache, une maîtrise très encourageante. Sur des thèmes plus au moins connus, l'orchestre a fait son initiation au public et tenté de le séduire. La célébration de la naissance officielle de l'association Arc-en-ciel aura été à cet effet une occasion de plus pour faire connaissance avec la musique orchestrale. Après ce prélude tout en harmonie, le public allait enfin assister au premier épisode du programme de l'association. De la pièce «Le mariage de monsieur Mississippi» écrite par le Suisse Friedrich Dürrenmatt, nous n'aurons droit qu'au premier acte. La pièce raconte l'histoire de monsieur Mississippi, redoutable procureur qui rend visite à Anastasia, une jeune femme qui vient de perdre son mari. Mississippi est certain que Anastasia a tué son conjoint par jalousie. Au cours de l'entretien qui se transforme vite en interrogatoire, le procureur, preuves à l'appui, pousse la femme à avouer son forfait avant de lui déclarer que lui-même s'est rendu coupable du meurtre de sa femme. Tous deux empoisonnés, ils entretenaient une relation amoureuse, que ni le procureur ni Anastasia ne pouvaient supporter. Mississippi propose ensuite à Anastasia de l'épouser, mais, face à son refus, il lui force la main. Procureur, au score glorieux de deux cents condamnations à mort, il terrifie la veuve qui finit par se plier à cette condamnation d'un autre genre. Unis dans le malheur et dans le délit. Mohamed Abbas, dans le rôle du procureur, et Radia Serouti, dans celui d'Anastasia, ont évolué sur une mise en scène d'Ahmed Mouzarine. Dans un arabe littéraire qui aurait pu être soporifique, la mise en scène a réussi à capter l'attention du public et à l'entretenir même si la pièce n'a pas été restituée dans sa totalité. Les artifices et la subtile instrumentalisation des éléments du décor ont eu l'effet escompté. Hier, Ahmed Mozarine devait, encore une fois, investir les planches avec la mise en scène d'une pièce du dramaturge napolitain Eduardo de Fillippo L'Art de la comédie, adaptée par Cherchel Mohamed. Ce dernier s'est récemment produit sur les planches du TNA en tant que metteur en scène avec une pièce d'Eugène Ionesco. Aujourd'hui, ce sera au tour de Iaiche Kamel de donner le ton du Zoo story d'Edward Franklin Albee. Un texte traduit par Bensine Haïder qu'interpréteront Tebal Zerboubi dans le rôle de Peter et Samir El Hakime dans celui de Jerry. Une histoire qui met au jour les difficultés de communication entre les individus des sociétés modernes et révèle aussi l'énorme écart entre la suffisance et la véritable satisfaction. Pour la clôture de ces journées théâtrales, jeudi 17 janvier, une soirée tchékhovienne à trois temps nous fera découvrir le génie satirique de l'auteur. Trois pièces en un acte: Le tragédien malgré lui, L'ours et la Demande en mariage, dévoileront ces petits vices de la bourgeoisie russe du XIXe siècle qui transcendent leurs contextes, ce qui donne l'universalité des oeuvres de cet auteur.