Alger sera amenée à contrôler ses frontières limitrophes à la bande du Sahel tout en gardant un oeil grand ouvert sur la Méditerranée. La Maison-Blanche vient de rendre public un document de politique étrangère intitulé «La stratégie nationale en matière de sécurité», en soulignant que désormais «l'Afrique revêt une importance géostratégique croissante» pour les Etats-Unis. Ce document indique que la sécurité des Etats-Unis dépend en partie des partenariats avec les pays africains relatifs à des programmes de sécurité. Ces programmes visent à prévenir des attentats terroristes tels que ceux qui ont frappé les ambassades des Etats-Unis à Nairobi (Kenya) et à Dar-Es-Salam (Tanzanie) en août 1998 et qui ont causé la mort de plus de 250 Africains. Le document dit que «les Etats-Unis sont résolus à coopérer avec les Etats africains en vue de renforcer leurs moyens nationaux et les moyens de l'Union africaine, d'appuyer les transformations après un conflit, de consolider les transitions démocratiques et d'améliorer le maintien de la paix et les interventions en cas de catastrophe». Une haute responsable du ministère de la Défense, Mme Theresa Whelan, a fait état du soutien croissant des milieux politiques pour une telle aide, lors d'un séminaire organisé en décembre 2005. «L'Afrique, a-t-elle dit alors, occupe dans l'ordre des priorités des Etats-Unis une place beaucoup plus élevée que ces 10 à 15 dernières années. En fait, l'attention que les Etats-Unis, l'Union européenne, le groupe des Huit et maintenant l'Otan accordent à l'Afrique est sans précédent et continue de s'accroître.» la traque au gspc Alors que le ministère de la Défense estime que quelque 25% des 400 combattants étrangers faits prisonniers parmi les insurgés en Irak sont d'origine africaine, les partenariats en matière de sécurité deviennent de plus en plus importants. En Afrique, indique le document sur la stratégie nationale en matière de sécurité, «la lutte contre l'extrémisme islamique militant» a lieu dans le cadre de nouveaux partenariats tels que l'Initiative mondiale en faveur des opérations de paix que le G8 a lancée en 2004 en vue de former des soldats africains au maintien de la paix. D'autres programmes de coopération comprennent celui qui fait suite à l'Initiative pansahélienne, programme de formation militaire remontant à 2002 et intéressant le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad qui a permis en 2005 de s'opposer avec succès à un groupe d'extrémistes musulmans. L'Initiative pansahélienne a été élargie pour devenir un nouveau partenariat de formation appelé l'Initiative transsaharienne de lutte contre le terrorisme (Trans - Sahara Counterterrorism Initiative ou Tsci) à laquelle participent également l'Algérie, le Maroc, le Nigeria, le Sénégal et la Tunisie. Il est question que la Libye y participe également plus tard. La Tsci, a-t-il dit aux membres de la commission, est un partenariat très utile en matière de sécurité avec les pays africains, car elle «contribue à renforcer les moyens régionaux de lutte contre le terrorisme, à renforcer la coopération entre les forces de sécurité africaines et à l'institutionnaliser, à encourager la bonne gouvernance, à favoriser le développement et la formation, enfin à consolider nos relations bilatérales avec chacun des Etats participants». Les Etats-Unis avaient en fait commencé à s'intéresser à la région sahélo-saharienne au lendemain de la guerre engagée aux Etats-Unis et la dispersion des cadres d'Al Qaîda et de ses sympathisants un peu partout dans le monde. La présence du Yéménite Imad Abdewahed Alouane en Algérie (il avait été abattu à Batna en 2002) via le Sahel puis l'acheminement des 14 touristes kidnappés par le Gspc d'Algérie vers le Mali, avaient fini par conforter les experts militaires américains que cette bande du Sahel, longue de plusieurs milliers de kilomètres et qui va de la Mauritanie au Tchad à la Somalie en passant par le Mali et le Niger, finira par constituer une «rampe de lancement» pour les futurs groupes armés. La capture des islamistes africains menés par Amari Saïfi dans la zone de guerre du Tibesti a fini par faire croire définitivement que la bande du Sahel, déjà infestée de groupes rebelles, d'opposants armés, de Touareg sécessionnistes et de contrebandiers constitués en bandes mafieuses, risque de se voir encore encombrée d'islamistes qui se retrouveraient aux portes de l'Europe dès qu'ils passeraient les frontières nord. Le plan Pan-Sahel Initiative (PSI) américain avait été exposé comme un vaste programme, dont l'objectif est d'endiguer toute menace terroriste venant du Sahel. Près de 120 millions de dollars ont été débloqués à cet effet, en plus d'experts militaires et d'équipements sophistiqués pour le repérage, la reconnaissance, la détection et éventuellement l'attaque aérienne. Pour Washington, toutes les bandes islamistes de la région ne peuvent qu'être alliées à Al Qaîda, et doivent de ce fait, être traquées sans répit et démantelées. Cependant, les Etats-Unis ne peuvent s'engager longtemps sur plusieurs fronts ni engager leurs troupes déjà très éprouvées dans des guerres d'usure, et tout aussi aléatoires qui plus est. D'où tout l'intérêt porté aujourd'hui à l'Algérie qui possède déjà sur place hommes et logistique militaire. Un autre programme de formation qui donne de bons résultats est l'Acota (African Contingency Operations Training and Assistance), dont l'objectif est d'améliorer le professionnalisme des militaires africains et de perfectionner leurs connaissances en matière de maintien de la paix. priorité à la formation Un des programmes de partenariat entre le ministère de la Défense et l'Afrique les plus novateurs est le Centre africain d'études stratégiques, implanté à Alger, comme preuve du leadership algérien en matière de lutte antiterroriste, (Africa Center for Strategic Studies ou Acss). Créé en 1999, l'Acss a fourni une formation à quelque 2000 officiers et hauts responsables chargés de la défense en Afrique tant sur place dans le continent africain qu'à son siège à Washington. L'intérêt économique et financier des opérations militaires américaines n'étant jamais loin, il y a lieu de préciser que les échanges commerciaux entre l'Algérie et les Etats-Unis ont atteint 11,515 milliards de dollars en 2005 poursuivant ainsi leur renforcement et leur dynamisation, selon les dernières statistiques du Bureau du commerce extérieur du ministère américain du Commerce. En 2004, ce chiffre n'était que de 7 milliards de dollars contre 5 milliards de dollars en 2003. Les exportations algériennes vers le marché américain ont atteint, lors de l'année 2005, quelque 10,354 milliards de dollars, constituées, dans leur majorité, d'hydrocarbures, de matières premières, de produits pétrochimiques et de quelques produits agricoles et manufacturés. Les importations algériennes du marché américain, un total de 150 produits, ont enregistré un montant global de 1,160 milliard de dollars. Tant et si bien qu'au plan d'une stratégie globale, Washington ne connaît pas de demi-mesure, et se lance dans des opérations qui «globalisent» tout sur leur passage.