C'est une information capitale que vient de livrer le quotidien israélien Haaretz. Israël a envoyé, au cours des deux derniers mois, de nom-breux conseillers, experts et formateurs militaires ainsi que des lots importants de matériels de guerre au profit de l'armée royale marocaine, confrontée depuis la mi-novembre, à une offensive de l'Armée populaire de libération sahraouie (APLS), après avoir attaqué des civils sahraouis dans la zone tampon d'El Guerguerat, pour ouvrir, affirme Rabat, la route aux exportations vers l'Afrique de l'Ouest. Cela signifie que l'Etat hébreu s'est rapidement investi dans la militarisation du Sahara occidental et, plus largement, dans cette partie du Maghreb qui constitue un maillon crucial dans la stratégie d'intervention au nord-ouest du continent. Selon certaines sources, Rabat se prépare à des exercices de grande ampleur, baptisés par ses parrains et alliés occidentaux African Lion, et à jouer son rôle naturel de cheval de Troie dans cette partie du Maghreb. Les officiers israéliens qui ont investi une base militaire marocaine située à 30 kilomètres de la frontière algérienne sont donc à pied d'oeuvre et le scénario préétabli ne va pas tarder à s'afficher au grand jour. Outre la formation et l'encadrement des officiers marocains, l'envoi de matériels de guerre montre, clairement, quel objectif est tracé, pour les mois qui viennent. Qu'il s'agisse de drones, de missiles ou d'autres armes, plus ou moins sophistiquées, on imagine que les satellites et le Renseignement vont peser de tout leur poids dans le déploiement des forces sionistes, sous couvert d'une assistance technique à l'Armée royale marocaine. Les analystes qui prédisaient une redistribution des cartes dans la région, à travers l'instrumentalisation enthousiaste du Makhzen, semblent avoir vu juste, du moins pour l'instant. Et lorsque le Haaretz écrit que le rapprochement entre le Maroc et Israël ouvre la voie à une «aide israélienne au profit de l'armée marocaine dans de nombreux domaines», à commencer par la coopération en matière d'espionnage révélée par une autre partie du rapport auquel se réfère le quotidien, on com-prend que le résultat de nombreuses années de coopération et d' «échanges» dans plusieurs domaines, dont les champs politique, culturel et militaire, entre Israël et le royaume marocain n'ont trouvé dans la récente normalisation entre les deux Etats que le prétexte d'une idylle soudainement reconnue et dévoilée. En cherchant à provoquer une guerre d'usure au Sahara occidental, Mohamed VI n'a obtenu, en réalité, qu'un immense discrédit. Et si sa fuite en avant entraîne une militarisation de la sous-région maghrébine, déjà en proie aux conséquences de la crise libyenne et des coups de boutoir d'un terrorisme grandissant dans tout le Sahel, ce sera la porte ouverte à une implosion du royaume bien plus qu'à une déstabilisation de l'Algérie dont l'armée est totalement mobilisée sur tous les axes frontaliers pour relever n'importe quel défi.