Tant que ces associations vivront dans l'état d'anarchie qui est le leur en ce moment, il n'y a pas lieu de s'attendre à un miracle pour la discipline. «Nous manquons terriblement des gestionnaires, notamment dans un secteur comme celui de la jeunesse et des sports où nous n'avons même pas une équipe bien gérée». Ces mots sont du Président de la République en personne, M.Abdelaziz Bouteflika. Il a été amené à les prononcer le 4 avril dernier lors de sa tournée d'inspection dans la wilaya d'Alger. S'il en est arrivé à s'exprimer de la sorte c'est qu'il sait que le sport algérien éprouve des difficultés à se relancer. Et lorsqu'il parle d'équipe, il fait très certainement référence aux clubs de football dont il a toujours dit qu'ils ont besoin d'être restructurés. A l'avènement du code de l'EPS en 1977, les clubs de l'élite avaient été placés sous la coupe d'entreprises publiques. Ce sont celles-ci qui assuraient leur prise en charge; il était, donc, normal qu'elles placent leurs agents à la tête de ces clubs. Les anciens dirigeants, pour la plupart, pour ne pas dire la totalité, avaient été écartés du circuit. Nous ne dirons pas que tout était parfait mais il est sûr que les clubs étaient mieux gérés qu'ils ne le sont aujourd'hui. Ne serait-ce que sur le plan de la comptabilité, les clubs bénéficiant, alors, de rentrées financières qui étaient minutieusement contrôlées. Ce qui n'est certainement pas le cas aujourd'hui où l'on se contente d'assemblées générales vite expédiées sans que l'opportunité des dépenses n'ait été jamais débattue. Il se trouve qu'en 1989 lorsqu'une nouvelle loi sur le sport était venue remplacer le code de l'EPS et que les entreprises publiques avaient décidé de se retirer de la partie, on avait laissé les clubs à l'abandon. Du moins, il ne s'était pas trouvé une structure officielle pour contrôler l'afflux massif de nouveaux dirigeants de club. On avait laissé n'importe qui entrer dans le système avec tous les risques que cela supposait. C'était à partir de ce moment-là qu'est apparue la surenchère au sujet de joueurs qui n'en valaient pas la peine, surenchère qui dure jusqu'à aujourd'hui au grand malheur d'un football qui n'arrête pas de compter ses déboires. Nous ne disons pas que tous les dirigeants étaient mauvais mais une écrasante majorité avait pris les rênes des clubs avec sa mentalité de commerçant qui fait croire que tout s'achète même les matches, les joueurs et les arbitres. L'histoire retiendra que c'est durant la décennie 90 que les plus grands scandales ont émaillé le football algérien. Cette décennie correspondait aux années noires du terrorisme. Le football, malgré les douleurs et les peines, malgré les menaces avait continué à activer et à remplir les stades grâce à l'aide des services de sécurité. Mais aussi grâce à celle de l'Etat qui avait continué à subvenir aux besoins du sport et du football en particulier. A ce moment-là les clubs étaient perçus comme des instruments de paix sociale même si çà et là il était fait état de débordements et de violence dans les stades. C'est pourquoi les DJS n'avaient jamais été trop regardantes lorsque ces clubs leur transmettaient leurs bilans. Elles continuent à agir de la même manière aujourd'hui. A tort bien sûr. Le terrorisme a été presque totalement éradiqué. L'Algérie s'est, depuis quelques années, lancée dans une vaste politique de réformes de laquelle la gestion du sport et du football ne peut en être exempte. L'heure est à la rigueur et à la conscience professionnelle. En 2006, on ne peut plus agir comme on le faisait en 1993 ou en 1997. Pourtant, jusqu'à aujourd'hui on continue à parler de corruption et de matches combinés tant ils sont entrés dans les us et coutumes de la discipline. En France, le football avait été «pourri» par l'entrée en scène, dans les années 1980 et 1990, de certains dirigeants spécialistes des pots-de-vin et des dessous de table. C'est en procédant à un grand coup de balai qu'on avait réussi à les exclure de la discipline avec la réussite que l'on connaît puisque l'équipe de France a été sacrée championne du monde en 1998 et championne d'Europe en 2000. Peut-on en faire de même chez nous? Nous avions posé la question au ministre de la Jeunesse et des Sports, Yahia Guidoum, au mois de Ramadan dernier, lors d'un forum organisé par le quotidien El Youm au sujet du contrôle qu'il comptait organiser au niveau des clubs. Il nous avait, alors, répondu qu'il allait instruire en ce sens les DJS. Mais que peut faire un DJS face aux puissants dirigeants de club? La question reste posée au ministre. En tout cas, tant que nos clubs seront dans un tel état d'anarchie avec des dirigeants qui n'ont aucune notion de gestion et de marketing, il n'y a pas lieu de s'attendre à des miracles pour la discipline.