«Si nous n'arrivons pas à recouvrer nos droits légitimes par les voies pacifiques, nous serons obligés de défendre ces droits par la lutte armée.» Le rapport de Kofi Annan sur le Sahara occidental ne semble pas constituer un élément d'apaisement dans la région. La première réaction du président sahraoui, Mohamed Abdelaziz, confirme cet état de fait et ouvre la brèche à une véritable dégradation du climat entre la République arabe sahraouie et le royaume marocain. Qualifiant le rapport qui préconise une négociation directe entre les deux parties en conflit, de «complot contre la cause sahraouie», M.Abdelaziz menace de «reprendre la lutte armée si le Conseil de sécurité venait à (l')approuver». Cette détermination que les observateurs ne prennent pas à la légère, tient au fait que la proposition de sortie de crise du secrétaire général de l'ONU, constitue un recul de la position de l'Organisation des Nations unies sur un dossier, pourtant considéré comme une question de décolonisation. A ce propos, le président Mohamed Abdelaziz avertit: «Nous ne conseillons pas au Conseil de sécurité d'approuver ledit rapport, car nous sommes un peuple colonisé et affaibli, mais si nous n'arrivons pas à recouvrer nos droits légitimes par les voies pacifiques, nous serons obligés de défendre ces droits par la lutte armée». Pour le président sahraoui, l'ONU doit «assumer son entière responsabilité» et «ne pas renier ses propres chartes et lois internationales». Une claire invitation au Conseil de sécurité pour rejeter le rapport Annan. Et d'ajouter: «Si l'ONU renie ses principes et ses engagements, ce sera un précédent grave qui ne peut, en aucun cas, être justifié». Côté marocain, on juge «plutôt positif» ledit rapport et on va jusqu'à donner un signe de bonne volonté en procédant à la libération de 48 Sahraouis détenus dans les prisons marocaines. Heureux de constater que le rapport de Kofi Annan a «enterré définitivement et à jamais le plan Baker» qui, selon le palais royal, «ne tient pas compte des conditions posées par toutes les parties», les partisans de la marocanité du Sahara occidental estiment que c'est là une victoire du Maroc dans ce conflit qui perdure depuis 1975 et qui a été pris en charge par l'ONU en 1991, à travers le plan Baker qui préconisait une période d'autonomie de cinq ans devant être suivie d'un référendum d'autodétermination sur le statut définitif du territoire. Rabat a rejeté le plan Baker, jugeant le référendum «obsolète et inapplicable». Depuis le début de l'année en cours, le palais royal a mené une campagne internationale pour défendre son projet de «large autonomie». Soutenu par la France, Rabat espère obtenir de la communauté internationale une caution de son propre plan. L'offensive marocaine a, certes, remis en cause le plan Baker, estiment les observateurs mais, sans pour autant aboutir au règlement de la crise, puisque le rapport de Kofi Annan est loin d'obtenir l'assentiment de très nombreuses nations qui reconnaissent la République sahraouie. En fait, la «victoire» marocaine est quelque peu illusoire du fait que la «solution» ne convient pas à l'une des parties en conflit, en plus du fait qu'elle remet en cause l'un des principes fondateurs de l'organisation des Nations unies. Aussi, les observateurs soulignent que le rapport Annan a peu de chance de passer le cap du Conseil de sécurité et l'on reviendra à la case départ sur un dossier qui était à deux doigts d'être solutionné, n'était le soutien actif de la France apporté au royaume alaouite.