Le ciné-club de l'association Chrysalide vous convie à un nouveau cycle cinématographique consacré, cette fois, à l'univers artistique de la peinture. De l'entêtement artistique, de l'exigence de la rigueur, de l'ordre et du sentiment dans la conception d'un tableau , voilà l'objet dont il est question dans le film Le songe de la lumière de Victor Erice (1992).Mais on aurait tort de voir que cela. L'histoire du troisième film de ce réalisateur qui met en scène l'artiste lui même face à son art, est un plaidoyer pour le temps qui passe et l'obstination des artistes devant leur impétueuse passion de créer, inlassablement, maladivement jusqu'à l'épuisement. Comme toile de fond, c'est le jardin rêvé et donc sublimé qui plante le décor de ce film qui pêche par sa lourdeur. L'artiste dans sa folle et utopique tentative de reconstituer cette nature muable au gré du temps, tente vainement de fixer cette lumière qui rend si beau cet objet fantasmé, le cognassier. Lui et son cher compagnon, cet arbre, placent au centre ainsi l'histoire, le reste, notamment sa femme, son fils , eux aussi plasticiens et ces ouvriers polonais, sans oublier son ami, n'étant que subalternes, secondaires, hors champ. L'arbre humanisé, suit les courbes du temps (du 30 septembre au 11 décembre) rendant la tâche de notre artiste difficile à accomplir , invraisemblable, impossible. Antonio Lopez veut saisir la beauté de l'arbre en fleurs mais la lumière change plus vite que ses coups de pinceaux, parce que l'arbre grandit plus vite que sa reproduction sur toile. Quant arrive l'hiver, il remet son projet une fois de plus à l'année suivante. Il faut admettre que l'art échoue devant la force implacable de la nature et des saisons. Aussi, à travers ce film, Victor Erice tente de saisir le mûrissement de l ‘oeuvre et le pourrissement du fruit qui finit par mourir. Méditatif, contemplatif, imagé, poétique, le film pose une réflexion entre le réel de l'illusion et la folie de la sagesse de faire ou encore de capituler. Un film qui inspire en tout cas au repos, au calme et à la méditation sur la complexité de l'état d'âme d'un artiste. Un thème assez original qui constitue le nouveau cycle cinématographique du ciné-club de l'association Chrysalide. Le songe de la lumière est le second film dans la liste, après Van Gogh, présenté à la salle Frantz-Fanon (Oref) la semaine dernière. De quelle façon un art comme le cinéma tente d'en représenter un autre? C'est-à-dire de le rendre présent, d'en capter la substance... De quelle façon le metteur en scène tente-t-il de dévoiler les énigmes de la démarche artistique? Comment donner à voir le processus de création? Le cinéaste s'arrogeant parfois, comme on le verra tout le long de ce cycle consacré à la peinture, le droit de créer une oeuvre d'art afin de rendre compte de la vie et de l'activité d'un artiste-peintre.