Dans le discours traditionnel de la fête du trône, le roi du Maroc, Mohammed VI, a abordé ce qu'il appelle les « tensions » entre son pays et l'Algérie, pour renouveler son appel à la réouverture des frontières terrestres fermées par l'Algérie depuis l'été 1994, en réaction à des mesures unilatérales du royaume marocain imposant le visa aux Algériens et spoliant les biens de ceux qui vivaient et travaillaient au Maroc « Vous n'aurez jamais à craindre de la malveillance de la part du Maroc », a ainsi prétendu le roi qui ajoute que « la sécurité et la stabilité de l'Algérie, et la quiétude de son peuple, sont organiquement liées à la sécurité et à la stabilité du Maroc ». Apparemment, Mohammed VI n'a guère entendu parlé de la récente initiative de son représentant diplomatique aux Nations unies qui s'est fourvoyé jusqu'à diffuser un tract auprès des Etats membres du Mouvement des Non-Alignés dans lequel le royaume marocain s'aventure à plaider la « cause » d'une prétendue autodétermination kabyle. Et c'est fort de cette ignorance qu'il a « invité » le président Abdelmadjid Tebboune « à faire prévaloir la sagesse » et « oeuvrer à l'unisson au développement des rapports » entre les deux pays voisins. L'Algérie a toujours fait la distinction entre l'aventurisme belliqueux du Makhzen dont les appétits expansionnistes ne remontent pas à hier, loin de là, et les liens indéfectibles qui lient les peuples algérien et marocain mais aussi tous les peuples maghrébins, dans leur ensemble. La construction de l'Union du Maghreb arabe est plombée depuis des décennies par cet aventurisme qui n'hésite pas à se fourvoyer dans les méandres sionistes pour perpétuer son occupation illégale, au regard du droit international, du Sahara occidental, inscrit par les Nations unies au titre d'ultime colonie en Afrique et en attente de décolonisation. Le Maroc n'a-t-il pas, en 1991, pris l'engagement formel de respecter les résolutions du Conseil de sécurité et de permettre à la Mission onusienne (MINURSO) d'accomplir la mission pour laquelle elle a été instaurée, à savoir l'organisation du référendum d'autodétermination auquel le peuple sahraoui a droit de manière imprescriptible ? Où est la sagesse et où est le respect des engagements pris, dans ce cas ? Le Makhzen a vite renié ses propres assurances et on voit mal, depuis, quel crédit peuvent avoir ses appels à « la sagesse ». Les relations entre l'Algérie et le Maroc sont plombées depuis plusieurs décennies par la question du Sahara occidental, ancienne colonie espagnole dont le Polisario réclame l'indépendance. Ces rapports ont été marqués par un nouvel accès de tension il y a deux semaines. L'ambassadeur marocain à l'ONU a en effet annoncé, dans une note diffusée durant une réunion du mouvement des Non-Alignés, soutenir «l'autodétermination» du «peuple kabyle» en Algérie, en réaction au soutien de l'Algérie aux indépendantistes sahraouis. Alger a riposté en rappelant son ambassadeur à Rabat pour consultations. « A sa plus proche convenance, j'invite le Président algérien à oeuvrer à l'unisson au développement des rapports fraternels tissés par nos deux peuples durant des années de lutte commune », s'émeut le roi marocain, se referant à la coopération des mouvements nationaux contre la colonisation française dans les années cinquante. Mais il y a loin de la coupe aux lèvres.