L'affaire Arthur Andersen rebondit. Le cabinet présélectionné pour piloter la privatisation de Sonelgaz a été éliminé au profit des Belges de Price Water House Coopers. Mis en cause par L'Expression, dans son édition d'hier, dans l'affaire Andersen-Sonelgaz, le ministère de l'Energie et des Mines a réagi en indiquant qu'effectivement, Arthur Andersen faisait partie des quatre soumissionnaires retenus par le département de Chakib Khelil lors de l'ouverture des plis techniques qui a eu lieu le 30 septembre 2001. Mais ce qu'il y a de plus étonnant c'est que le ministère de l'Energie indique que c'est le cabinet belge Price Water House Coopers qui a été retenu et avec lequel il sera procédé à la négociation du contrat d'approbation du rapport d'évaluation financière par la Bird. Cette information était jusque-là confidentielle du moment que l'ouverture des plis financiers du 14 janvier dernier n'a pas été rendue publique, encore moins ses résultats. Le ministère de l'Energie et des Mines revient sur une demande de manifestation d'intérêt pour des prestations de service afin de sélectionner un consultant pour la réorganisation du secteur de l'électricité et de la distribution de gaz naturel. Dans ce processus, six consultants ont été «short-listés», selon le ministère dont les Belges de Water House, les Français de BNP-Paribas, Arthur Andersen et Mazars, les Américains de Delotte & Touche Dikstein Shapiro et Boozallen & Hamilton ainsi que les Canadiens de Trans Energie Services Secor. Jusque-là, la procédure qui a été engagée dans la transparence puisqu'une réunion a eu lieu le 30 juillet 2001, en présence des représentants des consultants, des représentants du ministère et de Sonelgaz, a abouti à la sélection des quatre cabinets. C'est à partir de ce moment que les choses deviennent plus complexes, puisque l'élimination des candidats s'est faite sans annonce postérieure. La proposition des Américains de Delotte & Touche a été jugée «non recevable». Celle des Français de Mazars & Guerard a été éjectée «sa proposition technique n'ayant pas obtenu le score technique minimum requis». Le ministère indique que c'est le cabinet belge Price Water House Coopers qui a été sélectionné. La démonstration paraît a priori convaincante, si ce n'est une précision de taille : Arthur Andersen représenté par le Français Jean-Paul Ducreux n'a été ni éliminé (le ministère ne l'évoque même pas ainsi que les causes du rejet éventuel de son dossier) ni sélectionné, puisque ce sont les Belges qui raflent le contrat pour assister à la privatisation-réorganisation de Solengaz. Et c'est là que réside toute l'ambiguïté de cette affaire. Où est passée l'offre d'Arthur Andersen? Pour quelles raisons a-t-elle été retenue? Andersen était-il le favori des Algériens avant que n'éclate le scandale Enron? Toutes ces questions auraient certainement eu des réponses si la presse avait été conviée à l'ouverture des plis de lundi 14 janvier 2002 au siège du ministère de l'Energie. Aucun communiqué public n'est venu ponctuer cette cérémonie d'ouverture des plis. D'où l'intérêt de s'interroger sur les raisons de cet «oubli». La raison pourrait être plus simple. Le lendemain de cette cérémonie, le ministre de l'Energie, Chakib Khelil, affrontait les sénateurs au Conseil de la nation sur le texte de loi sur l'électricité et le gaz. Khelil n'y fait pas d'annonce sur l'octroi du marché de Sonelgaz, mais répond aux préoccupations des sénateurs qui relèvent que «la réforme de la Sonelgaz» pouvait conduire au licenciement de plusieurs centaines de travailleurs sur des effectifs estimés à 20.000 employés. Khelil s'est montré rassurant quant au fait que l'Etat n'allait pas perdre son pouvoir de décision dans les nouvelles filiales Sonelgaz issues de la réorganisation, même si son taux de participation est minoritaire. Or, le plus important aurait été l'annonce du choix opéré pour le cabinet d'audit étranger que tous les opérateurs étrangers et algériens attendaient. Le scandale Enron-Andersen renseigne sur la fragilité des processus de consultations financières si le choix des gouvernements s'avère peu judicieux. Le ministère de l'Energie a évité d'octroyer le contrat Sonelgaz à Arthur Andersen, ce qui est en soi, une crise évitée de justesse.