La pièce a été présentée en compétition par le Théâtre régional de Batna dans le cadre du Festival du théâtre professionnel. L'Histoire ne ment jamais. Elle élabore consciencieusement ses oeuvres. Sans illusions ni chimères elle nous apprend ceci: l'abus de pouvoir est source de tous les crimes. Si les temps anciens l'ont annoncé, le monde moderne le confirme. C'est en somme l'idée qui se dégage de la pièce de théâtre l'Empereur, présentée lundi dernier en compétition, dans le cadre du Festival national du théâtre professionnel, par le Théâtre régional de Batna. Ecrite par Larbi Boulbina et mise en scène par Bouzid Chawqi, la pièce relate l'histoire d'un empereur (Lahcene Chiba). Sous l'impulsion de son conseiller Berg Lah (Kamel Zerara), il gouverne avec une main de fer. En véritable inquisiteur, il impose son dictat. Comme dirait l'historien et philosophe anglais, Emerich Acton, «Un pouvoir absolu corrompt absolument». Ce totalitarisme l'a poussé jusqu'à kidnapper celle qui sera plus tard l'impératrice, son épouse. De leur relation qui a duré quinze ans, l'impératrice (Nadia Larini) n'a cueilli que tromperie et déception. L'empereur devient plus corrompu que jamais. Son despotisme s'est répandu sur toute la terre. Néanmoins celui qui a été son conseiller se tourne contre lui et verse dans la conspiration. D'autres personnes tentent de renverser l'empereur et Berg Lah, sans conscience ni scrupule, marchande avec eux enfonçant son maître dans la mélasse. L'empereur se retrouve seul. Très seul avec lui même. Seul avec ses souvenirs sinistres et lugubres. Seul face à la procession de remords qui arrivent à la queue leu leu. Le passé a ceci de terrible: il admet les erreurs commises au départ pour nous rattraper plus tard. Epouvantable est la justice du temps. Effroyable est sa logique. Face à cette justice implacable, l'empereur tombe sous l'emprise des remords. Oubliant ainsi que les remords sont pareils aux hyènes : ils se nourrissent des restes des plus forts. Mais comme dirait quelqu'un: «Remords: c´est une blessure qui ne guérit pas, un châtiment qui n´en finit jamais.» Ceci résume la situation du personnage face à ses ennemis. Dans la pièce, tout est misé sur les dialogues. Parfois ça atteint les summums du bon sens, d'autres fois ça tourne au loufoque et à l'aberrant. Pour mettre en valeur sa pièce, le metteur en scène a préféré revenir au procédé empreint par le défunt Abdelkader Alloula, à savoir le personnage d'El Goual, le conteur. Tantôt c'est un homme qui intervient (Djamel Tiari), tantôt une femme (Halima Ben Brahim). Ces personnages intercèdent souvent pour clarifier les situations et proposer au spectateur le bout du fil de l'histoire. Le goual, selon la situation, intervient soit avec sa voix ou soit utilisant un instrument musical. Cela a d'ailleurs été rehaussé par la régie lumière qui a été parfaitement maîtrisée. Grâce à cette autre technique, on a réussi à créer de nouveaux espaces scéniques faisant ainsi l'économie du décor. Lequel décor est composé essentiellement de rideaux blancs entourant la scène et formant ainsi une véritable cour royale. Pour ce qui est des comédiens, ils ont interprété leurs rôles avec dextérité et doigté. Ils se sont employés sérieusement à se mettre dans la peau des personnages qu'ils incarnent. Par ailleurs, d'aucuns affirment que cette pièce remportera le premier prix du festival. Néanmoins, il ne faut pas se précipiter ; car d'autres pièces en compétition -à l'instar de la pièce Rah Ikharef (Il délire) du Théâtre régional de Sidi Bel Abbès ou encore Djayeh, Qbih wa majnoun (Idiot, laid et fou) du théâtre régional de Annaba- risquent fortement de lui rafler la mise. Entre ces pièces, la concurrence sera certainement rude.