Le sommet des pays exportateurs de gaz qui doit se tenir le 22 février au Qatar devait revêtir un caractère tout à fait ordinaire. Sauf que la crise russo-ukrainienne en a changé la donne. Cette réunion a, en définitive, pris une tournure qui l'élève au rang d'événement capital pour l'Europe. Une situation résumée par le communiqué de ses organisateurs. Le Qatar accueillera le 22 février un sommet ordinaire du Forum des pays exportateurs de gaz (Fpeg), dont la Russie, sur fond de craintes de l'Europe pour ses approvisionnements en gaz russe, liées à la crise autour de l'Ukraine, a annoncé mardi. Le gaz est devenu incontestablement une arme diplomatique entre la Russie et ses clients européens. Son sous-sol, qui recèle les plus grandes réserves de gaz au monde, la hisse au second rang mondial derrière les Etats-Unis. Environ 40% du gaz importé par les Etats de l'Union européenne proviennt de Russie. Et plusieurs pays de l'UE assurent la totalité de leurs approvisionnements en gaz avec Moscou, comme la Lettonie (100%) ou la Finlande (98%), tandis que d'autres en sont largement dépendants comme l'Allemagne (66%) et la Pologne (55%), selon les chiffres d'Eurostat, direction générale de la Commission européenne chargée de l'information statistique à l'échelle communautaire, en 2020. Les Occidentaux, qui ont affirmé ne pas rester les bras croisés dans le cas d'une invasion de l'Ukraine par la Russie, redoutent donc que la réaction de Moscou ne s'accompagne par la fermeture de ses vannes. «Si le gaz russe n'arrive pas en Europe, en plein hiver, les pays doivent l'acheter sur les marchés internationaux, re-router des cargaisons de gaz liquéfié. C'est plus cher», a fait remarquer Thierry Bros, chercheur à Sciences Po Paris et consultant en énergie. Ce qui pousse l'Union européenne à partir en quête d'alternatives au gaz russe en cas de crise énergétique. Le sommet du Forum des pays exportateurs de gaz est tout indiqué. Le Fpeg compte parmi ses membres, le Qatar, la Russie, l'Iran, l'Algérie, la Bolivie, l'Egypte, la Guinée équatoriale, la Libye, le Nigeria, Trinité-et-Tobago, le Venezuela et sept pays associés qui représentent 70% des réserves prouvées de gaz et 51% des exportations mondiales de gaz naturel liquéfié. La commissaire européenne à l'Energie, Kadri Simson, s'est rendue en éclaireur, le 4 février dernier, en Azerbaïdjan, membre observateur du Fpeg. Les Etats-Unis ont évoqué la possibilité que le Qatar, leur proche allié dans le Golfe, approvisionne les pays d'Europe occidentale si les gazoducs étaient coupés. Riche pays gazier qui dispose d'importantes réserves, le Qatar est néanmoins au maximum de ses capacités de production et il doit déjà honorer des contrats à long terme avec l'Asie. Le ministre qatari de l'Energie Saâd al-Kaâbi a affirmé le 1er février que son pays ne pourrait pas à lui seul sauver l'Europe si la Russie venait à interrompre ses livraisons de gaz dans le contexte de la crise autour de l'Ukraine. Où trouver du gaz en dehors de la Russie? L'Europe pourrait se tourner vers l'Algérie. Elle fait partie, actuellement, des 10 premiers pays producteurs de gaz dans le monde et occupe la première place en Afrique, loin devant l'Egypte et le Nigeria. Un statut qu'elle a conservé malgré la crise sévère qu'a traversé le marché du gaz doublement impacté par la pandémie de Covid-19 et une offre excédentaire. L'Algérie assure, depuis plus de 40 ans, une partie de la sécurité en gaz de l'Europe et s'est toujours acquittée de l'ensemble de ses engagements, avec clarté et fidélité», avait souligné en novembre 2021 Mohammed Hanèche, ambassadeur d'Algérie à Bruxelles et chef de mission auprès de l'Union européenne. Un message dont doit se rappeler l'UE.