Le phénomène de la violence contre les femmes prend de plus en plus d'ampleur en Algérie. Les statistiques avancées jeudi, par les spécialistes renseignent clairement sur la «gravité» de cette situation aujourd'hui. En 2005, 5179 femmes ont été victimes de violences physiques, 277 autres ont subi des violences sexuelles, alors que 64 cas sont liés au harcèlements sexuel. Le psychologue criminologue Farid Bencheikh, qui a participé au colloque sur les «Violences faites aux femmes, du mythe à la réalité» organisé par la Fondation Mahfoud-Boucebci, a qualifié ces chiffres «d'alarmants». Il indique aussi que près de 1600 femmes sont impliquées dans des affaires de criminalité. Parmi cet effectif, a-t-il ajouté, 119 sont des mineures, dont une cinquantaine ont moins de 13 ans. Aussi, les résultats de l'enquête publiés en 2005 par l'Institut national de santé publique (Insp), réalisée sur un échantillon de 9033 femmes démontrent que près de 55% des femmes sont violentées au sein de la famille et 5% sont violentées par leurs propres enfants. Les structures qui ont reçu le plus grand nombre de victimes sont, par ordre décroissant, les structures de santé, les commissariats, les tribunaux et les centres d'écoute. Globalement, le maximum de victimes a été enregistré dans les grandes villes: la capitale avec 10,4%, puis Constantine avec 5,0% et Oran avec 4,0%. Selon les chiffres de l'Insp, plus du tiers des femmes agressées sont célibataires. Les femmes mariées représentent environ la moitié des victimes. Globalement, l'enquête révèle que le lieu principal de l'agression est le domicile: environ les deux tiers des violences y sont commises, soit un taux plus de 50%, où il est censé être un lieu de sécurité. L'étude précise que la violence conjugale est aussi omniprésente. La moitié des violences déclarées par les femmes mariées ont été commises par le mari. Autre fait saillant: les voisins et connaissances tiennent une place non négligeable dans les violences subies par les femmes: plus du tiers des agressions (31,1%). Cependant, ces chiffres sont loin de refléter la réalité puisqu'ils ne représentent, en fait, que le taux des déclarations faites auprès de la médecine légale et/ou recensées auprès de la justice. Le nombre de cas de violence non déclarés est jugé, par les spécialistes du domaine, encore plus effrayant. Force est de constater donc que la courbe est à tendance ascendante. Le Dr Amar Aouchiche, psychiatre, explique que la soumission de la femme est admise par la société algérienne, vu le silence remarqué des victimes, et l'exercice de l'autorité parentale. Pour lui, les traditions sociales incitent la femme victime de viol, à «étouffer» l'agression par pudeur et culpabilité, car, ajoute-t-il, cet acte constitue, un tabou et une honte aux yeux de la société. Il faut souligner que cette situation n'a pas laissé les pouvoirs publics sans réaction. Une stratégie nationale de lutte contre ce phénomène et des structures d'accueil, d'écoute, d'orientation et d'accompagnement des femmes en détresse ont été mises en place.