Des combats meurtriers entre des groupes armés libyens, autour de la capitale Tripoli, ont éclaté dans la nuit de vendredi à samedi, alors que le pays traverse une crise politique majeure qui dure depuis plus d'une décennie. Echanges de tirs et explosions ont ainsi duré toute la nuit, dans les quartiers de la ville, où la population prise de panique tentait de chercher des abris, comme lors de l'attaque menée par le maréchal Haftar en 2020. Les télévisions locales ont montré des images dramatiques de ces affrontements qui ont fait au moins 1 mort et plusieurs dizaines de blessés. Les médias locaux imputent la responsabilité des combats à deux milices influentes dans la région, à l'instar de ce qui s'était produit il y a à peine trois semaines lorsque Fathi Bachagha et son gouvernement parallèle ont dû quitter précipitamment Tripoli, moins de 24 h après s'y être rendus. Le nouvel incident montre à quel point la situation demeure fragile et symptomatique des méandres dans lesquels se débat la Libye depuis 2011, malgré les efforts de la communauté internationale pour parvenir à une sortie de crise. Les tensions sont toujours présentes aussi bien entre l'Ouest tripolitain et l'Est dominé par l'ANL du maréchal Khalifa Haftar et son allié Saleh Aguila, président du Parlement basé à Tobrouk qu'entre les milices qui se font face dans la capitale elle-même au gré des intérêts spécifiques et des calculs politiques des uns et des autres. Il semble que Haftar et Aguila n'ont pas renoncé à imposer le gouvernement de Fathi Bachagha à Tripoli où siège, contre vents et marées, le gouvernement intérimaire issu du Forum du dialogue interlibyen que dirige Abdelhamid Dbeibah. Le coup de semonce précédent a-t-il été mis à profit pour préparer de nouvelles tentatives, sachant que le gouvernement Dbeibah verra son «mandat» achevé fin juin alors que les élections annoncées tardent à se profiler. Né début 2021 sous les auspices de l'ONU et des efforts de la conseillère spéciale Stephanie Williams, le gouvernement de Dbeibah avait pour principale mission la réunification des principales institutions du pays et, surtout, l'organisation des élections présidentielle et législatives le 24 décembre 2021. Contre toute attente, le jeu trouble des parties concernées, à l'Est comme à l'Ouest, a compromis cet objectif pourtant crucial pour le devenir de la Libye et les scrutins ont été renvoyés à des calendes...libyennes sans qu'aucun accord ne se dessine à ce jour pour une quelconque relance du processus de sortie de crise. Les divergences restent profondes et les manoeuvres à la fois sournoises et clivantes, de sorte que les efforts de la communauté internationale semblent vains et que le contexte sécuritaire persiste, dans une inquiétante et durable précarité.