Le classique trafic de carburant continue de sévir dans la région de l'extrême Ouest. De l'ultime point nord-ouest à celui extrême à savoir respectivement Marsat Ben Mhidi et Zouia en passant par Bab El Assa, Souani et Maghnia, les stations-service connaissent un afflux continuel de jeunes et moins jeunes adeptes du moindre effort au volant de voitures à réservoirs à grande capacité. Ils font le plein plusieurs fois par jour, ce qui leur rapporte un bénéfice substantiel qui peut aller jusqu'à 20.000 DA par jour, ce qui explique le manque flagrant en main-d'oeuvre agricole et bâtiment. Les contrebandiers utilisent tous les subterfuges pour transporter la plus grande quantité de carburant par voyage. Cela va de l'utilisation de tout le plancher du véhicule, de type fourgon, comme réservoir, à l'utilisation du même réservoir pour le transport du gas-oil et de l'essence ; selon la disponibilité du produit dans les stations et ce, en roulant en sirghaz. L'important profit qu'engendre le trafic de carburant qui sévit, voilà 20 années dans ces régions, semble attirer et séduire de plus en plus d'adeptes. Ainsi, après les jeunes et moins jeunes désoeuvrés, commerçants et autres fonctionnaires de la région qui se sont abonnés à ce trafic, la région connaît une nouvelle vague de personnes alléchées par le gain facile, lesquelles arrivent de l'intérieur du pays et se lancent dans cette activité de contrebande. Ce sont des citoyens de l'intérieur du pays, séduits par ce commerce illicite, s'implantant dans la région et activant jusque-là dans le trafic de carburant. Ils sont d'Oran, de Mostaganem et même de la région de Sétif, ces nouveaux trafiquants lesquels, selon des éléments de la douane, ne sont pas des plus tendres et ne vont pas de mainmorte pour amasser le maximum d'argent. Activités de nuit Ainsi, une bande originaire et résidante à Oran, qui exerce dans l'activité en question, a été mise, hier, hors d'état de nuire par la brigade de la douane de Marsa Ben Mhidi. C'est à 4 heures du matin que la brigade a intercepté deux camions de type Renault trafic et C 25 à bord desquels 19 fûts et 35 jerricans d'une capacité respective de 200 1itres et de 30 1itres chacun, y ont été découverts vides. Parmi la bande, 2 personnes seulement ont été arrêtées et présentées au parquet de Nedroma, qui les a placées sous mandat de dépôt. Les mis en cause ont avoué revenir de Sidi Boudjenane où ils avaient livré la «marchandise» (environ 4700 litres de carburant) et s'alimenter à partir d'une station-service dans la région de Temouchent. Selon les éléments de la douane, cette bande active uniquement la nuit et se déplace entre Temouchent et la frontière, avec 3 camions remplis de fûts et jerricans. Par ailleurs, les éléments de l'Inspection divisionnaire de Ghazaouet, ont intercepté à Boukanoun (à 500 mètres de la frontière), un véhicule de type R25 transportant 30 jerricans de 30 litres de carburant chacun. Le véhicule spécialement aménagé pour le trafic de carburant, est équipé du seul siège du chauffeur, tout l'espace restant étant dégagé pour les jerricans. Les exemples sont légion parmi lesquels on peut encore citer ce J 5, interpellé par les éléments de la police, qui fait le transport de personnes et dont les sièges sont installés sur un réservoir qui occupe tout l'espace interne du plancher, un réel danger pour les voyageurs et pour 1'économie, ou encore le singulier exemple de ce contrebandier qui a été appréhendé par les éléments de la Sûreté de daïra alors qu'il se dirigeait vers le Maroc avec, à bord de son véhicule de type R21, pas moins de 45 bidons de 30 litres chacun soit au total 1350 litres! Un record qui a surpris les éléments qui l'ont arrêté. Le citoyen continue ainsi de subir les affres du carburant, résultat de la contrebande laquelle ne cesse de prendre de plus en plus d'ampleur et devient une réelle menace pour l'économie du pays. Malgré le nombre important de stations-service que compte la région frontalière (9 au niveau de la seule daïra de Maghnia), l'honnête automobiliste est embarrassé à chaque fois qu'il passe à la station pour s'approvisionner devant des files interminables de voitures dont les réservoirs sont à grande capacité ou carrément modifiés pour contenir, dans certains cas, 1000 litres de carburant. Un ras-le-bol semble se dégager chez l'honnête citoyen mais qui se sent dépourvu de moyens de lutte contre ce fléau qui l'importune et qui le met en danger, comme le cas cité par les habitants de quartiers où des individus se sont improvisés en «vendeurs de carburant» dans leurs propres maisons, mettant ainsi en péril toute une population en cas d'accident, et c'est déjà arrivé à quatre reprises dans lesquels 5 décès ont eu lieu. Deux pleins par jour Tous les moyens sont devenus bons pour les contrebandiers de carburant pour gagner en moyenne 250 DA sur un jerrican de 30 litres. Ce sont des milliers de litres qui traversent quotidiennement la frontière à dos d'âne vers le Maroc et qui sont troqués, au meilleur des cas, contre des oranges refusées pour l'exportation ou des boîtes de sardines ou de thon de qualité médiocre ou douteuse. Les individus issus de toutes les franges de la société s'adonnent à ce trafic qui est en passe de devenir leur principal travail comme ce fonctionnaire, qui voit en cette activité, un appoint de taille qui l'aide à boucler largement la fin du mois. «Deux pleins par soir me suffisent pour toucher presque le double de mon salaire», dira ce fonctionnaire, propriétaire d'une Mercedes ancien modèle. Le visiteur de l'extrême Ouest est frappé par le nombre impressionnant de véhicules de type Mercedes, ancien modèle. C'est, sans conteste, et pour des raisons évidentes, la région où la concentration de ce genre de véhicule est la plus importante au niveau national. Même les véhicules de petite cylindrée ne sont pas épargnés, ils sont utilisés pour le transport des jerricans où leurs réservoirs sont modifiés pour une plus grande capacité. A ce propos, on cite cette Clio qui a été appréhendée transportant 540 litres! Au niveau des stations-service, c'est le désordre et la confusion. Les éléments de la police lors d'un contrôle, ont mis à nu un individu dont le véhicule a réussi à contenir 1000 litres, une quantité faramineuse qui gène énormément le reste des automobilistes lors de leurs approvisionnements. La station a ainsi été fermée sur décision du wali pour un mois, et ce pour lui avoir permis de remplir toute cette quantité. D'autres stratagèmes sont utilisés tels que le refus par des propriétaires de stations-service de servir l'honnête citoyen en avançant qu'il ne reste plus de carburant alors que ce n'est pas le cas pour d'autres. Le bilan est parlant avec la saisie de plus de 25.000 litres de carburant, 150 véhicules saisis et 300 personnes présentées à la justice durant l'année en cours par le seul corps de la police. Si le trafic du carburant, longtemps décrié et condamné pour son impact négatif sur l'économie et sur le citoyen, fait le bonheur des contrebandiers, il profite davantage aux propriétaires de stations ainsi qu'aux pompistes et ce, au détriment du citoyen condamné à se «taper» des chaînes interminables et à celle de sa sécurité. «Malgré des opportunités de travail, j'ai préféré patienter pour décrocher un poste de pompiste», avoua cet ingénieur, pour lequel, ce poste est de loin plus rémunérateur que celui relevant de ses études.