Sur les 11.000 dossiers traités et avalisés par l'Ansej, seuls 4000 sont opérationnels. Investir à Béjaïa n'est pas chose facile. Des centaines de jeunes, qui rêvent d'être un jour à la tête d'une affaire, l'affirment sans ambages. Une sentence qui sonne comme une volonté délibérée de bloquer toute initiative allant dans le sens de réduire le chômage qui frappe la masse juvénile dans notre pays. Ces jeunes investisseurs qui aspirent monter une affaire et profiter de tous les mécanismes mis en place par les pouvoirs publics ces dernières années, vous les rencontrerez, non pas dans les bureaux de l'Ansej qui brillent par une rapidité déconcertante dans le traitement des dossiers, mais devant les guichets de banques à attendre le fameux sésame donnant le droit au lancement du projet tant chéri. Oui! C'est là que se situe le blocage. En effet, sur les 11.000 dossiers d'investissement traités et avalisés par l'Ansej, seuls 4000 sont opérationnels. Les 7000 autres souffrent de blocages à divers niveaux, notamment bancaires. Ces chiffres que nous a fournis la direction de l'Ansej, démontrent, si besoin est, que quelque chose ne va pas dans le processus d'investissement. «Les banques ne jouent pas le jeu», affirment les centaines de jeunes qui font la queue devant les guichets de banque pour s'enquérir de l'état d'avancement du traitement de leurs dossiers. «Ça fait 36 mois que j'attends le chèque», déclarait un jeune, rencontré devant le siège de la Badr à Béjaïa, avant de préciser sur un ton interrogateur: «Pourtant, j'ai rempli toutes les conditions et j'ai même fourni des garanties supplémentaires qui ne sont pourtant pas obligatoires, mais je n'ai toujours pas l'argent dont j'ai besoin pour acheter mon matériel». Des réactions de regret semblables sont légion chez les jeunes investisseurs malmenés par un système bancaire très frileux. «Les banques ne jouent pas le jeu», affirme un cadre de l'Ansej interrogé à ce sujet. Il souligne cependant que: «L'avis favorable de l'Ansej n'est pas systématiquement suivi de celui de la banque». Pour lui, les banques «ont le droit d'accorder ou de refuser un prêt si elles jugent que l'affaire n'est pas rentable». «C'est normal que les banques fassent passer leurs intérêts avant toute autre considération», conclut-il. Autant il est loisible de constater que les banques ne suivent pas l'effort de l'Ansej, autant on leur reconnaît ce droit. Mais que penser du cas de ce jeune qui, après avoir tapé à la porte de la Badr, reçoit un avis favorable signifiant crédibilité et portée de son dossier d'investissement: 26 mois après, son chèque n'est toujours pas signé, alors que lui, avait, entre-temps, engagé d'autres dépenses d'aménagement du local. «Le jour où on m'a informé que mon chèque est prêt et qu'il ne manque plus que sa signature, je me suis dit ce n'est plus à moi de perdre le temps, alors j'ai engagé d'autres dépenses pour mettre en place toute la logistique me permettant de démarrer rapidement l'affaire», indique-t-il avant de regretter «mon chèque n'est toujours pas signé. Aux dernières nouvelles, il passera incessamment devant le comité d'approbation.» Cela fait 26 mois que notre interlocuteur attend. Pendant cette durée, il vous racontera toutes les péripéties induites par le partenaire, telles que la fourniture d'autres garanties. Comme lui, ils sont des centaines, voire des milliers à subir le diktat des banques. «Sans connaissance, vous n'arriverez à rien dans ce pays», déclare amèrement un autre jeune dont le dossier ne serait pas facile à dépoussiérer tant il a trop séjourné dans les tiroirs de sa banque. Il accusera sans réserve les banques de «favoritisme, passe-droit et blocage». Comment faire face à cette situation? C'est là la question que se pose la totalité des jeunes investisseurs. Recourir à la justice ! C'est peine perdue. Un avocat interrogé à ce sujet, expliquait que «ça serait un effort non seulement inutile, mais trop risqué pour l'affaire. La plainte risque d'être refusée et le dossier sera rejeté illico-presto, dès que la banque apprend la mesure», commentera-t-il. Le directeur de l'Ansej, déclarait «ne pouvoir rien faire face à ces situations regrettables ; notre travail se limite à ficeler les dossiers, le reste dépend de l'investisseur lui-même qui doit mener les démarches nécessaires pour faire aboutir son dossier chez le banquier», soutiendra, M.Hammouche. Il faut attendre ou abandonner. C'est là l'unique choix qui reste aux milliers de jeunes tenaces jusque-là, mais, jusqu'à quand? Ils gardent à présent l'espoir d'une hypothétique décrispation de la situation. Les nouveaux changements apportés à la tête de certaines banques, dont la Badr, donnent beaucoup d'espoir aux milliers de jeunes investisseurs de voir leurs dossiers enfin débloqués.