«Le peuple algérien attend que la France reconnaisse publiquement les méfaits du colonialisme», a asséné M.Belkhadem. Après des années de diplomatie «belliciste», la «décolonisation» des rapports entre la France et l'Algérie semble entamer sa déclinaison avec la venue du premier secrétaire du Parti socialiste français (PS ), François Hollande, à Alger sur invitation du FLN. Deux partis et une histoire. Le PS a voté les pouvoirs spéciaux en 1956 pour intensifier l'horreur de la guerre. Le FLN a combattu le colonialisme et a libéré l'Algérie. Les responsables des deux partis se sont regardés «les yeux dans les yeux», ils se sont dit les vérités crues sans tournures diplomatiques. Des vérités considérées comme des tabous pendant des années. En d'autres termes, le FLN et le PS ont crevé l'abcès du contentieux sur l'Histoire entre l'Algérie et la France. «Le peuple algérien attend que la France reconnaisse publiquement les méfaits du colonialisme», a sèchement asséné Abdelaziz Belkhadem, samedi soir à François Hollande, lors d'un dîner à l'hôtel Hilton. Belkhadem a également fait remarquer à son hôte que «aussi douloureux et désagréable soit-il, le passé ne peut être impunément tu». Partant de cette «reconnaissance», les deux parties (partis) s'entendent sur le principe de porter un regard sans complaisance sur l'histoire. Avant Belkhadem, le président Bouteflika a revendiqué avec la même détermination des «excuses officielles de la France». M.Hollande qui s'exprimait au nom du PS a répondu à M.Belkhadem, lors du dîner de samedi soir, que «nous avons une histoire commune, à savoir la colonisation que nous avons condamnée». Il ajoute à propos d'excuses de la France pour le peuple algérien, que son parti a «en quelque sorte fait en condamnant la colonisation à qui il ne trouve rien de positif et en assumant le passé du Parti socialiste français qui a eu la responsabilité dans la guerre au moment où la majorité voulait la paix». Le premier secrétaire du PS a souhaité que «la génération de la libération de l'Algérie passe à une autre étape, celle de l'amitié». Ce langage franc et direct n'était pas possible il y a quelques années. L'entreprise de décolonisation de l'histoire entre les deux pays a été entamée depuis l'année 2000 entre les deux présidents Abdelaziz Bouteflika et Jacques Chirac. Les deux présidents se sont fixé comme objectif de donner à la relation entre l'Algérie et la France un nouveau cours. Le processus a été engagé en trombe avant de buter sur la folie judiciaire de Paris -qui a promulgué la loi du 23 février glorifiant le rôle positif de la colonisation. Du côté d'Alger la réplique a été à la mesure de la folie. La plaie de l'histoire s'est alors brusquement ouverte. Il a fallu que les deux belligérants, le FLN et le PS qui se sont affrontés lors de cet épisode, se rencontrent, se parlent sans se toiser, pour que la décantation s'opère. Si cette dynamique ne s'arrête pas après la présidentielle française, c'est un signe de bon augure pour l'avenir des relations franco-algériennes.