Les Etats-Unis tout comme Israël «participent» activement à l'émergence et à la prolifération des mouvements islamistes radicaux. Accusée tant par Israël que par les Etats-Unis d'être au centre de la crise du Moyen-Orient, la Syrie se trouve aujourd'hui dans une position de pays «attaquable». Le principe de l'attaque a été arrêté depuis longtemps tant par Washington que par Tel Aviv, ne restaient alors que les modalités et le timing de l'attaque. Quand et pourquoi n'étant pas difficile à trouver, il restait à définir, avec précision, les implications d'une agression contre Damas. Dans la théorie, tout était au point, et Damas, tout comme Téhéran, était l'empêcheur de la refonte du GMO et de la stratégie américaine dans la région. Cependant, la guerre contre l'Irak et l'émergence du Hamas en Palestine ont démontré à la coalition israélo-américaine qu'en pratique, les choses étaient beaucoup plus complexes qu'elles n'en ont l'air. Depuis l'assassinat quasi spectaculaire de Rafik El Hariri, Damas s'est subitement trouvée dans l'oeil du cyclone. Les menaces pleuvaient sur elle: soutien aux groupes terroristes, financement et armement de mouvements armés transnationaux, centre de passage des djihadistes en route vers l'Irak, manipulation du président libanais, hostilités ouvertes et actives envers l'Etat hébreu, et on en passe des plus classiques: non-respect des droits de l'homme, Etat-voyou, régime tortionnaire et totalitaire, etc. Il y a quelques jours, le palais présidentiel de Bachar El Assad a été survolé par l'aviation israélienne, ce qui équivaut à un acte de guerre délibéré, un casus belli. La présence de Khaled Mechaâl à Damas est un autre motif de tension: considéré comme un radical par Israël, il est aussi accusé d'être derrière l'idée de kidnapper des soldats israéliens en Palestine et de bien connaître l'endroit de leur détention. D'où l'accusation par Tel Aviv de la manipulation du Hamas par Damas, via Khaled Mechaâl. En fait, trop de pressions pèsent sur la Syrie pour que celle-ci espère s'en tirer sans dommages. Cependant, la situation est si compliquée et les éléments d'appréciation si enchevêtrés que l'on s'étonnera beaucoup si Tel Aviv s'avisait d'attaquer Damas pour de vrai. Jugez-en: la Russie, puissance militaire mondiale encore influente sur la scène internationale apporte toujours à Damas un soutien critique. La Chine aussi adopte envers les pays arabes une politique conciliante et se met rarement sur les mêmes longueurs d'onde que les Etats-Unis, préférant, de loin, suivre l'exemple russe sur ces sujets si délicats du Moyen-Orient. L'Iran, puissance militaire, énergétique et nucléaire dans la région est le nouvel allié de la Syrie, et il n'y a pas très longtemps, Téhéran promettait de punir quiconque s'aviserait de la frapper. Quant on connaît le caractère forgé de Ahmedinejad et l'entêtement de l'Iran -notamment à propos du dernier épisode du dossier du nucléaire- on prend alors très au sérieux la politique de défense des Iraniens. Alors, Israël ouvrira-t-il un troisième front de combat? La réponse dépendra des développements politiques et militaires, du forcing de l'Europe qui reste plus mesurée par sa connaissance du monde arabe et de la position des Etats-Unis, sans lesquels Israël n'est strictement rien de plus que des unités de combat. Cette escalade de la violence sera, quoi qu'il en soit, très préjudiciable à l'Etat d'Israël, qui, planté au coeur de la nation arabe, alimente jour après jour la haine envers l'Etat hébreu. En fait, Israël tout autant que les Etats-Unis d'Amérique participent «activement» à l'émergence et à la prolifération des mouvements islamistes radicaux, qui, à leur tour, demain, porteront la guerre au coeur de Tel Aviv. Car il est une chose qui se dégage de tout ce qui se passe au Moyen-Orient, c'est que les problèmes politiques sont le plus souvent sous-tendus par des motifs religieux. Hier encore, c'étaient des garçons comme cheikh Hassan Nasrallah et Khaled Mechaâl qui nourrissaient l'envie de grandir vite pour porter la guerre au coeur de l'Etat d'Israël. Aujourd'hui, ce sont encore des milliers de jeunes Arabes qui regardent à la télévision les agressions répétées des Israéliens contre la Syrie, le Liban ou la Palestine, et qui vont, demain, porter la guerre et la dévastation en terre d'Israël. De nouveaux Ben Laden regardent aujourd'hui les images des agressions et nourrissent, en silence, l'envie de «faire un sale coup» à la coalition israélo-américaine.