L'appui sans réserve apporté par Washington aux frappes israéliennes contre le Liban change la donne régionale. Parrain du processus de paix au Proche-Orient, les Etats-Unis -quoique soutenant à bout de bras leur protégé israélien- ontnéanmoins fait en sorte que ce soutien ne soit ni trop ostensible, ni pénalisant pour leur stratégie moyen-orientale. Le monde d'une manière générale, les Arabes singulièrement, n'étaient pas en fait dupes de ce difficile exercice d'équilibre que pratique Washingtondepuis des lustres assis entre deux chaises se faisant juge et partie dans un conflit qui perdure depuis près de six décennies. Ce qui a laissé dire à maints analystes et observateurs de la scène proche-orientale que les Etats-Unis n'avaient pas de politique propre pour cette région mais appliquaient, sans nuance, celle d'Israël qui se soucie peu des éventuels dégâts collatéraux pour ses protecteurs américains qui ne manqueront pas d'être, sinon disqualifiés, à tout le moins peu crédibles en tant que parrain d'un processus de paix qui bute depuis des années sur l'intransigeance d'Israël dont l'objectif reste de dicter ses volontés à son voisinage arabe, et palestinien. Prenant à son compte la lecture unilatérale que fait Israël du conflit israélo-arabe, ensoustrayant au débat la cause principale et unique du contentieux -l'occupation par Israël des territoires palestiniens, libanais et syriens- Washington loin d'aider à solutionner un conflit vieux de 59 ans a, a contrario, contribué ces dernières années -notamment par l'usage abusif que fait l'administration américaine du veto- à soustraire Israël soit aux condamnations des Nations unies -rares en vérité- soit pour bloquer des résolutions exigeant d'Israël le respect du droit international comme d'honorer ses engagements envers la communauté internationale. La guerre qu'Israël mène au Liban depuis quinze jours et dans les territoires palestiniens depuis près d'un moins n'est en fait que la conséquence de la démission des Etats-Unis de leur vrai rôle de médiateurs en tant que seule grande puissance mondiale, mais aussi en tant que pays influent écouté, notamment, par ses partenaires arabes. Or, la position, ouvertement pro-israélienne, adoptée par les Etats-Unis depuis l'ouverture des conflits israélo-palestinien, d'une part, israélo-libanais d'autre part, fait plus que douter du bien-fondé d'une politique américaine qui va, c'est le moins qui puisse être dit, à l'encontre des intérêts mêmes de la fédération américaine.De fait, les Etats-Unis se sont singularisés, parmi leurs pairs occidentaux, par leur refus réitéré d'un cessez-le-feu au Liban s'alignant totalement sur Israël qui veut du temps pour détruire sans rémission le pays des Cèdres. Quelques jours plus tôt, Washington a usé de son veto pour bloquer le projet de résolution, présenté par le Qatar, qui condamnait l'offensive et les massacres que commettait -et continue de commettre- l'armée israélienne dans la bande de Ghaza. En tout état de cause les évènements de ces derniers jours mettent en pleine lumière ce qu'est en réalité cet «ami» des Arabes qui n'a pas levé le petit doigt pour inciter son protégé israélien à la retenue. Aussi, quelque part, les Etats-Unis insultent leur propre avenir dans cette région du monde (le Moyen-Orient) dont le seul intérêt qu'elle présente pour eux reste celui d'en contrôler les importants gisements de gaz et de naphte s'appuyant, pour ce faire, sur son gendarme régional Israël et certains régimes arabes prêts à la compromission aux dépens des intérêts de leurs peuples. Peuples qui, au demeurant, sont le dernier souci du nouvel impérialisme américain comme le donnent à voir les événements en Irak et en Afghanistan. Tout cela n'incite guère à l'optimisme d'autant plus qu'au moment où Israël s'est donné pour objectif de détruire et de déstructurer le Liban (principal concurrent d'Israël sur le plan économique et dont le retour au premier plan inquiétait fortement les milieux financiers israéliens), les Etats-Unis ont paradoxalement accéléré la livraison à Israël d'armes sophistiquées que sont les bombes à guidage laser. Pourquoi donnerà Israël ce genre d'armes dont, en principe, n'en sont dotés que les armées américaines, si ce n'est pour lui permettre de poursuivre la dévastation du Liban? Ce qui fait dire à l'influent quotidien américain, New York Time «cela donne l'impression que lesEtats-Unis aident la campagne de bombardements israéliens d'une manière qui peut être comparée aux efforts de l'Iran pour armer et approvisionner le Hezbollah» qui ajoute toutefois, mais la demande d'Israël d'accélérer la livraison de bombes à guidage laser est «inhabituelle pour certains responsables militaires et pourrait indiquer qu'Israël a encore une longue liste de cibles qu'il veut bombarder au Liban» alors même que le Liban n'est plus que champ de désolation. Sur ces destructions, le secrétaire d'Etat britannique aux Affaires étrangères, Kim Howells, peu suspect de pro-arabisme a, dans des propos tenus samedi à Beyrouth et rapportés par les médias britanniques, déclaré «Ce ne sont pas des frappes chirurgicales, c'est très difficile de comprendre le type de tactique militaire utilisée. S'ils poursuivent le Hezbollah, il faut viser le Hezbollah, pas l'ensemble de la nation libanaise». M.Howells a d'autre part déclaré à la chaîne d'information en continue Sky News que les Israéliens «détruisent l'ensemble de l'infrastructure du Liban et tuenténormément de gens.Il est très difficile de voir comment cela va servir les objectifs qu'ils se sont fixés». Justement quels objectifs s'est fixé Israël au Liban qui s'acharne depuis le 12 juillet sur ses infrastructures économiques, administratives, médiatiques, portuaires et aéroportuaires qualifiées de «cibles terroristes» par les généraux israéliens. Il est patent que la guerre que livre Israël n'a pas encore livré ses vérités et les Etats-Unis, complices de fait des massacres à ciel ouvert de l'armée israélienne auLiban et dans les territoires palestiniens occupés, auront sans doute à assumer leur part de responsabilité dans ce déni de droit et surtout les crimes de guerre qui sont commis au vu de tous par Israël au Liban et dans la bande de Ghaza.