Rome a certes appelé à la trêve, mais les participants ne se sont pas mis d'accord sur l'urgence de son application. La conférence internationale sur la crise du Liban qui s'est tenue hier dans la capitale italienne s'est terminée en queue de poisson sans réel résultat concret. Ce qui n'est pas totalement surprenant au vu des positions exprimées par les principaux tenants de la scène politique internationale, notamment les Etats-Unis -qui se sont certes prononcé pour un cessez-le-feu, mais conditionné- et certains membres de l'Union européenne, à l'instar de la France et de l'Italie -co-organisatrice avec les USA de la réunion de Rome- qui appellent en revanche à la mise en place d‘un cessez-le-feu «immédiat». Certes, la conférence de Rome a appelé à la trêve et exprimé son soutien à ce qu'«une force internationale soit autorisée sous le mandat de l'ONU» mais a laissé à des réunions ultérieures le soin de décider des conditions de la mise en place de cette «force internationale», sans parvenir toutefois à préciser sous quelle forme elle sera établie et avec la participation de quels pays. Beaucoup de pays restent en fait prudents et ne veulent pas s'engager formellement. Le seul élément tangible qui ressort de la réunion de Rome est qu'il n'a pas été question de l'apport d'une force placée sous l'égide de l'Otan, comme le réclamaient Israël et les Etats-Unis. De fait, à Rome les Etats-Unis n'ont pas réussi à imposer l'idée du positionnement d'une force de l'Alliance atlantique à la frontière israélo-libanaise. En termes diplomatiques la conférence de Rome s'est, quelque part, achevée sur un échec que personne ne veut assumer au moment où des vies continuent de tomber au Liban - plus de 55 morts ont été recensés hier dans la seule ville de Beyrouth après des bombardement intenses de l'aviation israélienne. La secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, qui avait affirmé la veille à Tel-Aviv que «le temps (était) venu pour un nouveau Proche-Orient» (une reconfiguration qui entre de plain-pied avec le projet cher au président américain George W.Bush de «Grand Moyen-Orient»), a déclaré hier à Rome au cours d'une conférence de presse que des «discussion multilatérales» auraient lieu «au cours des prochains jours» indiquant que «le mandat de la force de sécurité sera discuté au cours des prochains jours. Nous avons demandé une réunion urgente pour que cette force puisse être assemblée», sans préciser ni expliquer ce qu'elle entend par «assemblage» de cette force. Mme Rice qui s'est montrée hostile à un cessez-le-feu «immédiat», a en, fait exprimé les desiderata d'Israël qui veut en finir avec le Hezbollah. La chef de la diplomatie américaine a en effet indiqué: «Nous voulons tous de manière pressante mettre fin à la violence» à ‘'condition'' que ce soit «sur une base qui serait cette fois durable» car «cette région a connu trop de cessez-le-feu qui ont été rompus». Sans autrement préciser ce qu'elle entend par «base durable» pour un cessez-le-feu, demeure toutefois le retrait pur et simple d'Israël des territoires qu'il occupe notamment au Liban. De fait, semblant résumer le sentiment général, le chef de la diplomatie française, Philippe Douste-Blazy, plus direct, a parlé de désaccord en regrettant que la conférence n'ait pu se «mettre d'accord» sur la «nécessité» d'un arrêt «urgent» des hostilités. M.Douste-Blazy a ainsi indiqué: «Nous avons longuement discuté avec Mme Rice. Mme Rice proposait qu'on travaille immédiatement sur une cessation des hostilités. Nous, nous voulions une cessation des hostilités immédiate». «Il n'y a pas eu d'accord et nous nous sommes entendus pour qu'on travaille de manière très urgente sur une cessation des hostilités. Nous aurions aimé le mot ´´immédiat´´ plutôt que le caractère ´´urgent´´, et je l'ai fait savoir», a ajouté le ministre français des Affaires étrangères. Interrogé sur l'appréciation faite par les Américains concernant la proposition, Philippe Douste-Blazy a eu cette réponse, éloquente par ses non-dits, «Ils l'ont regardée, ils ne l'ont pas encore qualifiée». M.Annan, qui a assisté à la conférence de Rome, était encore sous le choc de la mort de quatre membres de la force internationale des Nations unies pour le Liban (Finul) tués mardi suite à un bombardement de l'aviation israélienne, que le secrétaire général de l'ONU a dénoncé comme étant une «attaque apparemment délibérée». Avant la réunion, Kofi Annan avait déclaré que «ce qui est important, c'est que nous quittions Rome avec une stratégie concrète», d'autant plus que Kofi Annan considérait qu'un cessez-le-feu est une «condition incontournable» du déploiement d'une force internationale censée «garantir un retour au calme» à la frontière israélo-libanaise. Il semble bien qu'il n'a pas été suivi puisque rien de réellement concret n'est sorti de la conférence consacrée à la crise du Liban. Toutefois, après «l'incident» qui a vu la mort de membres de l'ONU, la déclaration de Rome a appelé Israël à exercer «la plus grande retenue» dans ses actions sur le terrain sans toutefois condamner l'Etat hébreu. Notons par ailleurs que les pays ayant participé à la réunion de Rome se sont engagés, dans cette déclaration, à aider le gouvernement libanais à «faire face à la situation et à acheminer une aide humanitaire immédiate».