Dans le traditionnel discours sur l'état de l'Union, le président américain n'a, à l'évidence, pas fait dans la dentelle, distribuant bons points et avertissements. George W.Bush est en guerre! Ou plutôt les Etats-Unis sont en guerre, pour ceux qui pourraient encore en douter. C'est sur quoi le président George W.Bush avait particulièrement insisté dans son discours devant le Congrès mardi dans la soirée. Dans son discours sur l'état de l'Union, le président Bush, présentant un sombre tableau de la situation dans le monde, se voulait d'aller droit au but, en pointant d'emblée les pays, selon lui, «hors la loi» et le menaçant «de la colère» des Etats-Unis. Explicite, Bush désigne nommément l'Irak, l'Iran et la Corée du Nord qui «cherchent à se doter des armes de destruction massive» et «représentent un danger de plus en plus grave». Le président américain affirmera ainsi qu'il ne laissera pas «ces trois pays pointer des armes de destruction massive contre les Etats-Unis». Si les Nord-Coréens n'avaient pas encore réagi dans la journée d'hier, Irakiens et Iraniens ont fustigé le président américain rejetant en bloc ses accusations et l'accusant à leur tour. Ainsi, à Téhéran, le chef de la diplomatie Kamel Kharazi a accusé les Etats-Unis «d'ingérence dans les affaires intérieures de l'Iran». Réagissant, Kharazi à déclaré hier: «Nous condamnons les accusations américaines, et pensons que le monde n'accepte plus l'hégémonie et que M.Bush ferait mieux de fournir les preuves de ses accusations (...). Avec ces propos arrogants, le gouvernement américain a dévoilé son vrai visage et prouvé sa volonté d'étendre son hégémonisme au monde entier.» Même réquisitoire à Baghdad qui rejette les accusations de Bush «d'exportation du terrorisme». Accusant les Etats-Unis de «terrorisme d'Etat», un parlementaire irakien n'a pas hésité à répondre du tac au tac indiquant: «Sous prétexte de combattre le terrorisme, les Etats-Unis sont le seul pays au monde, avec l'entité sioniste, à pratiquer le terrorisme d'Etat contre les peuples et les gouvernements qui n'abdiquent pas devant la volonté américaine.» Le député irakien Salem al-Qobaïssi affirme: «Les propos de Bush prouvent clairement la politique américaine hostile aux Arabes et aux musulmans. Ils font partie de la série d'accusations lancées par l'administration américaine pour préparer l'opinion publique à accepter une nouvelle agression contre l'Irak.» Outre ces trois pays, le président américain a également épinglé les mouvements de résistance palestiniens Hamas et le Djihad islamique accusés de «terrorisme». Si M.Bush a fait bonne mesure dans ses accusations tous azimuts pêle-mêle contre l'Irak, l'Iran, la Corée du Nord et les mouvements palestiniens, il ne dira mot sur le terrorisme d'Etat israélien, ni sur les armes de destruction massive, notamment l'arme nucléaire, dont dispose Israël. Ainsi, M.Bush, qui a distribué bons et mauvais points, donne surtout l'impression du maître ayant peu apprécié d'avoir perdu le contrôle de ses troupes. Surtout lorsqu'il évoque «ces milliers de dangereux assassins, entraînés à tuer de toutes les manières, souvent soutenus par des régimes «hors la loi» sont maintenant répartis dans le monde comme autant de bombes à retardement, prêtes à exploser sans prévenir». Le chef de l'administration américaine oublie, miséricordieusement, que ces «assassins» ont, pour l'essentiel, été entraînés et formés par la CIA, sa propre agence de renseignement, et soutenus par le régime américain. Pour ce qui est des Etats «hors la loi», les Etats-Unis, toute première puissance qu'ils sont, sont-ils pour autant qualifiés pour dire qui est «hors la loi»? Et de quelle loi parle M.Bush, du droit international, qu'Israël foule aux pieds chaque jour, ne serait-ce que par son refus de se conformer aux résolutions du Conseil de sécurité sur le contentieux proche-oriental, ou parle-t-il, plus vraisemblablement, des lois américaines que le président des Etats-Unis semble vouloir étendre au reste du monde? Le président Bush a ainsi montré ses muscles à un monde incrédule, parlant de guerre et de mort quand on attendait du responsable de la première puissance mondiale un peu plus d'humilité et de sagesse, lorsque l'on sait que ce sont les services américains qui ont ouvert la boîte à pandore en formant les tout premiers «moudjahidine» afghans à la guerre, au sabotage et à l'assassinat. Le terrorisme international, les taliban, Al-Qaîda et Oussama Ben Laden sont bien l'oeuvre des Etats-Unis. Il est facile aujourd'hui pour un pays comme les USA de se disculper de ses torts pour mieux enfoncer ceux qui, hier encore, étaient ses obligés. Dans son premier discours sur l'état de l'Union, le président George W.Bush a été par trop manichéen pour être réellement convaincant!