Des représentants de l'armée soudanaise ont regagné Djeddah, en Arabie Saoudite, pour reprendre les négociations avec les paramilitaires, a indiqué samedi une source gouvernementale, au moment où la guerre entre deux généraux rivaux entre dans son quatrième mois. Depuis le 15 avril, les combats entre l'armée, dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane, et les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) du général Mohamed Hamdane Daglo, ont fait au moins 3.000 morts, selon l'ONG Acled, spécialisée dans la collecte d'informations dans les zones de conflit. Plusieurs cessez-le-feu ont été conclus ces derniers mois sous l'égide des Etats-Unis et de l'Arabie saoudite, mais les médiateurs saoudiens et américains ont ajourné en juin les négociations après que les cessez-le-feu ont été systématiquement violés.»Une délégation des forces armées est retournée à Djeddah pour reprendre les négociations avec les rebelles des Forces de soutien rapide», a déclaré une source gouvernementale sous couvert d'anonymat, n'étant pas autorisée à parler aux médias. Les FRS n'ont fait aucun commentaire dans l'immédiat sur la reprise des négociations. Cette délégation en Arabie saoudite marque le retour de l'armée sur le front diplomatique, après avoir boycotté lundi dernier des pourparlers de paix à Addis Abeba, en Ethiopie, organisés par le bloc régional de l'Afrique de l'Est (Igad). Le ministère soudanais des Affaires étrangères avait accusé le Kenya, qui préside l'Igad, de soutenir les FSR. Avant la suspension des pourparlers de Djeddah, les médiateurs américains s'étaient montrés de plus en plus frustrés par la réticence des deux parties à oeuvrer en faveur d'une trêve durable. Des experts estiment que les deux généraux rivaux ont opté pour une guerre d'usure, espérant obtenir une victoire militaire, plutôt que pour des négociations. Depuis le début du conflit, les habitants de Khartoum n'ont pas passé un seul jour sans que leurs maisons ne tremblent sous les frappes aériennes, les tirs d'artillerie et les fusillades. Selon un dernier bilan de l'ONU, 1,7 million de personnes ont fui la capitale. Des millions d'autres sont restés bloqués chez eux de peur d'être pris dans les feux croisés de la guerre urbaine brutale. Des témoins ont fait état samedi d'»affrontements avec toutes sortes d'armes» dans le nord-ouest de Khartoum, ainsi que de frappes aériennes de l'armée dans le sud. D'autres ont indiqué que des drones des FSR avaient pris pour cible le plus grand hôpital militaire de la capitale, alors que la majorité des établissements de santé situés dans les zones de combat sont hors service. Selon le ministère de la Santé, quatre civils ont été tués et quatre autres «gravement blessés» dans cette attaque. L'essentiel des affrontements ont lieu dans la capitale et au Darfour (ouest), où vit un quart des 48 millions de Soudanais et où les combats ont pris une «dimension ethnique», selon l'ONU. Jeudi, le procureur de la Cour pénale internationale (CPI) a annoncé dans un rapport au Conseil de sécurité de l'ONU l'ouverture d'une enquête pour crimes de guerre au Soudan, après la découverte d'une fosse commune contenant 87 corps au Darfour. De nouveaux fronts se sont par ailleurs sporadiquement ouverts, notamment dans le sud du pays, où des témoins ont indiqué qu'un groupe rebelle avait pris le contrôle d'une base militaire. Trois mois après le début de la crise, «les lignes de combat se durcissent, rendant encore plus difficile l'accès aux millions de personnes qui ont besoin d'une aide humanitaire urgente», a déploré samedi Martin Griffiths, responsable de l'ONU pour les affaires humanitaires.