La kabylie serait-elle devenue la nouvelle zone de lutte d'influence? Célèbre pour sa beauté, la région de Béjaïa reçoit chaque année de nombreux admirateurs qui viennent y observer et apprécier sa découpe sauvage, ses collines, le bleu profond de la mer et les plages accueillantes. Cet engouement de plus en plus important appelait une réponse aux exigences des visiteurs. Une industrie hôtelière, d'auberges et de restaurants de poisson, a été créée ces vingt dernières années. Mais force est de constater que ces visiteurs ne venaient pas seulement pour cela. Le commerce de la chair en est l'autre principale motivation des «touristes». La prostitution fait, en fait, objet de controverse d'un secteur en pleine expansion. Les stations balnéaires, les villes et leurs banlieues sont autant de lieux où le plus vieux métier du monde s'exerce ces dernières années. Il ne faut pas être connaisseur pour s'apercevoir du manège. Même le jour, cette activité est perceptible. Il suffit pour cela d'observer attentivement le mouvement dans certains endroits devenus célèbres. Mais, c'est à la tombée de la nuit que le paysage prend une autre allure radicale. Les enseignes au néon des restaurants, bars, hôtels, discothèques et autres cabarets vous indiquent le chemin à suivre. Il vous suffit de pénétrer à l'intérieur des différents établissements, pour comprendre que la plupart de ces restaurants, bars et clubs regorgent de prostituées. Elles circulent entre les tables, décolleté plongeant et vêtement ultramoulant, parfumées et maquillées à outrance. Des centaines de filles qui travaillent chaque soir, partout à Béjaïa. Sous une lumière tamisée, sur piste de danse, des dizaines de filles, toutes tailles et tout âge confondus, encouragent le client. Elles sont là à scruter la salle du regard, à la recherche de celui qui les emmèneraient finir la nuit dans une chambre d'hôtel. En Kabylie, ces lieux sont légion. Sans les avoir vus, les femmes et les enfants en parlent car trop souvent un parent, un père y perd la raison. Combien de familles ont été déchirées par ce fléau dont l'apparition en Kabylie n'est que récente. Le fléau est tel qu'aujourd'hui, non seulement il atteint les villages (on a vu des cabarets aménagés dans un village voisin par des familles), mais il reste à l'origine de la montée inquiétante du mouvement salafiste. Et oui, aujourd'hui on est arrivé en Kabylie à qui exhibera sa bière et sa fille de joie, et qui exhibera sa barbe et sa gandoura. Les débits de boissons et d'amour se font concurrence au vu et au su de tous les mouvements intégristes et islamistes. La Kabylie devient-elle la nouvelle zone de lutte d'influence? La question mérite d'être posée si l'on constate la débauche et la prévarication qui s'y exercent. Ainsi, d'après certains chiffres avancés, près de 5000 femmes se prostitueraient en Kabylie, sans compter celles qui le font sous le manteau. Les cellules familiales sont touchés de plein fouet. Gravement déstructurées, certains pères n'ont plus les rênes du pouvoir au domicile. L'appât du gain facile noie les valeurs morales. Les histoires de femmes enlevées par des proxénètes, de fugueuses retrouvées dans des hôtels de passe ou de femmes répudiées contraintes à vendre leur corps, abondent à travers toute la région. Les habitants des lieux les plus touchés par ce fléau ont marqué pacifiquement leur mécontentement. On se rappelle de rassemblements des citoyens de Tichy par deux fois de suite, devant la mairie et la daïra. Mais que peut faire un citoyen face à un phénomène que même les plus grands Etats n'ont pu endiguer. Le risque à présent, est que l'autre partie réagisse par la violence. Récemment, un cabaret situé à l'entrée d'un village dans la vallée de la Soummam, a été attaqué puis complètement saccagé et brûlé par des individus. Le phénomène qu'avait vécu la capitale dans les années 90, est-il en passe de se reproduire ici en Kabylie? L'avenir proche nous renseignera. Mais déjà, des voix s'élèvent pour prévenir de ce cas de figure.