Directement interpellés par les bouleversements régionaux, les états-majors des partis politiques s'agitent. Ils sortent de leur torpeur brisant le statu quo mortifère. Deux initiatives ont été lancées, à quelques jours d'intervalles respectivement par le parti El-Bina de Abdelkader Bengrina et le FFS. Si ces deux offres politiques différent dans leur formulation, l'objectif qu'elles recherchent reste le même: renforcer le front interne à l'heure des menaces d'insécurité directes qui pèsent sur le pays. La particularité de ces initiatives vient d'abord de leurs auteurs, en d'autres termes, de leurs tendances. La première est issue du camp islamiste, El Bina et la seconde de la mouvance démocratique, le FFS. Ce sont les deux grandes tendances, les islamistes et les démocrates, qui animent le paysage politique national. Ces premiers jets feront-ils tache d'huile? Ces initiatives seront-elle suivies par d'autres actions maintenant que la question du Front interne bénéficie d'une exposition politique et d'un grand appui médiatique? L'on com- prend qu'il ne s'agit pas d'un alarmisme ou d'une propagande visant à exalter la fibre patriotique pour inciter les citoyens à geler toute forme de revendications. Loin s'en faut. Il n' y a qu' à regarder autour de notre voisinage immédiat. L'Algérie est dans un cercle de feu. La conjoncture régionale sécuritaire est en effet inédite: à l'exception de la frontière maritime, aucune des frontières de l'Algérie n'est rassurante. Les régimes autoritaires stabilisaient les frontières avec l'Algérie. Or ce «schéma» a cédé la place à une série de coups d'Etat impliquant des recompositions politiques fragiles et incertaines. Le Niger et le Mali en sont les dernières manifestations de ces graves turbulences frontalières puisqu'à la Tunisie vulnérable, le chaos persiste toujours en Libye et le voisin de l'Ouest est irréductiblement belliqueux. À ces considérations purement sécuritaires s'ajoutent les préoccupations des flux migratoires. Une intervention militaire au Niger, comme souhaitée par certains pays, seraient désastreuse sur tout le Sahel et sur l'Algérie qui aura sur les bras des millions de réfugiés avec les conséquences que cela suppose sur les plans sanitaire, humanitaire et sécuritaire. Ces turbulences ont pour ancrage, l'Afrique, un terrain privilégié d'application des principes âprement défendus par l'Algérie. C'est en effet sur le continent africain que les grandes causes algériennes comme le droit des peuples à l'autodétermination et au développement, la lutte pour une communauté internationale plus équitable et un ordre économique plus juste ont trouvé une grande résonance. Une implication qui s'est confirmée et renforcée durant deux décennies à travers une politique étrangère très offensive. Elle s'est manifestée par les efforts inlassables menés par l'Algérie pour faire valoir une solution diplomatique à la crise au Niger et faire éviter à ce pays voisin une intervention, militaire étrangère. L'action algérienne s'est déclinée par une initiative de paix du président Abdelmadjid Tebboune, qui trouve un grand écho régional et international. Placée dans le tourbillon africain marqué par une succession de coups d'Etat et de situations fragiles et instables, l'Algérie n'a plus d'autre choix que d'anticiper les évènements et se prépare à y faire face. L'enjeu est important pour l'Algérie. Il y va de la défense de sa souveraineté, de son territoire de ses ressources et de protéger ses citoyens. En pareilles circonstances, la prééminence à la sécurité intérieure est incontestable. C'est alors que la Défense nationale devient à la fois l'affaire de l'ANP et des services de sécurité, mais aussi du peuple uni derrière son armée. Bien évidemment, il ne s'agira pas de restreindre les libertés individuelles et collectives, sous le fallacieux prétexte que «toute opposition dans un tel contexte fragiliserait les institutions du pays et profiterait à l'ennemi». Naturellement, un équilibre entre la sécurité qu'il faut garantir et la liberté des citoyens qu'il faut protéger sera le meilleur pare-chocs contre les menaces extérieures et la meilleure stratégie de défense.