«Je suis heureux de m'adresser aux élus que vous êtes.» Le ministre de l'Intérieur et ministre du Culte, Nicolas Sarkozy, était l'hôte de la Mosquée de Paris pour partager, avec des musulmans de France, le repas du f'tour. Les convives venaient à peine de prendre quelques dattes et du lait que le ministre fit son entrée sous les flashs des photographes. Dalil Boubakeur, recteur de la Grande Mosquée de Paris, prendra alors la parole. C'est une fierté, dira-il, de partager avec vous ce repas d'el iftar et l'ensemble des membres du Conseil du culte musulman de France se joint à moi pour vous en remercier. Il remerciera également tous ceux qui ont permis l'organisation de cette soirée, des responsables du ministère de l'Intérieur et des «amis» comme Dahmane Abderahmane de l'UMP. Parce qu'elle survient dans un climat d'hostilité contre l'Islam, «aucune autre visite n'aura apporté le réconfort qu'attend la communauté après les agressions contre nos mosquées, certaines caricatures et certaines déclarations tendant à présenter l'Islam comme porteur de violence», ajoute Boubakeur qui aborde ensuite la question du Cfcm. Ce dernier avait connu quelques perturbations mais les différentes organisations membres avaient trouvé, finalement, un terrain d'entente, et une séance de travail avec le ministre de l'Intérieur, tenue la semaine dernière, avait achevé, apparemment la réconciliation. Dalil Boubakeur dira d'ailleurs dans ce sens «le Cfcm est opérationnel et il est prêt à se mettre au service des musulmans de France». Ce fut ensuite à Nicolas Sarkozy de prendre la parole. «Je me réjouis d'être l'hôte de la Mosquée de Paris et je mesure ce que ce lieu représente dans le coeur des musulmans de Paris. Je suis heureux de m'adresser aux élus que vous êtes, une qualité qui vous honore et qui vous engage à l'endroit des cinq millions de musulmans de France. C'est à eux que je m'adresse pour dire ma fierté de partager ce moment privilégié d'el iftar dans une relation paisible entre la République et les musulmans». Il abordera ensuite le sujet de la revalorisation des pensions des anciens combattants musulmans; une décision «qui répare une injustice.» Enfin, il entrera dans le vif du sujet, à savoir l'Islam de France et non «l'Islam en France». S'il s'est impliqué dans la construction de cet Islam de France, affirme-t-il, «c'est pour l'entendre et l'écouter, pour travailler ensemble à un projet commun. Je reconnais que l'islamophobie existe, comme l'anti-sémitisme, mais on ne peut construire un grand pays sans regarder la vérité en face. Hélas vous n'avez pas que des amis; quand une mosquée est bafouée, souillée par des croix gammées, la communauté nationale doit se sentir solidaire, les agresseurs doivent être sévèrement punis et je n'ai pas peur de vous défendre quand vous êtes attaqués, car je respecte les communautés et les religions». Répondant aux accusations de communautariste qui lui sont souvent adressées, il dira: «Oui, les communautés existent, chacun de nous a une histoire, des racines et se réjouit de retrouver sa communauté dans la fête et les épreuves. Des esprits que je qualifierai de bornés m'accusent de communautariste, je dis qu'il n'y a que des Français qui ont le droit d'avoir une histoire et tous appartiennent à la communauté nationale. Vous devez être entendus et écoutés comme citoyens français». Mais pour être écouté, il faut s'exprimer. Le Cfcm, selon le ministre de l'Intérieur, permettra justement aux musulmans de se faire entendre. Je n'ai jamais pensé que la construction de ce conseil était facile mais aujourd'hui personne n'oserait affirmer que le Cfcm doit disparaître. En conséquence, l'accord du 10 septembre dernier est «une bonne nouvelle» pour les musulmans de France. Il esquissera pour conclure, son projet d'organisation du culte musulman. Il proposera aux représentants du Cfcm une mise en oeuvre de la Fondation des cadres musulmans de France, un renforcement du statut des imams, des aumôniers des prisons et des hôpitaux, la création d'une cellule dans son département chargée d'une meilleure organisation du pèlerinage à la Mecque et enfin une réflexion sur les relations des instances du culte avec l'Administration. Pour ce dernier volet et répondant de nouveau aux critiques de l'opposition, Sarkozy dira: «Je suis attaché à la laïcité, une laïcité vivante» qui consacre «la neutralité de l'Etat et la liberté de croire ou de ne pas croire, qui permet le dialogue entre les religions et les pouvoirs publics». Il rassurera la communauté musulmane en s'engageant à éviter «les amalgames odieux contre les musulmans qui ne demandent qu'a vivre en paix».