Sarkozy avait accusé l'Espagne d'avoir procédé en 2005 à la régularisation de quelque 600.000 immigrés. Faisant suite à la conférence internationale sur «Les migrations dans le monde» organisée sous l'égide des Nations unies, voilà une dizaine de jours, l'Union européenne (UE) vient d'inscrire cette même question dans ses priorités pour une rencontre informelle de ses dirigeants, prévue à Bruxelles le 20 octobre prochain. Rencontre qui introduira le sommet des chefs d'Etat et de gouvernement de décembre 2006. Ainsi, la réunion qui a eu lieu, vendredi à Madrid, et qui a réuni, a divers niveaux ministériels, les huit pays de la rive sud-méridionale de la Méditerranée, à savoir la France, l'Espagne, le Portugal, l'Italie, Chypre, la Slovénie, la Grèce et Malte, a mis l'accent sur l'urgence à accorder au traitement de l'immigration clandestine, sans pour autant atténuer les divergences de taille qui opposent les pays membres de l'UE sur l'approche de la question migratoire. A ce titre, le ministre français de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy, a mis en avant la méthode sécuritaire et répressive en plaidant, par exemple, pour le renforcement des moyens financiers et humains de l'Agence de protection des frontières externes de l'Union (Frontex). Il a souhaité une législation commune des pays membres de l'UE pour le traitement des demandes d'asile et les conditions d'accueil des immigrés. Par contre, le Premier ministre espagnol, comme son ministre des AE, Miguel Angel Moratinos, ont défendu une approche humanitaire, sans pour autant ouvrir grandes ouvertes les portes aux flux migratoires. C'est que le turbulent ministre de l'Intérieur français accuse ouvertement l'Espagne d'avoir encouragé l'immigration clandestine en procédant à la régularisation de quelque 600.000 immigrés en 2005 (la fameuse théorie du trou d'air). M.Zapatero lui avait rétorqué, mercredi, pendant un débat au Parlement espagnol, qu'il n'avait pas de «leçons» à recevoir de M.Sarkozy en matière de politique d'immigration, après les émeutes qui avaient secoué les banlieues françaises à forte population immigrée à l'automne 2005. M.Sarkozy s'était déclaré, jeudi, «étonné des déclarations de M.Zapatero, ajoutant notamment: Moi je ne donne de leçons à personne, même si je n'aime pas beaucoup en recevoir non plus». C'est dans ce contexte que la présidence de l'Union, la Finlande, par la voix de son président, Matti Vanhanen, vient d'appeler l'Algérie pour son implication directe dans la concertation Europe-Afrique pour l'examen du problème de l'immigration clandestine et lui a demandé d'activer, en particulier, la clause sur la réadmission contenue dans l'Accord d'association UE-Algérie. Ce reproche, voire cette accusation (de non-respect des termes de l'Accord d'association), paraît peu crédible et gratuit, dans la mesure où le président en exercice de l'Union ne dit pas toute la vérité. Car l'Algérie estime de son côté que ses ressortissants subissent un traitement discriminatoire dans les conditions de leur accès en territoire européen. Les demandes de visa des Algériens à un pays européen sont soumises à consultation à tous les autres pays de l'Union. Ce qui, au-delà de l'allongement des délais, est une infraction au chapitre de la réadmission, contenu dans l'Accord d'association. Par ailleurs, l'Algérie estime que le traitement de l'immigration clandestine et le traitement des flux migratoires d'une manière générale, relèvent d'une responsabilité collective des Etats. Il requiert une concertation réciproque et non un entérinement des seules conceptions européennes. L'Algérie refuse de se constituer en simple gendarme garde-frontière de l'Europe. Tous les pays du monde sont aujourd'hui, à la fois pays d'accueil, de transit ou d'origine. L'approche ne peut être vue sous le seul angle sécuritaire et répressif dont seront chargés les pays du Maghreb. Ce sont là aussi, les raisons pour lesquelles l'Algérie n'a pas participé à la conférence de Rabat de juillet 2005, et que la présidence finlandaise appelle à leur application. Enfin, si la prochaine conférence UE-Afrique sur les migrations, programmée pour le mois de novembre prochain à Tripoli (Libye), sera abordée avec la même conception, c'est-à-dire le seul point de vue européen, il est à parier que les drames de Melilla, Lampedusa et autres enfers des pauvres, seront toujours là.