On en dit trop sur l'athlétisme, pensant que l'Algérie était capable de sortir un Morceli tous les jours. Soixante dix milliards de centimes en dix ans. C'est l'argent qu'aurait «bouffé» la fédération algérienne d'athlétisme en dix ans. Le chiffre a été divulgué, histoire d'épater la galerie, et dire «voyez bonnes gens ce que font ces responsables du sport de l'argent qu'on leur donne». Convenons que 70 milliards de centimes, c'est une belle somme. Cela fait 7 milliards par an et pour une discipline que l'on dit en décrépitude, c'est beaucoup! La prétendue décrépitude a, d'ailleurs, amené le ministère de la Jeunesse et des Sports à prononcer la suspension du président de la Fédération algérienne d'athlétisme et de son bureau fédéral. On a ajouté au tableau l'incontournable «mauvaise gestion». En somme, nous avions affaire à une fédération qui ne travaillait pas, qui ne formait pas et dont les athlètes «dormaient» pendant que ceux des autres pays réalisaient des exploits. Or, ce n'est pas ce que dit le classement que vient de publier la fédération internationale d'athlétisme (Iaaf). On remarque dans ce classement que 8 athlètes algériens sont dans le top 50. Cela signifie, que malgré tous les griefs retenus contre cette discipline, elle continue à bien se porter. La consécration ce n'est pas que la médaille d'or. C'est aussi le privilège de disputer des finales olympiques et mondiales, quand on sait qu'il y a près de 200 pays qui concourent à travers le monde. Quand vous parvenez à une finale parmi les 8 ou 10 qualifiés, il y a de quoi se dire qu'on a franchi un très grand palier. C'est la même chose pour le nageur Salim Iles qui a largement contribué à donner des titres de noblesse à la discipline, même s'il n'a pas remporté de médaille olympique ou mondiale. Huit athlètes algériens parmi lesquels Tarek Boukensa et Issam Nima sont dans le top10 et trois autres dans le top 20. Bien des pays dont les fédérations reçoivent 100 fois ce qui est attribué à la FAA ne peuvent se targuer d'un tel classement. Alors, «mauvais résultats de l'athlétisme», on y repassera. Et puis il s'agit là de la crème des classements, celui qui touche l'élite mondiale. Il n'a rien à voir avec les autres basés sur de pseudo compétitions universitaires, scolaires ou arabes qu'on cherche à présenter comme des épreuves de haute facture. Le top, c'est l'Iaaf, le reste c'est juste bon pour améliorer le menu et amuser la galerie. Et dans l'histoire, 7 milliards de centimes, ce sont bien de la broutille au moment où les Marocains, qui n'ont pas des El Guerrouj par dizaines, tablent, pour leur fédération, sur une subvention annuelle de 15 millions d'euros (150 milliards de nos centimes) tout en disposant du centre de préparation d'Ifrane, depuis des lustres. Maintenant pour revenir aux fameux 70 milliards de centimes déboursés en dix ans, c'est-à-dire depuis 1996, on fera remarquer que, depuis cette année là, l'athlétisme a remporté une médaille d'or aux Jeux olympiques d'Atlanta cette année là (Morceli), une médaille de bronze aux mondiaux de Séville en 1999 (Saïd Guerni), une médaille d'or (Benida Merrah), une d'argent (Sïdi Sief) et deux de bronze (Saïd Guerni et Hammad) aux Jeux olympiques de Sydney en 2000 et une médaille d'or aux Mondiaux de Paris en 2003 (Saïd Guerni). Pour une telle récolte, 70 milliards en dix ans, c'est vraiment de la broutille, surtout si l'on tient compte des estimations de Kamel Guemar, celui qui a été Directeur du sport de performance, durant de nombreuses années et qui, en 2004 à la veille du départ de la délégation algérienne, qui devait prendre part aux Jeux olympiques d'Athènes de 2004, avait déclaré que la préparation d'un athlète pour la conquête d'une médaille coûtait près de deux millions d'euros c'est-à-dire 20 milliards de nos centimes. Une somme que l'Algérie est loin de consacrer.