Depuis malheureusement très longtemps, on n'a fait que se nourrir d'illusions et de chimères. L'athlétisme algérien va-t-il connaître une nouvelle ère où il ne sera question que de développement et de progrès après l'épisode que vient de connaître la fédération qui le gère? Il importe peu de connaître celui ou celle qui va diriger cette instance prochainement. M.Toufik Chaouch Teyara, l'homme qui en a dirigé les destinées ces dernières années avant de subir les foudres du MJS, ne pouvait, malgré toute sa volonté, arriver à redresser une situation complètement déglinguée qui prétendait former des champions sur du vent et de l'illusion. Celui qui vient d'être réhabilité sous l'action de la Fédération internationale savait que ce qu'il faisait ne pouvait aboutir à quelque chose de probant tant que cette situation perdurait. Du reste, son bureau fédéral et lui même ont dressé un tableau guère reluisant sur la discipline et ont élaboré un plan de redressement à travers ce qu'ils ont appelé «plan pour la refondation de l'athlétisme» qu'ils ont déposé sur le bureau du ministre de la Jeunesse et des Sports. Selon ce que nous avons appris de leur part, ils n'ont reçu aucune réponse depuis l'envoi de leur missive. On a énormément parlé du football ces dernières années pour savoir que cette discipline, véritable locomotive de tout le mouvement sportif national, était au creux de la vague. Il est devenu de notoriété publique que le redressement de ce sport passe par une refonte du système qui englobe, avant tout, celle des clubs, véritables socles de l'édifice, ceux sans lesquels il ne saurait y avoir de salut. Il y a des moyens à dégager qui commandent que ces clubs soient restructurés et dotés d'outils à même de se lancer dans un grand plan de développement et de formation. C'est la même chose que l'on peut dire de l'athlétisme, cette discipline vouée au bricolage parce que manquant terriblement de moyens. Il est beau de dire que le pays a suffisamment de pistes pour former des champions. Ces pistes ne sont pas tout le temps ouvertes à ceux qui pratiquent cette discipline. N'avons-nous pas appris que des stades restaient hermétiquement fermés à des athlètes licenciés dans des clubs? Et puis ces clubs disposent-ils des moyens requis pour mener à bien leur formation? Allez faire un tour du côté de Souk El Tenine, dans la wilaya de Béjaïa, où il existe deux clubs d'athlétisme connus pour donner de beaux champions dans les jeunes catégories. Allez voir ces gosses qui s'entraînent avec des bouts de roseaux en guise de javelots, des marteaux bricolés avec du fil de fer, des tapis de réception dans une mousse qui n'existe plus et qui s'exercent sur une piste recouverte d'un tuf rocailleux dans un stade qui doit dater du début du siècle précédent. Des gosses qui, pour la plupart, ont des chaussures trouées et des tenues dépareillées. Il doit y avoir des centaines de Souk El Tenine à travers le territoire national, par conséquent autant de clubs qui perdent en route des champions découragés avant même d'éclore. La faute est à rechercher dans le manque d'une réelle politique sportive dans le pays. On ne peut obtenir des résultats sur le plan international sans un patient et cohérent travail à la base. C'est comme dans le football: on veut une équipe nationale performante alors que notre championnat de l'élite dispose de clubs qui font dans le bricolage. En athlétisme, on croit qu'il suffit d'aller dans le Sud pour trouver des champions. Si tel était le cas, il y a longtemps qu'on écraserait l'athlétisme mondial. Malheureusement on se nourrit d'illusions et de chimères. Nul ne peut avoir la prétention de détenir la baguette magique capable de trouver et de former des champions sans mettre ses neurones à contribution. Il a fallu attendre 2005 pour avoir notre premier centre de préparation en altitude. Ce dernier, qui se trouve à Tikjda, a été érigé, non pas par le MJS, mais par le Comité olympique algérien. Cela faisait des années que l'on se plaignait que le pays gaspillait trop d'argent en envoyant ses athlètes pour une telle préparation à l'étranger. Le centre de Tikjda, qui a reçu l'agrément du CIO, est venu pour apporter une première solution à ce problème. Mais il semblerait qu'il rencontre d'énormes problèmes alors qu'il vient tout juste de démarrer. Au début de l'année en cours, il avait été fermé par le MJS pour une histoire de tuyauterie non conforme. Aujourd'hui, la chaudière que l'on a changée marche le plus normalement du monde avec les tuyaux que l'on avait critiqués et qui se sont avérés bons pour l'emploi. Dernièrement, des athlètes du Mouloudia d'Alger se sont plaints du fait qu'on leur ait coupé l'électricité. Renseignement pris auprès du COA, il semblerait que ce soit le Cnlst (Centre national des loisirs et du sport de Tikjda), propriétaire des lieux, qui ait pris la décision de couper cette électricité pour non-paiement de facture. Le COA a résolu le problème en installant un groupe électrogène très puissant. Il faut savoir qu'à l'origine, ce sont les responsables du Cnlst qui étaient venus voir ceux du COA pour leur demander de s'investir dans la construction d'un centre de préparation à Tikjda parce que l'endroit était dans un état d'abandon depuis la décennie noire de terrorisme. Deux ailes sont construites à Tikjda. C'est le COA qui a bénéficié de la plus atteinte, celle qui avait brûlé et qu'il s'est astreint à rendre commode et habitable après avoir débarrassé l'endroit de tonnes de gravats. L'autre aile, qui est restée sous la coupe du Cnlst, avait, pour ainsi dire, été épargnée par le terrorisme et n'a nécessité que quelques menus travaux de restauration. Pour ce qui est de la facture d'électricité dont on a parlé plus haut, le Comité olympique n'a pas refusé de payer mais a demandé qu'on lui fournisse la facture concernant l'endroit qu'il occupe. En d'autres termes, le plus logiquement du monde, il n'accepte de payer que ce qu'il a consommé comme électricité. En tout cas, ce n'est pas en agissant de la sorte, avec des blocages en tout genre, que l'on va inciter nos sportifs à aller vers ce centre en altitude et il ne serait pas impossible (on en parle même), si le manège continue, que le Mouloudia opte pour le centre d'Ifrane au Maroc. Le Maroc où, justement, on vient d'élire un nouveau président à la tête la fédération d'athlétisme. Patron de Maroc Telécom, ce personnage va avoir pour mission «d'assurer la promotion et la mise à niveau de l'athlétisme». Pour une telle action, la fédération marocaine va signer un protocole d'accord avec son gouvernement qui va lui dégager une enveloppe de plus de 10 millions d'euros (100 milliards de nos centimes) pour un plan de développement de TROIS ans. La fédération algérienne aurait «bouffé» (entendez par là gaspillé), selon des informations, la somme «faramineuse» de 70 milliards de centimes en DIX ans. Dix milliards par an (1 million d'euros) pour une discipline censée former des candidats à des titres olympiques et mondiaux au moment où quelques clubs de football de la division 1 affichent des dépenses de l'ordre de 20 milliards de centimes par saison pour cette seule discipline. Pour les médiocres résultats que l'on connaît. Cependant, aucun des responsables de ces clubs n'est inquiété. Il y en a même qui partent sans rendre des comptes auprès de l'assemblée générale qui les a élus alors que la loi les y oblige. Comme dans le jeu très connu, cherchez l'erreur. Pendant ce temps, on nous demande de faire comme si tout allait bien. Et vogue la galère...