Il doit, le 28 février prochain, présenter son rapport sur le Sahara occidental au Conseil de sécurité. Quelle (nouvelle) voie va proposer le secrétaire général de l'ONU pour sortir de l'impasse sahraouie? En effet, la seule évidence qui caractérise le dossier sahraoui est l'impasse où il s'est enlisé depuis la mise en avant du projet «d'Accord-cadre» ou troisième voie, proposé par l'envoyé spécial du secrétaire général de l'ONU pour le Sahara occidental, James Baker. «Accord-cadre» catégoriquement rejeté par la partie sahraouie représentée par le Front Polisario. Observateur du processus référendaire, l'Algérie avait également rejeté, par les voix les plus autorisées, un «Accord-cadre» qui se signale par le fait de pencher en faveur des thèses du Maroc, dans un contentieux qui demeure, dans son essence, un problème de décolonisation. Ce que confirme le plan de paix des Nations unies pour le Sahara occidental, qui s'inscrit dans le cadre des multiples résolutions du conseil de sécurité sur les questions de décolonisation. De fait, dans un mémorandum au secrétaire général, Kofi Annan, l'Algérie, tout en réaffirmant son attachement au plan de paix de l'ONU, et à l'application intégrale de l'accord de Houston entre le Maroc et le Front Polisario, fait observer que l'ONU semble, insensiblement, prendre une position qui épouse par trop la théorie marocaine sur l'affaire du Sahara occidental. D'autant que, sûr de lui ou de ses soutiens, le roi Mohamed VI n'a pas n'hésité, dans une curieuse déclaration en septembre de l'année dernière, au quotidien français Le Figaro, à affirmer: «Nous avons trouvé une solution à l'affaire du Sahara occidental qui nous empoisonne la vie depuis 25 ans...(par) la reconnaissance, par onze membres de l'organisation des Nations unies de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental... Nous y avons beaucoup travaillé, dans un secret total, durant 18 mois... Dès lors, nous acceptons une solution juste dans le cadre de la souveraineté marocaine.» N'est-il pas singulier que des membres du Conseil de sécurité, dont les seuls référents demeurent la légalité internationale représentée par les résolutions de l'ONU, - qui a consacré depuis le début des années 60 le droit à l'autodétermination des peuples colonisés - aient donné l'aval à un déni de droit au détriment des Sahraouis que l'ont veut priver de leur droit à se déterminer par la voie de la consultation référendaire? L'impasse actuelle découle du fait que le secrétariat général de l'ONU n'a pas su, ou pu, prendre les décisions appropriées après la fin du recensement et l'identification des électeurs sahraouis, et la situation créée par le recours massif marocain. Rabat ayant littéralement noyé la commission de recours de la Minurso (Mission des Nations unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental) par le dépôt de pas moins de 130.000 pourvois. En tergiversant, en ne se montrant pas ferme quant au respect dû au travail effectué par une commission indépendante de l'ONU, Kofi Annan a ouvert la brèche à toutes les supputations, faisant revenir à la case départ une affaire dont d'aucuns estimaient alors la solution sur la bonne voie. En tentant de sauter l'obstacle des recours par un projet d' «Accord-cadre» qui prend pour ainsi dire en charge les revendications marocaines, l'ONU n'aura fait que contribuer à brouiller davantage les cartes, revenant sur des principes qui ont fondé toute la politique de l'ONU sur la question des territoires colonisés. Il ne pouvait pas, à l'évidence, y avoir de solution du problème sahraoui dans «le cadre de la souveraineté marocaine» alors même que le référendum a pour objet de trancher cette demande. En donnant à la population sahraouie de se prononcer sur son devenir en choisissant entre l'indépendance et le rattachement au royaume chérifien. C'est seulement après un tel référendum, et dans le cas-fort improbable de fait - où les Sahraouis choisiraient l'intégration au Maroc, que l'octroi par le royaume chérifien d'une autonomie aux Sahraouis deviendrait un choix interne au Maroc. Mais cela après le référendum d'autodétermination. Nous n'en sommes pas là ! Cependant, peu sûr du résultat d'un référendum effectué dans la loyauté et la transparence, Rabat a tout fait ces dernières années pour obtenir un référendum «confirmatif», selon l'expression du défunt roi Hassan II. Il apparaît bien, au vu de toutes les manoeuvres mises en branle ces derniers mois, que certains membres du Conseil de sécurité veulent offrir au fils ce que le père n'a pu obtenir, faisant pour cela l'impasse sur le légitime droit du peuple sahraoui à s'autodéterminer conformément aux résolutions de l'ONU et au processus référendaire dont les tergiversations de Rabat constituent le seul obstacle à sa réalisation. Selon diverses sources, ayant pris acte de l'impasse où se trouve le dossier sahraoui, Kofi Annan va proposer dans son prochain rapport au Conseil de sécurité (le 28 février) une nouvelle mouture selon laquelle le territoire sahraoui serait partagé entre le Maroc et le Front Polisario. Solution en vérité bancale ne tenant pas compte des faits et dès lors, qui a, peu de chances d'agréer aux parties en conflit, notamment le Front Polisario. Notons que le Maroc exploite déjà depuis son invasion du Sahara occidental, en 1975, les richesses sahraouies. Ce qu'a dénoncé, récemment, le Conseil de sécurité, lequel estime que le Maroc ne dispose d'aucune souveraineté sur ce territoire. En tout état de cause, la nouvelle approche, que l'on prête au secrétaire général de l'ONU, ne serait qu'une nouvelle dérobade à l'application des résolutions de l'ONU, et de la mise en oeuvre de l'accord de Houston entre les parties marocaine et sahraouie. De fait, la seule solution équitable demeure l'organisation d'un référendum loyal pour le peuple sahraoui. La raison finira-t-elle par l'emporter? Réponse au prochain Conseil de sécurité fin février à l'aune des réajustements que présentera Kofi Annan qui doit rectifier le tir pour remettre le processus de paix sahraoui sur les rails.