Les deux partis semblent avoir dépassé l'animosité mutuelle qui les animait depuis leur création. Rabah Kebir, l'ancien président de l'instance exécutive de l'ex-FIS à l'étranger, a rencontré, dans la soirée de jeudi, Boudjerra Soltani, président du Mouvement de la société pour la paix (MSP), au siège de son parti. L'entretien a duré une heure et demie, durant laquelle les deux parties ont jeté «les ponts» d'un rapprochement soutenu. Selon des sources proches de la délégation conduite par Kebir, «la rencontre a été très amicale», voire cordiale. Soltani a exprimé sa «satisfaction de voir les frères revenir dans leur pays, après cette longue absence» et les a félicités. Rappelons que Soltani s'était déplacé à l'étranger pour rencontrer des responsables de l'ex-FIS pour les convaincre de retourner au pays. Il en a parlé tout récemment à la Radio algérienne et donné quelques détails sur les contraintes administratives qu'ils rencontraient au niveau des consulats algériens. Kebir et Soltani ont longuement évoqué les aspects de la réconciliation en cours, mis en exergue les obstacles qui empêchent sa réalisation dans les meilleurs délais. Lors de cette rencontre «préliminaire», selon les termes utilisés, les deux hommes ont fait le bilan de la situation politique et sociale du pays, indique-t-on. Le MSP et l'ex-FIS semblent avoir dépassé l'animosité mutuelle qui les animait depuis leur création. Désormais, «il n'y a plus de rupture» entre les deux partis islamistes les plus en vue et dont le destin de chacun est connu. Ils s'étaient installés dans une concurrence déloyale pendant la dernière décennie, au point que la disparition de l'un devenait vitale pour l'autre. Le MSP semble avoir admis le principe de cohabitation depuis qu'il «trinque» avec les courants de tendance autrefois hostile. Les anciens de l'ancien parti concurrent ont également compris que l'action politique n'est pas uniquement opposition et dénigrement systématiques du pouvoir en place ou de l'opposition; elle requiert concessions, réajustements, rééquilibrages et beaucoup d'audace. Chacun a évolué de son côté jusqu'à admettre la présence de l'autre. Il faut dire aussi que le rôle de Soltani a été prépondérant dans ce rapprochement. Ce dernier n'a, à aucun moment, croisé le fer avec l'ex-FIS. Il était considéré ex-FIS «bon teint» par les mauvaises langues. Il ne peut aujourd'hui que se réjouir d'avoir enterré la hache de guerre de manière durable. Rabah Kébir présente un profil particulier dans la conjoncture de recentrage. Il dit avoir beaucoup appris par la crise. Lorsqu'il a remplacé feu Abdelkader Hachani, après son arrestation en 1991, il a déjà montré les capacités d'un meneur d'hommes. Lors de son premier meeting au stade du 20-Août, rappelle-t-on, il avait ébloui ses fidèles et intrigué les observateurs qui ne comprenaient pas comment l'ex-FIS réussissait à sécréter des tribuns en un tour de main. Aujourd'hui, on a affaire à un Kebir qui a grandi et mûri en exil. Il sait ménager autant ses alliés que ses adversaires. Il va jusqu'à rendre hommage aux militaires nationalistes soucieux de préserver l'Etat des turbulences. C'est un discours totalement en rupture avec les anciennes diatribes de ses pairs. Il est également dialoguiste. Il va vers l'autre même si l'autre en a gros sur le coeur. Il fait du porte-à-porte pour convaincre de sa bonne foi. Les gens l'écoutent. Il marque un pas important dans sa stratégie de repositionnement.