Belkhadem est favorable à la création d'un parti, mais pas dans l'immédiat. Abdelaziz Belkhadem a suggéré à Rabah Kebir de présenter des candidatures aux prochaines élections législatives par le bais de listes indépendantes ou de partis politiques. La suggestion a été faite pendant la longue discussion qu'a eue Rabah Kebir, ancien président de l'instance exécutive de l'ex-FIS à l'étranger, lors de la rencontre dans la soirée de dimanche avec Abdelaziz Belkhadem, secrétaire général du FLN. La rencontre s'est déroulée de 22 heures à 00h40 au siège du parti FLN. Elle a réuni la même délégation qui a accompagné Kebir lors de sa rencontre avec Mehri, en plus du représentant de la Fédération des enfants de chouhadas Ahmed Bensaïd, aux membres du secrétariat national de l'instance exécutive du FLN. Selon Madani Mezrag qui a fait partie de la délégation, la rencontre a été «très amicale», et pour preuve, elle a duré toute la soirée. Le bilan est très satisfaisant. Belkhadem n'est pas contre la création d'un nouveau parti politique, mais il leur conseille de ne pas prendre l'initiative dans l'immédiat. Cela serait peut-être possible dans un an ou plus. La délégation, conduite par Rabah Kebir, a trouvé en Belkhadem un homme très attentif à leurs doléances, un homme très soucieux de la pérennité de l'Etat et de «la réunification des rangs» des Algériens, ajoute-t-on, en somme, «un nationaliste convaincu» qui préfère conjuguer rassembler à diviser. En peu de jours, Rabah Kebir a fait la tournée des grands ducs. Il a rencontré Abdelhamid Mehri, ancien secrétaire général du FLN, Boudjerra Soltani, président du Mouvement de la société pour la paix (MSP), Abderahmane Chibane, président de l'association de Ulémas et compte retrouver l'ancien président de la République, Ahmed Ben Bella. C'est dire qu'il est allé vers les personnalités parmi les plus influentes sur la scène politique nationale. A l'unanimité, ses interlocuteurs l'ont encouragé à poursuivre sa démarche de sensibilisation pour convaincre l'opinion publique sur l'utilité de la création d'un parti politique. Il est vrai que Kebir est allé d'abord vers ceux qui ne cultivent pas d'hostilité apparente envers ce que fut le FIS, d'une manière générale. Mais rencontrer Belkhadem -qui est aussi Premier ministre et supposé être une voix autorisée du président Bouteflika- en un laps de temps aussi court inspire des lectures fort intéressantes. La rencontre de Belkhadem représente la carte maîtresse dans le calendrier que s'est fixé Kebir depuis son retour d'exil et qui pourrait conduire, soutiennent certains, à une rencontre avec d'autres hauts responsables de la République. Rappelons que Belkhadem a été président de l'APN qu'a dissoute Chadli Bendjedid le jour même de son abdication le 11 janvier 1992. Cette décision forcée a empêché Belkhadem d'assurer l'intérim à la tête de l'Etat pendant les 45 jours qui précèdent l'élection présidentielle. La suite est connue. L'Algérie s'est installée dans la crise durable pendant plus d'une décennie. Rappelé aux fonctions par Bouteflika, il est devenu ministre des Affaires étrangères puis ministre d'Etat sans portefeuille puis Premier ministre et patron du parti de la majorité, le FLN. Il est devenu, de la sorte, incontournable dans l'échiquier politique et présente le profil idéal d'un homme de dialogue. On l'a vu à l'oeuvre dans le dossier des salaires, de la révision de la Constitution, des réformes au sein du parti, etc. Toute démarche commence par une idée. Si elle est porteuse, elle nécessite un sacré travail d'explication. Kebir a appris dans l'exil que la politique est «l'art du possible» Hardi est celui qui sait surfer et prendre au bon moment la vague qui mène loin.Les responsables de la crise sont disqualifiés par les textes d'ordonnance d'application de la Charte pour la paix et la réconciliation. Kebir a su, tout au long de la crise, tenir un discours modéré. Avec le temps, la constance du discours s'est avérée payante. Il ne s'est jamais investi dans la propagande terroriste. Lorsque cheikh Chibane lui dit: «J'ai suivi tout votre parcours depuis le début et je sais ce que vous valez», cela n'a-t-il pas une signification que seuls les branchés peuvent décoder?