L'injustice sociale, la répression, l'orgueil colonial, formaient les ingrédients de l'explosion d'une guerre en Algérie depuis des années, s'ajoutaient à ces facteurs le déclencheur du premier novembre 1954 ; « les évènements » du 8 mai 1945 qui fut en réalité un massacre où plus de 42 000 Algériens ont été assassinés par l'armée coloniale. Ils ont été réprimés dans le sang, et laissés à même le sol par l'armée française, dans la plus grande indifférence d'un occupant qui avait parfaitement réservé toute son attention à célébrer la victoire sur le nazisme. Une victoire acquise grâce à ces Algériens même qui ont cru en cet occupant de retrouver leur liberté en échange de leur engagement pour combattre l'armée d'Adolphe Hitler. Une promesse sans lendemain, véhiculée par un impérialisme dont l'humanité souffre de pauvreté et n'a d'égard que pour ceux qui portent les mêmes gènes. « L'accumulation de tant de haine et d'abus a nourri la résistance qui d'ailleurs n'a jamais cessé pour répondre à une révolte nationale à l'appel du FLN pour que les premiers coups de feu de la guerre fussent tirés », nous a confié « Aâmi Mahfoud », un ancien moudjahid de son vrai nom Charak Mahfoud, né en mai 1938 à Ouled Boufaha dans la région de Jijel. Avant de rejoindre l'Armée de Libération nationale, soit avant 1954, il était un membre actif au sein du « Mouvement national ». Il étudiait la langue arabe chez un enseignant très apprécié dans sa dechra Benatik Lakhdar. Quatre mois après le déclenchement de la guerre de libération, il décide lui et quelques compagnons de la même région de rejoindre les moudjahidine sous la coupe de Bouali Messaoud. Ils étaient entre 10 et 12 éléments. Ce groupe fut ensuite divisé en deux vers le mois de février 1955. Le sien comptait Sekine Ahmed Benmohamed, Mesrene Hocine, Charak Abdelhamid, Saïd et lui-même. Il s'est fait d'abord confier des missions de surveillance des armes, le courrier et notamment d'avoir un œil sur l'activité de l'armée française. Pour rejoindre les maquis, il voyage à pied jusqu'à Constantine, pour prendre le chemin ensuite vers Annaba là ou il accomplira une opération militaire « fidaiya ». Il a été arrêté, ainsi que plusieurs autres fidèles. Il n'échappera pas à la torture et la violence de l'armée française. Relâché, quand même après des mois, il fut envoyé vers Tébessa à Kuif exactement, avec Bouchuite Youcef, Tabouche Mustapha et d'autres. Il reçoit un entraînement militaire intense sur toutes les armes possibles et son histoire commence avec la révolution. Il nous citera des détails et des noms que ne nous pouvons pas tous rapporter ici. Des zones où il a servi, ses missions, dont la plus importante était de soigner les blessés à El Tarf et Souk Ahras. Des régions qui abritaient les moudjahidine. Il a rencontré les plus hauts cadres de la Révolution, comme Boumediène, Saâdi Salim, Ali Mendjeli et bien d'autres. Il a abordé les problèmes survenus avant le 20 août 1955 et la mauvaise tournure qu'allait prendre la Révolution. Ces deux dates pour Aâmi Mahfoud sont venues corriger la trajectoire de l'histoire de la Révolution, la France était sur le point de réussir à faire échouer tout ce qui a été construit depuis le premier novembre 1954. Les opérations militaires de l'ALN sont alors intervenues contre les colons pour marquer un retour décisif de la Révolution que plus rien n'allait pouvoir arrêter les moudjahidine avec le fort soutien du peuple. L'illusion de l'Algérie française s'est totalement dissipée. Dans le Nord- constantinois comme partout dans le pays, la guerre a pris son envol a partir du 20 août 1955 avec l'un des plus grands stratèges de la révolution Zighoud Youcef, qui fut l'architecte des opérations du 20 août 1955.