Le scrutin du mid-term a été fatal pour l'administration républicaine et une défaite personnelle pour Bush. Les traditionnelles élections qui marquent la moitié du mandat présidentiel américain ont été une véritable déconfiture pour l'hôte de la Maison-Blanche, qui s'est pourtant largement investi dans la campagne électorale pour tenter de sauver ce qui pouvait l'être encore. Hélas! Les résultats sont là et témoignent de l'ampleur de la défaite de George W.Bush tant à la Chambre des représentants, ou les démocrates retrouvent la majorité perdue depuis une douzaine d'année, chez les gouverneurs, où ils reprennent la majorité dans les 50 Etats, qu'au Sénat où les démocrates sont en ballottage favorable dans les deux circonscriptions (Virginie et Montana) qui restent à pourvoir et dont les résultats définitifs ne sont pas encore connus. Cette déroute des républicains est, en fait une défaite personnelle du président Bush qui aura à gérer une fin de mandat difficile pour ce qui reste de sa magistrature à la tête de l'Etat fédéral. D'ailleurs, la Maison-Blanche a reconnu, dès mardi soir, la victoire des démocrates aux élections du Congrès. Faisant contre mauvaise fortune bon coeur, la Maison-Blanche a, toutefois, fait part de «sa volonté» de collaborer avec la nouvelle majorité à la Chambre des représentants. En fait, le président Bush est bel et bien coincé et il ne semble pas qu'il ait d'autre alternative que de trouver des compromis avec les démocrates. Le porte-parole de la Maison-Blanche, Tony Snow, avait indiqué en effet: «Nous pensons que les démocrates contrôleront la Chambre (...) et nous attendons de travailler avec les dirigeants démocrates sur les questions prioritaires: gagner la guerre en Irak et plus largement la guerre contre le terrorisme et maintenir notre économie sur la voie de la croissance.» De fait, notamment en ce qui concerne la guerre en Irak, la secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, avait affirmé, dès lundi, sa détermination à travailler avec les démocrates en cas de défaite des républicains. Et c'est justement l'Irak, et la façon dont la guerre y est menée, qui ont eu raison, pour une large part, de M.Bush. Mais il n'y avait pas que l'Irak qui est cause de la déroute républicaine, la gestion chaotique des affaires de l'Etat, les nombreux scandales qui ont émaillé le second mandat de George W.Bush ont eu des retombées négatives que l'hôte de la Maison-Blanche a dû payer cash. De fait, dans un éditorial paru hier, le New York Times résume ainsi l'échec de Bush en indiquant: «Il n'y a qu'une explication pour le patchwork de victoires à travers le pays qui ont donné aux démocrates le contrôle de la Chambre des représentants: un puissant cri de défiance à l'encontre de la Maison-Blanche, de Bush et contre la façon dont les républicains ont mené le Congrès». L'échec des républicains à conserver la mainmise qu'ils avaient sur le Congrès (Chambre des représentants et Sénat) et sur les gouverneurs des Etats annonce deux années calamiteuses pour George W.Bush qui aura à composer avec les démocrates et surtout à trouver des compromis avec l'opposition démocrate pour chaque affaire qui engage l'Etat fédéral, à commencer par la guerre en Irak, pour laquelle les démocrates sont déterminés à lui faire changer de cap. C'est ainsi que Nancy Pelosi, représentante de la Californie, et probable présidente de la Chambre basse du Congrès, a affirmé, dès la confirmation de l'avancée démocrate, que «les Américains ont voté aujourd'hui pour un changement et pour que les démocrates fassent prendre une nouvelle direction à notre pays (....) Les Américains ont été très clairs: il nous faut un changement de direction sur l'Irak. Persister (dans la politique actuelle) n'a pas rendu notre pays plus sûr, n'a pas honoré nos engagements envers nos soldats, et n'a pas renforcé la stabilité de la région du Moyen-Orient», a-t-elle indiqué depuis le quartier général des démocrates à Washington. M.Bush qui a, durant six ans, dirigé les Etats-Unis avec une majorité républicaine qui lui était toute acquise, du fait aussi qu'il avait eu tout le Congrès derrière lui (y compris les démocrates) après les attentats du 11 septembre, n'a su ni fructifier ce consensus national, ni savoir faire bon usage des atouts qu'il avait alors à disposition. En revanche, George W.Bush a été arrogant dans ses rapports avec l'opposition démocrate, méprisant envers tous ceux qui mettaient en doute sa politique étrangère, désagréable avec la communauté internationale, singulièrement à propos de l'attaque qu'il a décidé contre l'Irak, attaque et invasion qui donnèrent lieu à une guerre qui rappelle aux Américains le cauchemar qu'ils ont vécu avec le drame vietnamien. Aussi, avec un Congrès où la donne a changé, il n'est pas évident que M.Bush ait toute la liberté d'action à laquelle il était accoutumé et risque même de devenir ce que les Anglo-Saxons qualifient de «canard boiteux», c'est-à-dire quelqu'un qui est poussé à l'inaction jusqu'à ce qu'il soit remplacé. Le sort qui pourrait être celui de M.Bush avec encore deux ans à tirer pour terminer son mandat présidentiel.