Kerry a téléphoné à son adversaire et a reconnu sa défaite sans attendre le décompte final, pourtant décisif, de l'Etat de l'Ohio. Finalement le suspense aura été de courte durée. Le scénario cauchemardesque de la Floride en 2000 ne sera pas réédité dans l'Etat de l'Ohio. Il y quatre ans, il avait fallu, en effet, attendre 36 jours pour que Bush soit proclamé vainqueur face au démocrate Al Gore, avec seulement 300 voix d'écart. Cette fois, quelques heures seulement ont suffi pour que l'adversaire de George W. Bush se résigne à jeter l'éponge. Même si les résultats dans l'Ohio, Etat pourtant décisif, ne sont pas encore définitifs, le président sortant a remporté un second mandat de quatre ans à la Maison-Blanche. Hier, en fin d'après-midi, son rival démocrate, John Kerry, a reconnu sa défaite sans attendre le décompte final de l'Ohio. Alors que l'Amérique redoutait une nouvelle attente de plusieurs jours avant de connaître le nom du nouveau président, John Kerry a téléphoné au président sortant pour le féliciter pour sa réélection. À 13h, heure locale à Boston (19h à Alger), il s'est exprimé en public : “Nous avons eu une bonne conversation, et nous avons parlé du risque de division dans notre pays, et de l'indispensable besoin d'unité pour trouver un terrain d'entente, nous rassembler”. Avant de préciser devant ses partisans : “Je n'abandonnerais pas ce combat s'il y avait une chance que nous l'emportions. Mais il est maintenant clair que même quand tous les votes par précaution seront comptés, nous n'aurons pas assez de suffrages pour emporter l'Ohio et donc nous ne pouvons pas gagner cette élection”. Peu de temps auparavant, John Kerry s'était réuni avec ses conseillers dans son fief de Boston. Après avoir examiné soigneusement les chiffres de l'Ohio, il s'est rendu à l'évidence : Bush le devançait largement dans cet Etat du Midwest. Les démocrates ont dans un premier temps réclamé que chaque voix soit comptée dans l'Ohio, dont les 20 grands électeurs étaient décisifs pour obtenir la majorité de 270 élus au sein du collège électoral qui désignera le prochain président des Etats-Unis. L'entourage de Kerry venait ainsi confirmer les déclarations du secrétaire général de la Maison-Blanche, Andrew Card, qui avait affirmé en début d'après-midi (heure algérienne) que les républicains “étaient convaincus que le président Bush avait remporté l'élection”, soulignant que Bush disposait d'un avantage “statistiquement insurmontable” dans l'Ohio avec 130 000 voix d'avance. Les électeurs américains ont ainsi renouvelé leur confiance au président sortant malgré les attaques répétées de son adversaire sur son bilan en Irak et dans la lutte contre le terrorisme. Cerise sur le gâteau, les républicains ont en même temps gardé et même renforcé les majorités dont ils disposaient déjà dans les deux Chambres du Congrès américain. Car lors de ce scrutin, les Américains élisaient aussi un tiers du Sénat et une nouvelle Chambre des représentants. De manière globale, l'élection aura donc consacré un enracinement des républicains et une remarquable unité du pays autour de son président sortant. Car, malgré un premier mandat marqué par les attentats du 11 septembre 2001 et la guerre en Irak, seulement un seul Etat a changé de couleur politique, le New Hampshire en votant pour le candidat démocrate. John Kerry aura eu beau accuser son rival d'avoir perdu des emplois et envahi inutilement l'Irak, il n'a pas réussi à convaincre les électeurs qu'il avait la carrure nécessaire pour diriger un pays qui se considère en état de guerre. Assommés, les démocrates vont devoir maintenant remonter la pente et vraisemblablement se chercher un nouveau leader. Des analystes affirment d'ores et déjà que la carrière politique de l'adversaire de George Bush est finie. Certains murmurent déjà le nom de Hillary Clinton pour l'élection présidentielle de 2008. Quant à George W. Bush, il doit maintenant tenter de sortir les Etats-Unis du bourbier irakien et de réconcilier son pays avec la communauté internationale ou juguler le déficit budgétaire abyssal. D'autant que de nombreuses capitales avaient caressé l'espoir de voir une administration plus conciliante arriver au pouvoir à Washington. À l'exception du Premier ministre britannique, Tony Blair, et de ses homologues italiens, Silvio Berlusconi et australien John Howard, ainsi que du président russe, Vladimir Poutine, (qui s'était pourtant opposé à la guerre en Irak), les autres dirigeants étrangers espéraient sans doute une victoire de John Kerry. R. B