Le pouvoir aurait délégué cette semaine un émissaire secret auprès de Hocine Aït Ahmed pour évoquer la participation du FFS aux prochaines élections législatives. Selon diverses indications, le pouvoir aurait dépêché un émissaire secret vers Genève pour prendre langue avec le leader du FFS qui aurait donné un accord préalable à cette rencontre. Depuis le début de l'année, le chef du FFS est au centre de multiples tractations dues au retour en force de son parti en Kabylie et où certains dirigeants politiques veulent lui faire jouer le rôle de «stabilisateur». L'enjeu étant que le FFS se prononce, à travers son chef historique et son principal décideur, sur la participation aux élections législatives prévues durant ce premier semestre, et donner ainsi un signal fort à la participation en Kabylie. Ces contacts interviennent également au moment où le Président Bouteflika invite les ârchs au dialogue après avoir laissé au Chef du gouvernement, Ali Benflis, toute latitude de négocier avec eux la plate-forme d'El-Kseur. Au même moment, des émissaires du pouvoir ont rencontré des délégués de la Cadc, dont les radicaux affiliés à la tendance Belaïd Abrika, pour les ramener à de meilleurs sentiments à l'égard du processus de dialogue. La réponse de ces derniers a été franchement hostile, ce qui a précipité la rencontre avec les dialoguistes de Salim Allilouche qui se retrouve ainsi investi d'une nouvelle responsabilité politique: convaincre les citoyens en Kabylie de participer aux élections et éviter, ainsi, un boycott qui se dessine dangereusement dans les wilayas concernées. Cette contrepartie politique de Allilouche et les dialoguistes ne sera qu'un renvoi d'ascenseur au gouvernement après que Benflis eut lâché beaucoup de lest dans les négociations sur les points litigieux de la plate-forme d'El-Kseur. Mais pour favoriser une participation correcte de l'électorat kabyle, le pouvoir a besoin de l'apport des partis politiques de la région. Si le RCD s'est disqualifié avec la montée au créneau d'un Saïd Sadi, prêt à en découdre avec les services de sécurité sur l'affaire de l'«enlèvement» d'un militant du parti, ce qui a fini par altérer ses rapports avec le pouvoir, le FFS se retrouve, indirectement, au centre d'un intérêt croissant. Trois aspects plaident pour que le FFS donne une suite favorable à ces sollicitations. D'abord, l'hostilité affichée d'Ahmed Djeddaï et tout l'appareil du parti aux ârchs, qu'ils soient dialoguistes ou radicaux. Le FFS a qualifié les premiers de «dialoguistes taiwan» et les seconds de «radicaux populistes», une manière de condamner toute transformation du mouvement citoyen en une force de proposition politique. Ensuite, le fait que Aït Ahmed et les principaux cadres du parti ont changé de perception quant aux élections. L'expérience de la participation au sein de l'APN durant les cinq dernières années a permis aux partis une plus large audience populaire à travers la tribune de l'Assemblée. Même constat quant à la présence dans les APC/APW, où le FFS fait l'expérience de la gestion locale. Enfin, l'essoufflement au niveau international, puisque malgré la mobilisation autour du rejet de l'accord d'association Algérie-UE, menée par les socialistes et les Verts européens ainsi que des ONG des droits de l'Homme proches des thèses du FFS, le parti d'Aït Ahmed a été contraint de se recentrer sur les questions nationales, sinon locales, du moment que certains sondages lui donnent une opportunité réelle de bien figurer lors des prochaines élections. Même si le leitmotiv actuel du FFS est de privilégier «le rétablissement de la paix» aux élections, Hocine Aït Ahmed sait que sa formation ne doit pas demeurer en marge de la dynamique électorale qui agite déjà les partis rivaux tels que le FLN, le RND ou le MSP. De Genève, Aït Ahmed n'a qu'un mot à dire pour que le FFS se mette en ordre de bataille, ce qui pourrait largement atténuer la crise en Kabylie dont le pouvoir espère le dénouement avant le lancement des élections législatives.