C'était prévisible, mais l'entêtement des uns, l'incompréhension des autres et surtout l'opportunisme de certains ont fait que les intérêts personnels sont passés avant ceux du sport national. Du coup, il ne fallait pas être étonné de la prévisible sanction qui allait être prononcée à l'encontre de la Fédération algérienne d'athlétisme (FAA). Suspension de la FAA de toutes les compétitions internationales avec effet immédiat. Voilà donc où mènent les chemins de l'aventurisme et les décisions impulsives. L'athlétisme, seule discipline sportive nationale qui renferme des champions du monde et olympiques, est ainsi traînée dans la boue. L'information, attendue certes, a eu un effet d'onde de choc auprès des Algériens, qui ne comprennent pas comment est-on arrivé à cette situation extrême, alors que l'on pouvait largement éviter cette sanction, considérée, à juste titre, comme une humiliation, non pas pour le sport seulement, mais pour tout un pays. L'Algérie, qui a de tout temps lutté pour un sport loin de toutes les convoitises politiques et des intérêts personnels, se retrouve empêtrée dans une situation pour le moins cocasse, car elle se développe au moment où l'Etat se mobilise pour organiser les prochains Jeux africains. Une telle sanction n'est pas faite, il faut le dire, pour revaloriser l'image du pays et d'un sport qui a constitué une locomotive en matière d'émancipation. S'il est vrai que notre sport connaît des moments difficiles, surtout en matière de résultats et de relève, en parallèle, il n'avait nullement besoin d'un geste gratuit, comme celui dont vient d'être l'auteur le ministère de la Jeunesse et des Sports. Il faut dire que l'athlétisme n'est pas le seul sport qui se trouve confronté à cette situation. D'autres disciplines se trouvent dans le même cas, à commencer par le football, qui a failli connaître la même situation. La médiatisation faite autour de la fédération de football et l'impact de cette discipline dans les milieux sportifs ont laissé peu de champ de manœuvre au ministère de la Jeunesse et des Sports, qui a dû faire marche arrière, à quelques jours du délai imparti. Mais cela ne veut nullement dire que la partie est abandonnée, puisque d'autres injonctions ont eu lieu, depuis, pour inviter la fédération de football à s'aligner sur la nouvelle loi du sport national. C'est dire que le risque est encore présent. Guidoum introduit un recours Le ministre de la Jeunesse et des Sports, Yahia Guidoum, n'a pas tardé pour réagir, en affirmant, hier, qu'« un recours sera introduit, car aucun article des règlements de l'IAAf ne prévoit une telle suspension ». M. Guidoum ne manquera pas de dire que son département va saisir les tribunaux pour régler cette affaire. Or, selon certaines sources, les décisions de l'instance internationale sont sans appel et seul le retour à la légalité et au respect des textes peuvent assurer un retour à la normale. Il faut dire que le ministre de la Jeunesse et des Sports a fait cette déclaration au moment où se tient la première réunion du groupe de travail ministériel africain sur les relations entre les Etats et les fédérations sportives internationales. Organisée par le Conseil supérieur du sport en Afrique (CSSA), la réunion d'Alger est motivée par la nécessité de « lever le paradoxe de juxtaposition des ordres juridiques nationaux avec la réglementation sportive internationale et d'annihiler ces velléités d'interférence dans les affaires sportives internes aux Etats dans leurs relations avec les mouvements sportifs nationaux », a dit le ministre. Le ministre a souligné, en outre, l'importante contribution des Etats africains dans « le financement de la haute compétition (...), parfois au détriment du développement d'autres secteurs d'activités ». « Il s'agit, en fait, de souveraineté nationale. Peut-on parler d'ingérence lorsqu'un Etat prend des mesures adéquates pour garantir et veiller au respect des législations nationales et internationales, assurer la transparence dans la gestion des organisations sportives nationales et contrôler l'utilisation des ressources qu'il met à leur disposition ? », s'est interrogé le ministre. Pour M. Guidoum, les fédération sportives accomplissent une « mission de service public et ne sauraient se soustraire au devoir de rendre compte, sous le prétexte de leur affiliation aux organisations sportives internationales ». Le ministre a, enfin, appelé ses homologues africains à « harmoniser leurs positions et à réagir ensemble » pour régler « les problèmes que rencontrent certains de nos pays menacés de voir leurs jeunesses privées de rêves et d'espoir quand est brandi le gel de la participation des équipes nationales à toute activité internationale ». Il était clair qu'il fallait comprendre que c'est la situation du sport en Algérie qui pose problème en ces moments précis, avec l'introduction de nouveaux textes permettant à l'Etat, de par les membres désignés imposés aux fédérations sportives, d'avoir la mainmise sur l'activité sportive du pays. C'était tellement clair que les présents à la réunion d'Alger n'ont pas hésité à rédiger une... motion de soutien à la Fédération algérienne d'athlétisme. Hier soir, le ministre a tenu une conférence de presse au cours de laquelle il a notamment déclaré : « Ce n'est pas le président de l'IAAF qui a suspendu la FAA, mais c'est… L'histoire le dira. » La course ne fait que commencer.