La grogne des professeurs de l'université et des lycées techniques exprime un ras-le-bol réel, difficile à contenir. Les enseignants du supérieur iront en guerre pendant une semaine, à compter d'aujourd'hui. Ils comptent faire entendre leurs voix contre ce qu'ils dénoncent comme «l'instrumentalisation de l'appareil judiciaire dans la gestion des conflits sociaux». Cette semaine de protestation avec arrêt de travail sera étalée sur le mois de février et mars de l'année en cours. Cette répartition est faite en tenant compte du souci de «préserver un maximum de cohérence pédagogique et particulièrement celle des TP». Ainsi, le moteur de la protestation fonctionnera le 17 février 2007, 25-26 février ainsi que les 6, 7 et 8 mars. Cette semaine d'arrêt de travail est décidée à l'issue de la réunion de la Coordination nationale du conseil des enseignants du supérieur, tenue les 11 et 12 janvier, à Alger. Cette montée au créneau des professeurs de l'université explique un ras-le-bol et un bouillonnement difficiles à contenir à coup de promesses. Le noeud du problème n'est autre que «l'usage de la justice dans la gestion des conflits sociaux». Cela a pris corps lorsque le ministère et des recteurs d'université ont décidé de porter plainte contre des enseignants grévistes. Ainsi, plusieurs professeurs ont été destinataires de convocations pour comparaître devant la justice. D'autres font toujours l'objet de poursuites judiciaires, chose ayant provoqué les foudres du Cnes. Au moins huit (08) enseignants, selon le Cnes, ont payé les frais de la grève ouverte du 13 mai 2006. L'usage de l'appareil judiciaire «a montré autant son inefficacité et surtout sa nocivité comme réponse aux revendications syndicales», lit-on dans un communiqué diffusé, hier, par le Cnes. Lequel syndicat est allé encore plus loin dans son réquisitoire. Il laissera entendre que ce «legs du gouvernement Ouyahia devrait être abandonné définitivement et au plus vite pour laisser place à la négociation comme moyen civilisé de règlement des conflits». Ni l'augmentation des salaires, encore moins le projet de statut particulier ne sont concrétisés, regrette le Cnes. Ces revendication se sont avérées être «une promesse trompeuse au moment de la grève». Même le désistement des logements conventionnés au profit des enseignants, «s'est avéré être, dans les faits, une supercherie destinée uniquement à permettre à l'administration des Opgi de récupérer les loyers impayés». Cela démontre l'échec pur et simple de la politique de fuite en avant entreprise par le département de Rachid Harraoubia. Les enseignants des lycées techniques croiseront aussi le fer, aujourd'hui, avec le département de Boubekeur Benbouzid. La Coordination nationale des lycées techniques et technicums a appelé à une journée de protestation nationale contre le risque que fait peser l'Education nationale sur l'enseignement technique. C'est-à-dire, l'école technique devrait, selon la nouvelle philosophie du ministère, grandir dans le giron de la formation professionnelle. Après l'échec, il y a quelques années, du bac professionnel, l'ecole algérienne fait face, de nouveau, à une expérimentation aux contours flous. Le comble, c'est que «ni les parents d'élèves, ni les représentants des enseignants n'ont été invités au laboratoire», à en croire Redouane Osmane, porte-parole du conseil des lycées d'Algérie. L'ecole algérienne donne ainsi l'impression de constituer un véritable jardin d'essais. Le CLA, le Cnapest, l'Unpef et le Satef se plient à une campagne contre «la mise à mort de l'école technique». La formation professionnelle, la nouvelle tutelle de l'école technique, peine déjà à insérer les exclus du système éducatif. Le Cnes a annoncé, l'année écoulée, un taux de déperdition scolaire qui va crescendo et qui dépassait en 2004, les 534.000 exclus. Pis encore, au sein de la formation professionnelle, une secteur qui se réclame réservoir de la main-d'oeuvre, le taux d'abandon s'élève en 2005 à 68.818, soit un chiffre supérieur à celui des échecs qui est de l'ordre de 7846. Ces chiffres inquiétants donnent, d'ores et déjà, un avant-goût de ce que sera l'avenir de l'école technique sous la tutelle d'un secteur jugé «allergisant».