Un million d'enfants, en âge de fréquenter encore l'école, travaillent. 700.000 d'entre eux l'ont quittée uniquement dans ce but. Il y a des chiffres qui devraient faire réagir au quart de tour. Les pouvoirs publics, les secteurs chargés de la prise en charge de la frange de la société la plus fragile, la plus vulnérable, l'enfance, sont interpellés. Les raisons et les causes sont multiples. Les chiffres alarmants appellent à prendre à-bras-le- corps et de la façon la plus urgente, l'échec et la déperdition scolaires mais aussi la toxicomanie et la cybercriminalité, phénomènes aux effets ravageurs, qui ciblent particulièrement une population de plus en plus jeune, psychologiquement précarisée par des vies familiales complètement déstabilisées par les divorces, l'alcoolisme, mais aussi le chômage, facteur économique principal qui incite l'enfant à quitter l'école pour subvenir aux besoins les plus élémentaires de sa famille, pour se nourrir tout simplement. Invité de la rédaction de la Chaîne III, hier matin, le président de la Fondation nationale pour la promotion de la santé et le développement de la recherche (Forem), le professeur Mustapha Khiati, actuel directeur de l'exécutif de l'Observatoire national pour les droits de l'enfant, installé depuis 18 mois, a dressé un tableau peu reluisant de la situation de l'enfant en situation d'échec en Algérie. Selon M.Khiati, le chiffre des délinquants juvéniles dépasserait les 18.000. Ce qui représente une progression de 100% par rapport au début des années 90 où il était estimé à 9000. Les enfants livrés à eux-mêmes, et qui vivent dans la rue, seraient de 20.000. Les causes invoquées? Le manque d'autorité parentale mais aussi, comme cité plus haut, l'échec et la déperdition scolaires, le manque d'intérêt des enfants pour l'école en l'absence de perspectives d'avenir... Le chiffre de la déperdition scolaire est de 440.000 dont 330.000 enfants auraient moins de 16 ans. Les facteurs de l'ampleur d'un tel phénomène sont identifiés et demeurent d'ordre classique, liés souvent aux difficultés familiales. Mais c'est cependant, l'absence de mécanismes sociaux afin d'y remédier qui sont dénoncés par le directeur de l'Observatoire national pour les droits de l'enfant. L'absence d'une loi qui garantirait et protégerait le droit des enfants ainsi que les moyens financiers nécessaires qui font défaut, ne permettent pas la mise en place d'une politique adéquate de lutte contre les fléaux qui rongent une majorité de la population, qui n'est autre que la force vive de la Nation. M.Khiati souhaite un code global qui prendrait en considération les préoccupations de l'enfant. «A quoi servirait une loi, si elle n'est pas soutenue par un décret d'application?», a justement souligné M.Khiati. L'Etat algérien, qui a pourtant ratifié les conventions internationales concernant les droits et la protection des enfants, ne peut avoir de position attentiste face aux fléaux qui risquent de détruire ce qui constitue une de ses plus belles richesses: la jeunesse.