Rien qu'en matière de présence, les députés semblent assurer le Smig syndical. Une législature chasse l'autre, sans que l'on sache exactement qui est redevable de quoi. Si les députés sont élus sur la base d'un programme, lui-même souvent élaboré par un parti politique, cherche-t-on à savoir, à la veille du renouvellement de l'Assemblée, quel est l'état d'application de ce programme? Fait-on miroiter des choses aux électeurs pour mettre une croix dessus au lendemain du vote? Si maintenant les députés ne sont pas élus sur la base d'un programme, et s'ils n'ont pas de compte à rendre, il serait bon de le dire. L'Algérie aurait innové dans ce domaine particulier, en mettant en place un système dans lequel les élus ne sont pas tenus par leurs promesses électorales. La même chose peut être dite des maires: très souvent, c'est le wali qui met fin à leurs fonctions. Comment est-il possible que le wali (nommé par l'Etat) puisse démettre un président d'APC élu par le peuple? N'y a-t-il pas violation de la Constitution? Ou tout au moins du code communal? Quant aux députés, il semble qu'ils ne sont responsables devant aucune institution ni structure. Un député, qui est déjà protégé par son immunité parlementaire, peut même envoyer paître son parti politique, et cela s'est souvent produit. Il y a là des dysfonctionnements flagrants. Si un parti politique sélectionne le nom d'un député sur ses listes, finançant sa campagne et mettant toute la logistique à sa disposition, comment l'intéressé peut-il décider de tout plaquer du jour au lendemain? Or, lorsqu'on regarde à la loupe tous ces éléments, on voit que si le député n'applique pas son programme, c'est que les partis politiques eux-mêmes sont responsables de cet état de fait, puisque les partis sont les premiers à ne pas venir exposer aux électeurs l'état d'application du programme politique présenté pendant la campagne. Ils ont eux-mêmes ouvert la voie à ce qui se passe, et par conséquent c'est tout le système qui est à revoir. C'est une question déontologique de première importance. Cela dit, l'un des indicateurs les plus éloquents de cette inadéquation a trait à l'absentéisme des députés. Les travées de l'Assemblée sont trop souvent aérées lors des sessions parlementaires, indiquant que les députés sont allés à la chasse ou à la pêche. Ainsi, rien qu'en matière de présence, les députés semblent assurer le Smig syndical. Si la présidence de l'APN ne contrôle pas ces absences, qui est habilité à le faire? Le groupe parlementaire? Il existe pourtant un règlement intérieur de l'Assemblée populaire voté par les députés eux-mêmes, mais le cas de figure de l'absentéisme y figure-t-il? Est-il prévu des sanctions en cas d'absences répétées? A quelques mois de la fin de la législature, donc, il est de bon ton de se demander si l'Assemblée populaire nationale a songé, tous partis confondus, à faire le bilan de son action. Quel est le réflexe d'un député en fin de mandat? Se demander si son action a été profitable à la collectivité nationale, ou bien multiplier les contacts dès à présent pour figurer dans la prochaine législature? Déjà que le chef du gouvernement sortant présente plus son bilan devant le Parlement, il serait sans doute superflu d'exiger une telle opération des députés. Cela veut tout simplement dire que c'est la fonction de contrôle qui passe à la trappe. Elus par le peuple, les députés ne demandent pas des comptes à l'Exécutif, et à leur tour, ils ne sont astreints à aucun bilan. Au cours de la campagne électorale, vont-ils venir devant les électeurs en expliquant le bien-fondé de leur action passée, ou bien viendront-ils multiplier des promesses qu'ils ne tiendront pas? Vont-ils promettre monts et merveilles aux pauvres populos que nous sommes, pour ensuite s'occuper de leurs petites affaires, ou bien aurons-nous le droit de leur demander: «Qu'avez-vous fait pendant les cinq années passées pour améliorer la situation de vos électeurs?». Quels sont les députés qui ouvrent un bureau dans leur circonscription pour recevoir les doléances des citoyens? Sachant que le député jouit d'une immunité parlementaire qui lui permet d'interpeller les ministres, d'être reçu dans n'importe quelle administration (ministère, wilaya, etc), on est souvent étonné de voir que les séances de questions orales à l'Assemblées se déroulent en l'absence des ministres concernés, et parfois les députés inscrits eux-mêmes boycottent ces séances. Si ces séances ne servent à rien, alors pourquoi les prévoir? Comment se fait-il que le député ne se sente pas concerné par les problèmes du logement, des écoles, des routes, de la distribution de l'eau et de l'électricité? Et pourtant l'on sait que les députés ont un rôle à jouer dans le domaine économique, en veillant aux conditions dans lesquelles sont effectués les investissements. Dans le domaine social et culturel, en s'interrogeant sur la politique du gouvernement pour résoudre la crise du logement, prendre en charge les problèmes de santé publique, assurer la scolarité des enfants, encourager la politique du livre et du film, alors même que la lutte contre la corruption est l'un des axes de travail que l'APN ne devrait pas négliger, sachant tout le mal que cause ce fléau au Trésor public.