Ils ont, pour la plupart, plaidé non coupables. Au deuxième jour des plaidoiries de la défense, les avocats passés à la barre ont tenté de contrecarrer l'offensive générale du procureur général qui, à l'issue de son réquisitoire, avait, comme attendu, justifié pleinement les chefs d'inculpation en demandant le maximum des peines pour les accusés jugés. Ils ont, pour la plupart, plaidé non coupables en arguant que les chefs d'inculpation à l'encontre de leurs clients étaient non fondés et non justifiés. Me Belkheider plaidant pour le compte de Belarbi Hamdane, président du conseil d'administration de la Mutuelle de la police, et Ouandjelli Mohamed, directeur financier au niveau du même organisme, tous deux accusés de corruption et d'abus de confiance, a fait un plaidoyer remarquable en soutenant que ses clients n'avaient rien à se reprocher, qu'ils avaient agi dans la légalité et n'étaient nullement concernés par les erreurs des autres. Répondant au réquisitoire du procureur général, il dira qu'il était un peu partiel puisque omettant volontairement certains détails importants relatifs à ses clients. Le premier concerne le fait que Khalifa Bank était, aux yeux des opérateurs économiques et sociaux, une banque qui ait exercé légalement ayant un agrément délivré par la Banque d'Algérie. Il s'efforcera de montrer qu'à partir de là, tout le reste en découle. Il s'est interrogé comment une banque aussi importante comme Khalifa ait pu exercer durant sept ans sans que la Banque d'Algérie n'intervienne pour corriger ses anomalies. Bien plus, il insinuera que les gouverneurs généraux, qui avaient été informés dès 1999 de ces anomalies, devaient être les premiers à supporter les conséquences et non les clients de Khalifa. Il rappelle que le grand argentier du pays savait déjà tout, ayant été informé par Touati, ex-vice-gouverneur de la Banque d'Algérie, qui avait adressé un rapport en 1999, faisant état d'irrégularités, un rapport resté d'ailleurs sans suite. Il ajoutera également que Touati avait adressé d'autres rapports à la tutelle sur la base des enquêtes des inspecteurs, établis entre janvier et février 2000 et celui du 18 décembre de la même année, faisant état de la persistance des irrégularités. Il notera qu'en novembre 2001, le gouverneur général était, de nouveau, saisi de cette affaire. Il cite, à l'appui de ses déclarations, le fait que l'ex-secrétaire général du ministère des Finances qui avait réceptionné ces rapports, les avait transmis à son tour à son supérieur hiérarchique, une façon de dire que celui-ci ne doit pas échapper à ses responsabilités. Traitant la nature des chefs d'inculpation, il indiquera que les deux délits, corruption et abus de confiance, ont été prononcés à tort du fait qu'ils ne peuvent coexister sur le plan du droit, de la logique et de la raison en étant contradictoires. Répondant au procureur général sur l'acte notarial, création de Khalifa Bank, jugé illégal, il soutiendra que le notaire Rahal, à propos duquel beaucoup de reproches avaient été faits, n'est pas fautif lui aussi, une manière de repousser l'argument de Khalifa basé sur du faux. Concernant les dépôts, il pose d'abord la question si le dépôt en lui-même constitue un délit et qu'il faut distinguer clairement le profit légitimement recherché par les bons gestionnaires des spéculations douteuses. Cela lui permet de dire que les responsables de la Mutuelle avaient agi dans le bon sens et dans un cadre tout à fait légal. L'on comprend alors où il veut en venir pour être à l'aise dans la défense de ses clients et leur dégagement de toute implication dans l'affaire Khalifa, contrairement aux thèses du procureur général. Sur le cas de Belarbi, il dira qu'il avait agi selon les décisions du conseil d'administration avec l'adoption de résolutions l'autorisant à effectuer le dépôt des 30 milliards de centimes dans Khalifa Bank. «S'il y a délit pour lui, c'est que tous les membres du conseil le sont aussi», lancera-t-il. Dans la même foulée, il déclarera que les cadres des banques publiques, qui avaient été attirés par les propositions alléchantes de salaires et autres avantages, n'avaient rien à se reprocher. De même, il se demandera s'il est logique de soutenir que la délivrance d'une simple carte de séjour de thalassothérapie au bénéfice d'un directeur pouvait être assimilée à de la corruption à côté de ce qui est essentiel, c'est-à-dire de chercher à placer les dépôts dans les meilleures conditions en visant des gains importants pour son organisme. Partant de ce fait, le délit de corruption n'a pas lieu d'être aussi. En conséquence, il demande l'acquittement pur et simple de son client. Me Belkheïder procédera de la même manière pour défendre le cas du président du conseil d'administration en demandant qu'il bénéficie, lui aussi, des mêmes circonstances. Cette plaidoirie a été soutenue par Me Benouadah Mohamed Arezki qui demandera également l'acquittement de son client Belarbi. Les avocats appelés à la barre dans l'après-midi, dont Me Brahimi plaidant pour Rahal Redha, ex-président-directeur général de l'Engeoa, filiale de Sonatrach, Ouassini pour les membres du conseil d'administration des P et T, ont abondé dans ce sens. Me Brahim s'est distingué par sa virulence en essayant de relever les débats. Il éclata ainsi: «C'est un procès d'Etat qui a été dirigé de bout en bout et que les véritables tenants et aboutissants sont ailleurs.» S'adressant à la présidente, il dira que les délits de corruption, comme les cartes de séjour et de gratuité, sont des leurres et des appâts qui cachent les autres véritables enjeux. A noter que les plaidoiries sont suivies en grand nombre par les membres des familles des accusés.