Al Qaîda est devenue un fourre-tout pour le Royaume chérifien, qui, à travers cette énième manoeuvre de diversion, tente vainement de discréditer la lutte du peuple sahraoui pour l'autodétermination. Alors que la question du Sahara occidental amorce sa ligne de démarcation tant sur le plan régional que sur la plan international, le ministre marocain de la Justice, Mohamed Bouzoubab, vient de jeter un pavé dans la mare, en «accusant», dans un entretien à l'hebdomadaire indépendant Al Ayam publié, hier, de «collusion» entre Al Qaîda et le Front Polisario, qui dispute au Maroc la souveraineté sur le Sahara occidental, de coordonner leurs activités pour déstabiliser la région du Sahel. «Il y a, maintenant, coordination et coopération entre Al Qaîda, notamment le Gspc (Groupe salafiste pour la prédication et le combat) algérien et la Salafia Jihadia marocaine, qui engage une action commune avec le Front Polisario». La coordination avec le Front Polisario est «corroborée par des rapports des services de renseignements internationaux», a souligné Bouzoubab, citant, notamment, les services américains. En fait, Washington avait, certes, tenu des propos sur le risque de radicalisation des jeunes Sahraouis, tentés par l'aventure du djihad, mais n'avait pas établi de liens sérieux entre les deux. «Ils (le Polisario, ndlr) tiennent l'en”nemi de l'ennemi pour ami. Et puisqu'ils font du commerce même avec l'aide internationale qui leur est fournie par la Croix-Rouge, on imagine qu'ils pourraient, également, faire commerce de leurs armes qui ne sont soumises à aucun contrôle», a ajouté le ministre. Il a aussi ajouté: «Si nous laissons continuer cette situation, il y aura danger pour toute la région du Sahel, car les séparatistes (Front Polisario, ndlr) aident les groupes terroristes à tous les niveaux pour des actes de sabotage qui porteraient atteinte à la stabilité du Maroc». Le Front Polisario réclame l'indépendance du Sahara occidental, ancienne colonie espagnole annexée par Rabat en 1975, alors que le Maroc compte présenter, en avril, à l'ONU un projet d'autonomie pour ce territoire, sous sa souveraineté. Au moment même où le Premier ministre espagnol et son homologue marocain tenaient un sommet à Rabat où il a été question d'un nouveau plan chérifien d'«autonomie» du Sahara occidental, cette «poussée» marocaine subissait une contre-offensive de la justice ibérique qui estimait recevable une plainte pour génocide déposée par des organisations humanitaires sahraouies contre des personnalités marocaines, selon le quotidien espagnol El Mundo. Le Royaume chérifien s'apprête à soumettre, au mois d'avril prochain, au Conseil de sécurité de l'ONU son projet controversé, projet qui laisse froids les Etats-Unis. L'ambassadeur américain en poste à Alger, Robert Ford a rappelé récemment que «les Etats-Unis avaient soutenu, en 2003, le plan Baker, mais malheureusement la partie marocaine ne l'a jamais mis en exécution». Il précisera aussi, à propos de la campagne menée par Rabat auprès des principales capitales occidentales et, également, des membres permanents du Conseil de sécurité, que la délégation, reçue le 12 février dernier par William Burns, sous-secrétaire d'Etat pour le Maghreb et le Moyen-Orient, «n'a rien proposé de concret». Devant le jeu trouble des uns, les intérêts des autres, et les lenteurs des Nations unies, on voit encore que pour la question de la décolonisation du Sahara occidental, l'ONU n'arrive pas, depuis 30 ans, à organiser un référendum d'autodétermination dans cette région, dernier territoire de l'Afrique encore colonisé, quand un problème identique, celui du Timor oriental a pu trouver une solution conforme au droit international. Al Qaîda est devenue un fourre-tout pour le Royaume chérifien, qui, à travers cette énième manoeuvre de diversion, tente vainement de discréditer la lutte du peuple sahraoui pour l'autodétermination.