Dans le bras de fer opposant le MJS à la FAF, on a oublié de se focaliser sur le bricolage qui existe dans nos clubs. Le ministère de la Jeunesse et des Sports joue comme au chat avec la souris avec la Fédération algérienne de football. Cette dernière se plaignait depuis longtemps du fait que la subvention qu'on devait lui verser au titre de l'année 2006 soit restée bloquée au niveau du MJS. Lequel MJS indiquait que sa décision obéissait au fait que la FAF n'a pas accepté de se mettre en conformité avec la réglementation, autrement dit ses statuts avec les dispositions du décret 05-405 relatif aux fédérations sportives. Un véritable casse tête chinois car, pendant que l'un demande à ce que les textes algériens soient respectés, l'autre évite de le faire parce qu'il sait (et le MJS également) que cela mènerait notre football à la suspension à l'échelle internationale. On a longuement disserté sur les tenants d'un tel scénario, pas tellement gai. Le problème est qu'on a laissé faire, comme si ce bras de fer MJS-FAF n'était qu'une goutte d'eau dans l'océan des priorités auxquelles fait face l'Algérie. Le sport et le football en particulier jouent, pourtant, un rôle éminemment important au sein de la société et contribuent à renforcer la cohésion sociale dans un pays. Dans l'histoire, le budget de la FAF a fondu comme neige au soleil et une menace sérieuse pesait sur nos équipes nationales qui risquaient d'être privées de participation à des compétitions internationales. Il n'y a pas si longtemps que cela, lors d'une conférence de presse qu'il avait animée, le directeur des sports au MJS, M Badredine Naâmane, avait fait savoir aux journalistes que le ministère était disposé à débloquer de l'argent pour la FAF, mais uniquement, pour la préparation des équipes nationales. Interrogé sur le fait de savoir pourquoi cette «entorse» à la démarche observée jusqu'ici par le MJS, puisque la FAF n'avait toujours pas mis ses statuts en conformité avec le décret 05-405, le responsable du ministère a répondu que «les subventions réservées aux équipes nationales peuvent être accordées avant même l'opération de mise en conformité, et ce, dans l'intérêt national». Il a ajouté que «le ministère n'ignore pas que les équipes nationales de football ont des échéances importantes qui nécessitent un financement que la tutelle est disposée à fournir, dès la réception des programmes de préparation». Cette sortie médiatique prête à discussion parce qu'il était connu de tout le monde, surtout du MJS, que les équipes nationales avaient besoin d'argent pour se préparer. Pourquoi donc, ne l'avoir pas fait plus tôt puisque le devenir de ces équipes nationales était si important? Oui, pourquoi ne l'avoir pas fait alors que des «subventions peuvent être accordées avant même l'opération de mise en conformité» lorsque l'intérêt national le commande? Qu'on le veuille ou non, il y a retard et la responsabilité du MJS, si échec il y a de ces équipes nationales, ne pourra être écartée. Du reste, on apprend que la seule aide qui est venue concerne celle accordée à l'équipe féminine et à l'équipe olympique. L'équipe nationale A, celle qui est engagée dans la qualification à la CAN 2008, n'aurait rien reçu. Et puis M.Naâmane avait parlé d'intérêt national à préserver. Ce que l'on sait, c'est que cet intérêt national pourrait être sérieusement mis à mal si la FAF venait à adopter le décret sur les fédérations sportives, car cela entraînerait l'exclusion de l'Algérie des compétitions de football à l'échelle planétaire. Si on ne craignait pas un tel scénario, pourquoi ne pas avoir campé sur ses positions et maintenu la suspension des responsables de la Fédération algérienne d'athlétisme après que l'IAAF ait exclu notre pays des compétitions de cette discipline? Du reste, si le décret 05-405 avait été parfait, on n'aurait pas fait état, ces derniers temps, d'éventuels amendements de ce texte. Des fédérations sportives ont été contactées à ce sujet par le MJS pour qu'elles indiquent les points qui poseraient problème. Et puis, ce ne serait pas la première fois qu'un changement interviendrait au niveau d'un texte réglementaire. Le président de la République, M.Abdelaziz Bouteflika lui-même, a admis que la loi sur les hydrocarbures, pourtant votée par le Parlement, comportait des lacunes et il avait demandé à la retirer pour l'amender. Maintenant, il y a matière à débattre sur la nouvelle stratégie du MJS. Une fédération sportive ce n'est pas que la gestion des équipes nationales, c'est aussi d'autres volets très importants comme la formation des jeunes et le développement de la discipline. La subvention de la FAF faisait l'objet d'un chapitre spécial dans la loi de finance 2006 au titre de la refondation du football. Cela fait des années que la FAF voulait un centre de regroupement des équipes nationales et un centre national de formation. Elle en est toujours à tâtonner sur ce point. Pendant ce temps, des pays, moins nantis que le nôtre, progressent et rêvent de Coupe du monde. Pour notre part, nous dirons que c'est une utopie de croire en une participation au Mondial de 2010 car le bricolage fait des ravages au niveau de nos clubs, véritables socles de tout le système. Quand on voit un grand club de la capitale(nous préférons ne pas révéler son nom), qui évolue en division1, faire entraîner ses catégories de jeunes, en soirée, dans un stade dépourvu de lumière, on doute de la réussite prochaine de notre football. Ces jeunes-là se préparent sur un terrain en tuf et il y a quatre équipes à se partager le terrain. Ils poursuivent leurs entraînements dans l'obscurité totale et lorsqu'ils terminent ils vont se changer dans ce qui s'apparente à un vestiaire, alors que ce n'est qu'un container tout rouillé posé sur le bord du terrain avec deux ou trois chaises pour s'asseoir et où, bien sûr, il n'y a pas d'eau. On parle là d'un club huppé. Imaginez la misère dans laquelle évoluent les jeunes, l'avenir de demain, des autres équipes. La vérité elle est là, cruelle. Quand des ligues de wilaya n'arrivent même pas à faire démarrer leurs compétitions faute d'argent, on ne fait que se bercer d'illusions car sans la base on ne peut rien espérer. C'est là que se trouve la sève du développement. Quand de petits clubs activent avec moins de 20 millions de centimes par an pour un effectif de près de 80 footballeurs sans oublier leurs staffs techniques, on verse dans le bricolage le plus enfantin. C'est bien de dire qu'une école nationale de football va être ouverte bientôt mais une telle structure sera censée accueillir la crème de ce qui se fait au niveau des clubs et des ligues. Quand cette crème émane du bricolage et de l'à peu près, l'école nationale en question risque de se transformer en garderie pour grands enfants.