Autant le procureur général a visé haut et frappé fort, autant les avocats de la défense tentent de prouver le contraire. Les interventions des avocats plaidant au profit des accusés de délits ont laissé place aux plaidoiries défendant les accusés dont les chefs d'inculpation sont beaucoup plus graves, en l'occurrence ceux liés à la création et appartenance à des associations de malfaiteurs, vols qualifiés, escroquerie et abus de confiance. Le procureur général avait requis des peines allant de 5 à 20 ans. Aussi, la tâche des avocats de la défense s'annonce des plus chaudes afin de casser ces accusations, chose très délicate vu les charges et les pièces à conviction, sinon les minimiser au maximum. Autant le procureur général a visé haut et frappé fort, autant les avocats de la défense tentent de prouver le contraire en sortant le grand jeu dans cette affaire dite du siècle. L'un des intervenants les plus en vue a été Me Belouareth plaidant pour l'ex-directeur général de la société pharmaceutique Digromed, Ahmed Yacine. Il a preuves à l'appui et par savantes démonstrations, essayé de lui «enlever» les accusations dirigées contre son client. L'avocat commença sa plaidoirie par une critique envers le juge d'instruction qui selon lui, n'avait pas fait son travail convenablement et comme il se doit. «Il devait mener un travail d'investigation et de confrontation pour mieux situer les choses alors qu'il s'était contenté seulement d'écouter et de transcrire les interrogatoires», dira-t-il tout en insistant sur le fait que même la chambre d'accusation n'a pas été aussi à la hauteur de ses missions en versant dans la précipitation. «Soyons sincères, madame la présidente, vous menez une affaire depuis 45 jours et elle n'est pas encore arrivée à sa fin alors que la chambre d'accusation fait tout cela en un laps de temps très court.» Entrant dans le vif du sujet, Me Belouareth dira que son client n'avait jamais utilisé la carte de thalassothérapie et que le dépôt de 34 milliards de centimes par Digromed a eu lieu à la suite de données purement économiques et d'intérêt pour cette firme à cause des offres alléchantes qu'offrait Khalifa Bank à ses déposants. Il a contesté le fait que son client ait été inculpé pour association de malfaiteurs. Il interpella la juge en ces termes: «Est-ce que mon client était un cadre à la Khalifa Bank? A-t-il incité les gens à déposer au niveau de cette institution financière leur argent? Est-ce que le liquidateur Badsi a reproché quoi que ce soit à mon client?» Puis il conclut: «La réponse est non, évidemment. Alors pourquoi l'incriminer donc?» en insistant que les accusations portées contre l'ex-directeur général de Digromed sont purement et simplement infondées. Plaidant pour le même client, maître Akbouche abonda dans le même sens en soutenant qu'il avait connu Ahmed Yacine il y a plus de 20 ans à l'université et il était toujours connu par son haut niveau intellectuel et son intégrité. En 1999, il a été, toujours selon lui, élu meilleur manager de l'année. Il a formé plusieurs cadres de la nation et «nous les avocats, nous sommes prêts à profiter de son savoir et de son intelligence, une fois acquitté inchâ Allah». Me Akbouche trouve aussi que les chefs d'inculpation retenus contre son client demeurent infondés. Pour être plus explicite, il justifiera le dépôt de l'argent de Digromed au niveau de la défunte banque privée comme étant une nécessité qui s'imposait à la suite d'un contexte et une conjoncture bien particuliers. «A une certaine période, Digromed souffrait d'une véritable asphyxie financière et les postes de ses 1400 travailleurs étaient menacés. Après une étude de son directeur financier, ce dernier n'avait trouvé d'autre alternative en collaboration avec mon client que de déposer l'argent de cette société chargée de la distribution des médicaments au niveau de la banque El Khalifa en comptant sur ses taux d'intérêt très alléchants comparativement aux autres banques». Le même avocat ajouta que ce dépôt a été aussi encouragé par la notoriété de Abdelmoumen Khalifa au niveau national et même dans l'Hexagone. «Mon client est poursuivi, notamment, pour association de malfaiteurs. Franchement, je me demande avec qui? Est-ce le fait de rencontrer Abdelmoumen par hasard, peut être une preuve pour cette accusation?» s'exclama-t-il. Les deux avocats ont demandé finalement à ce que leur client soit acquitté. Ensuite, c'était le tour de Me Belloula de plaider pour le compte de Chebli Mohamed de la Caisse principale d'El Khalifa Bank. Il est lui aussi poursuivi, notamment pour association de malfaiteurs... Il a, tout d'abord, évoqué ce procès en le qualifiant d'enrichissant et d'instructif en rendant aussi un hommage aux accusés qui ont toujours gardé leur dignité au niveau du tribunal. Me Belloula ajouta que les responsables des institutions de l'époque et la commission monétaire ont fait preuve de négligence. «Où étaient-ils?» s'exclama-t-il. Il dira que ce procès a montré beaucoup de lacunes vis-à-vis de nos institutions en matière de dépassements en lançant: «Cela s'appelle non-assistance à personne en danger.»