Miloud Boutaba, secrétaire général du ministère des Finances, n'a pas exclu, hier, ouvertement, l'éventualité d'augmenter les prix du lait. Surprise ou contre-pied? Alors que le consommateur s'attendait à une décision d'urgence à même d'apaiser les tensions autour de la pénurie de lait, les pouvoirs publics annoncent une possible révision à la hausse des coûts. Bien qu'un plan d'urgence a été décrété, à la suite d'une tension qui a monté d'un cran, le secrétaire général du ministère des Finances, signataire de cette nouvelle annonce, vient brouiller carrément les cartes. Interviewé, hier, par la Radio nationale, Miloud Boutaba n'a pas exclu, à demi-mots, l'éventualité d'augmenter les prix du lait. Usant d'un langage très connu chez nos responsables, le même responsable préfère articuler le mot «ajustement» au lieu de hausse, plus approprié. Le langage économique ne sert à rien quant il s'agit de s'adresser au «petit citoyen» qui, en fin de compte, ne cherche pas midi à quatorze heures. Il se pose, plus précisément, la question suivante: la crise tirera-t-elle bientôt à sa fin? Economiquement encore, cette révision à la hausse devra rééquilibrer la barre des coûts, déstabilisée au sein des marchés internationaux, à en croire M.Boutaba. Etant un produit boursier, mais dont la facture est souvent subventionnée par l'Etat, le lait est, en termes clairs, soumis aux fluctuations du marché international. Serait-ce donc la fin de l'époque des subventions? Le secrétaire général du ministère des Finances est, cependant, resté sur son quant-à-soi, se gardant d'avancer, illico presto, la date de cette augmentation. Ce n'est, décidément, pas une priorité. Miloud Boutaba préfère proclamer, pour l'heure, le maintien du prix actuel qui est de l'ordre de 25 dinars le sachet. Mais est-ce que la polémique cessera après cette hypothèse, annoncée avec une allure de certitude, de revoir à la hausse les coûts du lait? Quoi qu'il en soit, l'affaire risque de prendre un tour politique dans un moment marqué par le tohu-bohu des législatives. Explications: dans les milieux populaires l'on s'interroge si l'intérêt du citoyen était détrôné face aux préoccupations politiques des responsables. En tout cas, depuis l'annonce des premières mesures d'urgence, le produit se fait de plus en plus rarissime. Et, l'effet de l'importation immédiate de la poudre du lait se fait encore désirer. Miloud Boutaba a divulgué, hier, la cagnotte destinée à couvrir les besoins immédiats. L'enveloppe est de l'ordre de 6 milliards de dinars, obéissant à la logique d'asphyxier la grogne par la couverture des besoins jugés urgents. Mais cette cagnotte pourrait ne pas tenir le coup plus de trois mois, soit jusqu'à la fin juin, à entendre le secrétaire général du ministère des Finances. Et ce, «en attendant la mise en place de l'Office national du lait», une instance appelée à assurer, désormais, la mission de régulation. Plus exactement la régulation de l'activité d'importation qui, faut-il le reconnaître, était soumise, des années durant, à une véritable anarchie. L'Office national du lait, dont la mise sur pied a été annoncée, il y a quelques jours, sera doté d'un fonds spécial afin d'assurer la pratique de la régulation, le maillon faible qui a, auparavant, affaibli la chaîne. Les économies de ce fonds seront prises en compte dans le cadre de la loi de finances complémentaire de l'année 2007, fera savoir Miloud Boutaba. Le chiffre relatif aux besoins nationaux est à hauteur de 3,7 milliards de litres par an, tandis que les 6 milliards de dinars sont destinés à couvrir, jusqu'à fin juin, les besoins d'urgence uniquement. Une seule solution qui s'annonce inévitable pour le secrétaire général du ministère des Finances; c'est le soutien à la production. La subvention des producteurs et des éleveurs ainsi que l'amélioration de l'environnement viendront ensuite, à coup sûr, alléger la facture de l'importation. En attendant, faut-il libérer, dès maintenant, les prix? Ce serait un haut risque eu égard à une production nationale qui s'avère être de la période des vaches maigres.