Armés de leur carte d'électeur, ils ont sacrifié la journée de repos pour effectuer leur devoir de citoyen. Le ciel bleu mais l'air lourd ce dimanche 22 avril en France. Effectivement, le temps s'est fait beau pour le rendez-vous électoral. Comme prévu, toutes les dispositions ont été prises pour bien démarrer l'opération de vote hier matin. C'est à 8h précises que les bureaux de vote ont ouvert leurs portes pour accueillir les 44,5 millions d'électeurs. Ce scrutin qui a démarré sur fond d'indécision, a été marqué par une forte affluence des électeurs vers les urnes. Armés de carte d'identité et de carte d'électeur, les Français ont sacrifié la journée de repos pour effectuer leur devoir de citoyen. A Cergy, ville située dans la banlieue parisienne, comme partout ailleurs, le vote s'est déroulé dans le calme absolu. Durant les deux premières heures de la matinée, l'affluence aux urnes était timide. C'est à partir de dix heures que les foules commençaient à arriver. Ce sont pour la plupart des jeunes dont l'âge varie entre 18 et 35 ans. Sur place, la forte mobilisation dénote l'enjeu de cette élection. Cette ville de 56.000 habitants a enregistré une augmentation record du nombre d'inscrits. Selon le chef du bureau de vote et élu municipal, Vigne Roger, le nombre d'électeurs est de 25.000 contre 20.000 en 2002. «Comparée à la dernière consultation, je suis très impressionné par la forte participation au scrutin d'aujourd'hui avec un taux dépassant les 19% enregistré à 11h», déclare-t-il. Une heure après, les premiers résultats tombent. Le ministère de l'Intérieur avance un taux de participation de 31,21% au niveau national. Ce chiffre record est nettement supérieur à ceux enregistrés au premier tour des présidentielles de 1995 (23%), de 1988 (27,1%) et de 1981 (25,9%). Une simple lecture de ces chiffres explique l'enjeu de cette élection. Qu'ils soient des Français de souche ou d'origine étrangère, tous sont venus pour exprimer leur voix. Inquiétée par les courants communistes et libéralistes, la population s'est vue dans l'obligation de participer à l'avenir de la France. Ainsi on sent que la surprise du 21 avril 2002 a laissé de graves séquelles chez la plupart des Français. «On est obligé d'aller voter sinon on risque d'être pris au piège», avoue Mehdi un jeune de 27 ans, d'origine algérienne. Rencontré sur le lieu de vote, ce jeune musulman pratiquant explique le défi auquel est exposée la communauté musulmane dans ces élections. «Je suis venu voter pour bien faire car on est la cible du système. Certains ne font pas la différence entre un pratiquant et un extrémiste, en gros tout ce qui a trait à la religion est source de danger», relate ce jeune Maghrébin. Mehdi, comme la plupart des jeunes de banlieue, s'est mobilisé pour faire barrage à certains courants politiques qui mènent une bataille contre l'immigration. Un autre témoignage reflète bien le discours de ce jeune banlieusard. Zouine Djamila, une dame d'origine marocaine relate, de son côté, la réalité amère à laquelle sont confrontés les jeunes immigrés. «Je vote pour écarter les idées extrémistes et pour qu'il y ait une amélioration sociale et sécuritaire», reconnaît-elle. Mère de quatre enfants, son souhait est de voir ses enfants évoluer dans la paix et avoir les mêmes droits sociaux que les Français. Accompagnée de ses deux filles, Djamila a opté pour la candidate socialiste, Ségolène Royal. Il faut reconnaître que depuis les émeutes de 2005, la banlieue fait l'objet d'une surveillance continue des services de sécurité. Un dispositif draconien a été mis en place depuis plus d'une semaine dans les quartiers sensibles pour assurer le bon déroulement du scrutin. Hier, l'événement était au coeur du quotidien. En effet, dans les cafés, les rues et même les conversations téléphoniques le débat était axé uniquement sur les élections. Y aura-t-il une surprise comme celle de 2002? C'est la question que se posaient les citoyens. Des rumeurs sur une éventuelle victoire du candidat du Front national circulaient un peu partout. Enfin, même si leur choix est différent, leur but demeure le même: ils espèrent tous une amélioration de leur quotidien.