Depuis le début de l'année, le Gspc, organisation islamiste armée hégémonique dans la région kabyle et à l'est du pays, subit des revers âpres et semble être au bord d'une désagrégation totale. Au moins 60 éléments armés ont été tués entre Boumerdès et Tébessa, «aire d'activité» du Gspc, depuis le ramadan dernier. Mais là n'est pas le plus important. Depuis un mois, ou plus, les fiefs traditionnels de Hassan Hattab sont soumis à des ratissages intensifs de la part des services de sécurité combinés. Selon le colonel Sabri du groupement de gendarmerie de Béjaïa, chargé de planifier et de superviser les opérations dans la wilaya, «les choses étaient telles qu'elles permettaient aux groupes terroristes de pousser comme des champignons, notamment sur les axes routiers de l'Akfadou à Beni Kessila». Le colonel cite, à titre d'exemple, qu'«entre Béjaïa et Azeffoun, c'est-à-dire sur une distance de 150 km, il n'y avait qu'une seule et unique brigade de gendarmerie». C'était dérisoire et c'était en même temps permettre aux groupes armés toutes les facilités de se mouvoir, de planifier et d'attaquer au moment opportun. A la lumière des derniers ratissages, par les services de sécurité, tous corps confondus, il ressort clairement que le Gspc a subi de grosses pertes. L'artillerie a été intensivement mise en marche, et les pilonnages des cantonnements supposés du Gspc, dans les forêts inexpugnables de Takhoukht, Mizrana, Sidi Ali Bounab et l'Akfadou ont été tout aussi intensifs. Des dizaines de casemates et caches terroristes, qui ont été mises au jour, selon le colonel Sabri, «témoignent de la présence récente des groupes armés». Les indices ne trompent pas: on découvre des denrées alimentaires, de la literie, divers documents, mais aucune trace d'hommes. Pourtant, tous les indices corroborent l'idée qu'ils ont quitté ces caches à peine quelques heures avant l'arrivée des services de sécurité sur les lieux. Les opérations en Petite Kabylie ont été menées en deux étapes. Une première consistait au «nettoyage de grande envergure» du massif kabyle. La gendarmerie, les GLD et la garde communale avaient participé à cette opération «grandeur nature». La deuxième consistait en un maillage plus rigoureux, en un ratissage minutieux et à une avancée à pas de loup, eu égard aux risques de minage du terrain. C'est ainsi que furent découvertes et détruites la plupart des casemates terroristes du Gspc. Cette avancée des services de sécurité induit plusieurs résultantes, dont la plus importante est de savoir où sont passés les hommes de Hattab. Vivant en symbiose avec les populations locales et comptant, depuis une année, sur le départ des brigades de gendarmerie de la région, le Gspc n'a plus les faveurs du terrain. Les hommes, à l'Est, sont en train de remettre en question et l'émirat national de Hattab, et celui régional de Abderrezak «el Para». La récente élimination physique par ses pairs de Nabil Sahraoui, un des émirs de l'Est, confirme cette détérioration des liens entre les différentes factions du Gspc. A cela s'ajoute le retour de dizaines d'éléments dans les villes. Les anciens sanctuaires du Gspc ont été peu à peu mis à découvert par l'avancée des militaires et des services de sécurité. Cela a contraint les éléments armés du Gspc à se replier vers les villes, où il leur serait possible de se fondre dans la foule des agglomérations urbaines. Mais, là aussi, les choses se gâtent pour le Gspc. Près de cent éléments de soutien, formant de solides «réseaux dormants» ont été démantelés entre Boumerdès et Tébessa par la Gendarmerie nationale. Nous avons assisté à la chute du GIA. Nous assistons aujourd'hui à celle du Gspc. Les luttes internes au sein des groupes armés vont évoluer vers une prolifération de groupuscules, qui seront, cette fois-ci, obligés de se connecter aux groupes mafieux des racketteurs, des voleurs de sable et de trafiquants de tout acabit. Le «gangsterrorisme» prend forme et en appelle à d'autres lectures, à d'autres modes d'investigations.