La déclaration de Belkhadem au «Mountada» devait donner un coup d'envoi au débat sur le devenir de l'audiovisuel. Les réticences sont évacuées. Depuis que le FLN a consenti -pour la première fois, par la voix de son secrétaire général au «Mountada» de l'Entv- à ouvrir le champ de l'audiovisuel au capital privé, les choses commencent à bouger. Jusqu'à tout récemment, le sujet était tabou. Après sa nomination à la tête du ministère de la Communication, Hachemi Djiar -candidat aux législatives sous les couleurs du FLN- avait déclaré qu'il n'était point question d'ouverture, rappelle-t-on. Le groupe du FLN, qui travaillait sur le projet d'amendement de la loi relative à l'information, s'est retrouvé dès lors coincé. Ce détail a rendu la finalisation du texte improbable. Mais la déclaration de Belkhadem est venue au bon moment pour dégager une éclaircie. A l'exception du Parti des travailleurs, l'ensemble de la classe politique est favorable à l'ouverture de l'audiovisuel au capital privé. Certains proposent le partenariat alors que la plupart vont carrément vers la levée de toutes les contraintes. Lors de ses dernières sorties médiatiques, le secrétaire général du RND, M.Ahmed Ouyahia avait évoqué la question en se disant favorable à l'ouverture des chaînes de télévision aux capitaux mixtes (public-privé) avec un cahier des charges strictes. Il s'agit, entre autres, de respecter les bonnes moeurs et d'éviter les programmes qui encouragent la violence. Pour sa part, le président du Msp ne trouve aucun inconvénient pour que le champ audiovisuel soit limité à une seule chaîne publique. Cependant, il est clair que l'ouverture ne serait possible qu'après l'installation d'un système de contrôle par le biais d'un Conseil supérieur de l'information ou de l'audiovisuel. La suggestion de Saïd Bouchaïr, président de la Commission nationale politique de surveillance des élections législatives (Cnpsel), faite au même «Mountada» n'est pas fortuite. Il se dit favorable à la création d'un Conseil de l'information, fort utile en période électorale. Chacun sait que la levée du monopole sur les rotatives ne pouvait qu'entraîner la levée des contraintes, toutes les contraintes, entravant l'épanouissement d'une liberté d'expression plurielle et garante des acquis de la démocratie en Algérie. Reste le monopole sur la publicité qui sera, à coup sûr, levé quand la loi sur la publicité sera programmée à l'APN. Ainsi les lois relatives aux secteurs de l'information et de la publicité figurent en priorité dans l'agenda de l'Assemblée issue du scrutin du 17 mai prochain. Elles constituent une donne capitale dans les orientations politiques nouvelles qui seront, vraisemblablement, suivies d'une reconfiguration de la scène politique, sur la base de la représentativité, si les législatives ne sont pas entachées d'irrégularités. Ces amendements ne constituent pas, pour le moment, un thème de campagne. Les candidats et les animateurs de campagne préfèrent les thèmes sociaux parce qu'ils suscitent l'intérêt des électeurs. Ils tablent donc sur les préoccupations du citoyen au lieu d'aborder les sujets qui engagent le devenir d'une APN dont on ne connaît pas encore les contours. Depuis 1990, le champ médiatique algérien a connu son boom. Mais il est resté limité à la presse écrite, malgré le foisonnement des titres, otages cependant du bon vouloir des décideurs qui encerclent les patrons de presse par le monopole sur la publicité. La corporation a régressé sur le plan des acquis sociaux et des droits, à l'ombre d'un développement sans précédent en matière de création d'emplois. Aucun syndicat représentatif n'a été toléré. L'état d'urgence en vigueur -qu'on a tendance à oublier- est un autre élément de contrainte. Le contrôle réussi de la presse a donné une image figée d'un paysage médiatique pionnier pourtant dans le monde arabe et sa périphérie. Si ouverture de l'audiovisuel il y a, les vaches ne seront que mieux gardées. Il y aura des radios et des chaînes privées qui viendront verser leur fiel dans la galaxie satellisée des chaînes X. Ce seront, bien sûr, des exceptions. Mais l'on s'attend à un net enrichissement de la scène médiatique. On ne peut subir indéfiniment l'information ou désinformation qui nous tombe du ciel sans pouvoir la contrer ou avoir une influence quelconque sur les autres par un professionnalisme qui a déjà fait ses preuves dans la presse écrite.