Des rencontres informelles sont tenues en retrait des caméras et des regards indiscrets. Le chef du gouvernement avait affirmé, lors du forum de l'Entv, que les activités des ministres sont suspendues jusqu'à la fin du scrutin. «Tous les ministres qui se présentent aux élections seront des candidats comme tous les autres», indique-t-il, avant d'ajouter que les conseils de gouvernement sont suspendus pour permettre aux ministres candidats de faire leur campagne. Une décision prise pour éviter que ces derniers utilisent leurs postes ministériels à des fins électorales. Une promesse qui ne semble pas être tenue, au vu de la réalité. Une «promesse» qui, apparemment, n'est pas tenue. En effet, la réalité est tout autre, et des membres du gouvernement usent de formes plus subtiles pour contourner l'instruction de la commission Bouchaïr. Demain, le ministre de la Jeunesse et des Sports et néanmoins candidat du RND aux législatives pour la wilaya de Sétif, sera à la tribune officielle du stade du 8-Mai-1945, pour assister à la finale aller de la Coupe arabe, qui opposera l'ESS et Al Fayçali de Jordanie. Il aura même l'occasion de descendre sur la pelouse pour saluer les deux équipes, devant pas moins de 40.000 spectateurs, dont plus de la majorité ont l'âge de voter. Une double casquette, puisqu'il est tête de liste du RND aux législatives du 17 mai, et surtout ministre de la République, dont la présence à cette compétition est quasiment inévitable. M.Guidoum crèvera donc l'écran, tout au long du match. Pourtant, la commission nationale de contrôle des élections législatives interdit la couverture par les médias publics des ministres candidats. Que va-t-on faire dans ce cas? Fera-t-on l'impasse sur la présence de M.Guidoum au stade du 8-mai 1945? La question mériterait d'être posée. Cependant, une chose est sûre, certains membres du gouvernement n'hésitent pas à prendre prétexte de leurs visites sur le terrain pour faire leur campagne et/ou faire carrément de la «sous-traitance» à leurs collègues candidats, qui sont, soit dit en passant, membres du même exécutif. C'est de bonne guerre, dira-t-on. Des ministres qui font campagne pour leurs collègues candidats, est inconcevable. Car, non seulement l'éthique ne le permet pas, mais surtout la loi l'interdit. Toutefois, devant les assurances du chef de l'Etat, qui, à travers son instruction aux autorités locales avait insisté sur le respect de l'impartialité de l'administration -une instruction d'ailleurs répercutée par M.Bouchaïr, président de la commission chargée du contrôle des élections législatives- les institutions concernées joueront-elles le jeu? Pour le moment, même si, dans l'ensemble, ces règles ont été observées par les partis et candidats indépendants en lice, il reste que des réflexes que nous croyons être révolus ressurgissent. Des membres de l'Exécutif qui «sous-traitent» pour leurs collègues au sein du gouvernement ou autres institutions de l'Etat, ça existe. C'est l'exemple du ministre des Travaux publics qui, à la veille d'un meeting de M.Soltani dans la wilaya de Djelfa, notamment à Messaad, part en éclaireur pour «baliser» le terrain. On se permet même de tenir des réunions avec les notables de ces localités. Des rencontres informelles sont organisées en retrait des caméras et des regards indiscrets. D'ailleurs, ce même ministre était, hier à Sétif et à Bordj Bou Arréridj. Une visite, qui, non seulement entre dans le cadre de ses activités ministérielles, mais aussi en tant que cadre du MSP qui a un message à faire passer à la veille de l'arrivée, aujourd'hui, de M.Yahia Guidoum, tête de liste du RND pour Sétif. La capitale des Hauts-Plateaux a été aussi, l'escale de M.Amar Tou, ministre de la santé, lui aussi candidat aux prochaines législatives à Oran. D'autres, sous prétexte de sensibiliser les électeurs à aller voter en masse, n'hésitent pas à promettre monts et merveilles. D'ailleurs, serait-ce une simple coïncidence que de voir coïncider ou se succéder la visite d'un ministre avec le meeting de son collègue de la même formation politique et dans la même wilaya? Il est clair que quand la moitié du gouvernement, soit 19 ministres, toutes tendances confondues, se lancent dans l'arène, le jeu est biaisé d'avance. Que fera donc la commission nationale de contrôle des élections sur ce cas de figure? En tout cas, la loi ne prévoit rien pour ce genre de situation, sauf que les médias publics ne doivent pas couvrir les activités des ministres candidats.