L'option de grève illimitée sera débattue, mercredi prochain, en assemblée générale extraordinaire. Pas de bonne nouvelle en mesure de les rassurer. Les avocats maintiennent le mot d'ordre et croiseront le fer, aujourd'hui, avec le département de Tayeb Belaïz. C'est le dernier recours. Les robes noires, depuis l'annonce de la grève, n'ont connu aucun soulagement, faute d'un écho de la part du ministère de la Justice. Les 20.000 avocats, dont 7000 agréés, sont inquiets face à une «grave détérioration de la situation des droits de la défense». Le but de la grève consiste justement à faire disparaître le risque «d'automatisation» qui pèse sur le métier d'avocat. La seconde menace qui pèse, est le silence total des instances concernées. Les robes noires comptent répondre du tac au tac. Ils sont allés jusqu'à brandir, sans hésitation aucune, la menace d'une grève illimitée. En tout cas, cette option sera débattue, mercredi prochain, en assemblée générale extraordinaire. Pour ainsi dire, cette option est «la plus privilégiée des avocats qui sont toujours dans l'attente d'une prise en charge», fera savoir le délégué des robes noires, Abdelmadjid Silini. La réponse de Tayeb Belaïz à cette expression de colère donnera un avant-goût de ce que sera la suite du scénario, a-t-on appris, hier, de la part des avocats. Le différend apparaît ainsi aigu. La pomme de discorde n'est autre que la situation, jugée «catastrophique» des droits de la défense en Algérie. Lors d'un point de presse, tenu le 29 mai dernier dans l'enceinte du palais de justice d'Alger, des pratiques graves qui rappellent des temps révolus ont été dévoilées au grand public. Les robes noires, par la voix du bâtonnier, Abdelmadjid Silini, sont allées jusqu'à solliciter l'arbitrage du premier magistrat du pays. Depuis la sortie médiatique des avocats, les responsables du ministère de la Justice sont restés de marbre. En général, les robes noires dénoncent «les dérapages de ceux qui dirigent la justice». Tayeb Belaïz est pointé du doigt. Il est le premier responsable qui s'est collé la mission de réformer la justice. Les avocats préfèrent user d'un autre langage: «la déformation et le massacre de la justice». Cependant, dans les détails, 39 avocats sont poursuivis «illégalement» en justice, «des greffiers sont instruits à ne plus recevoir et fournir des renseignements aux avocats au niveau des chambres et des sessions» et une «volonté de rétrécir et marginaliser les droits des avocats». En un mot, «ce sont les droits de la défense qui font l'objet d'une grosse menace», a laissé entendre Abdelmadjid Silini. Le blocage se pose au niveau du ministère, à en croire le délégué des avocats. A cette grève s'ajoute la décision de boycotter la session criminelle à Alger. Face au silence du ministre, le cercle des amis s'élargit. Et, comme premiers signaux de solidarité: le Snpsp et les enseignants soutiennent le mouvement de grève du syndicat des avocats. Dans la foulée, Redouane Osmane, porte-voix du Conseil des lycées d'Alger (CLA), appelé à comparaître, aujourd'hui, avec quatre de ses collègues, devant le tribunal, n'hésite pas à se solidariser avec les avocats. «Nous continuons à être mobilisés et nous plaidons encore pour le droit à la grève», a-t-il fait savoir, joint, hier, par téléphone. Notre interlocuteur croit que le fait de faire comparaître les enseignants devant la justice le jour du Bac «est une grosse provocation et c'est une date bien calculée». Et de s'insurger encore: «Le tribunal administratif est censé protéger les justiciables contre l'administration, en Algérie, c'est l'inverse». En un mot, la justice passe une très mauvaise période. N'est-il pas temps de faire une évaluation de la réforme?