Simples amendements ou refondation, la révision projetée de la Constitution implique la nécessité du choix d'un système politique. En réalité la question n'est nullement académique et engage le pays pour la (ou les) prochaine(s) décennie(s). Y aura-t-il révision de la Constitution, comme le laissent entendre certaines sources «autorisées» proches de la mouvance présidentielle, ou en sommes-nous toujours, et encore, au ballon d'essai? Aussi, nonobstant le flou qui entoure le devenir de l'actuelle loi fondamentale et l'ampleur des amendements que l'on compte lui apporter, demeurent néanmoins maintes interrogations sur le pourquoi d'une telle révision. Une Constitution est généralement un choix de régime, choix qui doit être en adéquation avec ce que veut le peuple, et plus largement, s'inscrit dans l'environnement géostratégique dans lequel s'insère le pays. Quel régime est aujourd'hui le mieux approprié dans le cas d'un pays comme l'Algérie? Une question difficile à laquelle aucun homme ne peut seul y apporter les réponses qui soient en phase avec l'expérience qui est celle de l'Algérie. En réalité, dans le contexte qui est celui de notre pays, un large débat aurait dû être initié pour sérier ce que peut être une loi fondamentale qui sert en priorité les intérêts des citoyennes et des citoyens de ce pays. Dès lors, la question première qui vient à l'esprit c'est quel régime on compte adopter pour l'Algérie si l'on suppute que partis politiques et constitutionnalistes regrettent le flou et les imprécisions qui caractérisent la Constitution de 1996 qui ne répond pas précisement à ce questionnement. Le régime politique induit, en priorité, le type de rapports pouvant ou devant exister entre les pouvoirs publics. Les constitutionnalistes classent, traditionnellement, les régimes politiques selon la théorie de la séparation des pouvoirs, notion chère aux philosophes et penseurs européens du XVIIIe siècle qui en ont défini le concept. Il existe, en fait, plusieurs sortes de régime politique. Il y a ceux où la confusion est délibérément entretenue entre les différents pouvoirs avec comme conséquence de ne pas garantir les libertés individuelles et collectives. Ce genre de régime est généralement le fait de pouvoirs autoritaires. Or, les régimes démocratiques et libéraux ont pour fondement la séparation des pouvoirs. Cette séparation peut être souple, c'est alors le régime parlementaire avec ses diverses déclinaisons, ou plus rigide, comme peut l'être un régime présidentiel fort. Le choix du système politique du pays est donc l'un des fondements d'une Constitution. Sans entrer dans le détail des divers régimes induits par le parlementarisme ou le présidentialisme, notons, toutefois, qu'il existe de nombreuses subdivisions à ces régimes qui donnent un large éventail aux constitutionnalistes pour élaborer la loi fondamentale qui s'adapte le mieux au pays et à son niveau de développement social, politique et économique, notamment. En régime parlementaire il existe plusieurs formes pouvant organiser les rapports entre les pouvoirs. Ainsi, dans le régime parlementaires dit «dualiste», le chef de l'Etat joue un rôle politique important et fera face à un Parlement qui dispose de prérogatives tout aussi essentielles. Dans le régime parlementaire dit «moniste» le chef de l'Etat s'efface, c'est le parlementarisme absolu, caractérisé, en particulier, par l'instabilité des gouvernements constamment sous la menace d'une motion de censure. Le régime présidentiel est caractérisé par l'isolement des pouvoirs dans la mesure où le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif sont organiquement et fonctionnellement indépendants. C'est le cas du régime présidentiel américain. Ce qui suppose des chambres basse (Assemblée nationale) et haute (Sénat -ou Conseil de la nation) suffisamment nanties en pouvoirs pour partager la gouvernance avec la présidence. Ce qui est loin d'être le cas en Algérie. Mais définir les avantages et désavantages de tel ou tel régime parlementaire ou présidentiel, n'est pas l'objet de cet écrit dans lequel nous nous bornons à suggérer des axes de réflexion. Mais il appartient, certes, aux constitutionnalistes algériens de donner leur avis sur un thème qui reste important pour le devenir de la nation. Aussi, la Constitution, comme semblent le conseiller certains partis politiques, ne peut dépendre du seul vouloir du premier magistrat du pays dans la mesure où le choix d'un système politique engage l'ensemble du pays. Or, aucun parti politique ne donne l'impression de réellement savoir -si l'on excepte la possible, sinon probable, abrogation de l'article 74 de la Constitution qui fixe à deux mandats la magistrature suprême du pays- ce que prépare la présidence quant à l'ampleur des amendements qui vont être apportés à la Constitution et leurs caractéristiques. Il est donc curieux que la classe politique, d'une manière générale, les partis politiques plus particulièrement, ne s'engagent pas davantage dans le débat sur la refondation où les amendements qui seront apportés à la loi fondamentale, révision qui pourtant, interpelle partis et société civile, premiers concernés pour contribuer à la mise en forme d'une Constitution en adéquation avec les demandes et attentes du peuple algérien. Mais, face au silence de la société civile, à la prudence excessive que montrent les partis politiques, ceux-ci, à l'évidence, refusent de s'engager laissant l'entière initiative (et responsabilité) au premier magistrat de l'Etat, quant au choix stratégique du système politique. L'Algérie semblait pourtant avoir dépassé la vision ambiguë du pouvoir personnel pour s'orienter vers la mise en place d'un véritable pouvoir démocratique où s'impliquent société civile et partis politiques avec, à l'esprit, la consolidation de l'Etat de droit et des libertés citoyennes, qui devaient rester la quintessence de leurs préoccupations.